Contract
GRI2016-102 |
Contrat de mandat Explications et marche à suivre |
Domaine : Gouvernance des systèmes d’information |
Objectifs : Le document présente une marche à suivre permettant à toute personne, ayant les connaissances requises, de pouvoir rédiger concrètement un contrat de mandat. Il fait partie d’une collection de directives juridiques comprenant entre autre : GRI2016-101 - Généralités relatives aux contrats GRI2016-102 - Contrat de mandat GRI2016-103 - Contrat d’entreprise GRI2016-104 - Contrat de travail GRI2016-105 - Contrat de vente GRI2016-106 - Contrat de freelance |
Public cible : Toute personne devant rédiger ou signer un contrat de mandat ou souhaitant connaître les différences entre les différents contrats couramment utilisés dans un service informatique. |
Avertissement : La responsabilité du GRI ne peut être engagée, de quelque manière que ce soit, suite à l’utilisation du contenu de ce document. |
1. Le contrat de mandat
1.1 Définition
Le contrat de mandat est régi par les articles 394ss du Code des obligations (CO). Selon la définition légale (art. 394 al.1 CO), il s’agit d’un « contrat par lequel le mandataire s'oblige, dans les termes de la convention, à gérer l'affaire dont il s'est chargé ou à rendre les services qu'il a promis ». En d’autres termes, le mandataire s’oblige à rendre des services dans l’intérêt du mandant conformément à la volonté de ce dernier.
Le contrat de mandat se caractérise par la prestation de service que promet le mandataire. En effet, ce dernier s’engage à faire preuve de toute la diligence possible en vue d’atteindre un certain résultat mais ne garantit en aucun cas le résultat en tant que tel. De plus, le
contrat de mandat peut être révoqué en tout temps (art. 404 al. 1 CO) sous réserve d’une indemnisation en cas de révocation en temps inopportun (art. 404 al. 2 CO). Cette règle est une caractéristique très importante du contrat de mandat.
2. La conclusion du contrat de mandat
La conclusion du contrat de mandat obéit au principe général posé à l’art. 1 CO : les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté.
2.1 La forme du contrat de mandat
La loi n’exige aucune forme particulière pour que le contrat de mandat proprement dit soit valable. Il est toutefois possible pour les parties de recourir à une forme conventionnelle.
Il convient de rappeler le principe général selon lequel « le silence ne vaut pas acceptation
». L’art. 395 CO comporte toutefois une entorse à cette règle dans trois cas de figure. En effet, à moins d'un refus immédiat, le mandat est réputé accepté lorsqu'il se rapporte à des affaires pour la gestion desquelles le mandataire a une qualité officielle, ou qui rentrent dans l'exercice de sa profession, ou pour lesquelles il a publiquement offert ses services.
2.2 La gratuité du contrat de mandat
Selon les termes de l’art. 394 al. 3 CO, une rémunération est due au mandataire si la convention ou l’usage lui en assure une. La loi présume ainsi la gratuité du mandat.
Il faudra alors convenir lors de la conclusion du contrat d’une rémunération due par le mandant au mandataire.
3. Les obligations du mandataire
3.1 L’obligation de rendre service
L’art. 397 al. 1 CO impose au mandataire d’exécuter le contrat de mandat, c’est-à-dire de rendre le service convenu, conformément aux instructions reçues par le mandant. Le mandataire ne pourra s’écarter des instructions promulguées qu'autant que les circonstances ne lui permettent pas de rechercher l'autorisation du mandant et qu'il y a lieu d'admettre que celui-ci l'aurait autorisé s'il avait été au courant de la situation.
En principe, le mandataire doit exécuter personnellement le mandat. Il est cependant possible pour le mandataire de recourir à l’aide d’une tierce personne :
Le sous-mandataire1 : tiers indépendant, en principe spécialisé, auquel le mandataire sous-traite l’exécution du contrat de mandat de manière indépendante. Le sous- mandataire répond personnellement de ses actes.
L’art. 398 al. 3 CO prévoit que le mandataire peut recourir à l’aide d’un sous-mandataire dans trois hypothèses : il est autorisé par le mandant à transférer l’affaire à un tiers, il y est contraint par les circonstances ou enfin, l’usage et la pratique permettent cette substitution.
Cette configuration engendre trois rapports juridiques distincts :
Relation mandant – mandataire : « contrat de mandat de base » avec pour
particularité l’art. 399 al. 2 CO qui prévoit que si le mandataire avait expressément reçu le pouvoir de se substituer quelqu’un, il ne répond que du soin avec lequel il a choisi le sous-mandataire et donné ses instructions.
Relation mandataire – sous-mandataire : « contrat de mandat » ordinaire.
Relation mandant – sous-mandataire : aucun contrat ne lie ces parties mais l’art. 399 al. 3 CO prévoit que le mandant peut faire valoir contre le sous-mandataire les droits qu’il détient contre le mandataire de base (comme par exemple des dommages et intérêts, un droit de résiliation).
L’auxiliaire : tiers auquel le mandataire confie le soin d’exécuter la prestation due au mandant et cela, indépendamment de l’avis du créancier. L’art. 68 al. 1 CO prévoit en effet la possibilité pour tout débiteur d’une prestation (comme le mandataire dans le cas du contrat de mandat) de recourir à un tiers. L’auxiliaire n’agit pas de manière indépendante. En d’autres termes, le mandataire répond des actes de l’auxiliaire selon l’art. 101 al. 1 CO. La possibilité offerte par l’art. 68 al. 1 CO de recourir à un tiers doit cependant être écartée dans deux situations : lorsque les parties ont conventionnellement convenu dans le contrat de mandat que le débiteur devait s’exécuter en personne et lorsque l’exécution personnelle est imposée par la nature de l’affaire (il s’agit des cas dans lesquels le mandataire a un intérêt à ce que l’exécution soit fournie par le mandataire en personne notamment lorsque ce dernier dispose de compétences propres particulières).
Ainsi, il est très important de régler les cas de substitution et de recours aux auxiliaires de manière claire et explicite dans le contrat de mandat. Le mandant qui désire que le mandataire effectue personnellement la prestation, au vu notamment de ses compétences personnelles, devra le mentionner explicitement dans le contrat afin d’éviter tout transfert à un sous-mandataire ou à un auxiliaire.
1 On parle aussi de « substitut ». Dans tous les cas il s’agit d’un cas de substitution.
L’art. 398 al. 2 CO prévoit que le mandataire est responsable envers le mandant de la bonne et fidèle exécution du mandat. Il doit en d’autres termes agir comme le ferait une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances. On s’en référera aux règles de l’art (soit aux standards ayant cours au sein de la profession en question).
Il découle également de l’art. 398 al. 2 CO que le mandataire doit agir en toutes
circonstances dans l’intérêt du mandant. La distinction entre obligation de diligence et de fidélité peut s’avérer floue mais la distinction n’a pas d’importance en pratique. Il convient simplement de retenir que le mandataire doit agir avec tout le soin possible et toujours dans l’intérêt du mandant (obligation d’avertir le mandant régulièrement de l’avancement du mandat, rendre le mandant attentif aux risques que peut comporter le service etc…).
3.4 L’obligation de rendre compte et de restitution
L’art. 400 al. 1 CO prévoit l’obligation de reddition de compte. Le mandataire doit, à la demande du mandant, lui rendre compte de sa gestion en tout temps. Le mandant doit en effet pouvoir connaître à tout moment l’évolution de la situation.
L’art. 400 al. 1 CO oblige également le mandataire à restituer au mandant tout ce qu’il a reçu dans le cadre du mandat à quelque titre que ce soit.
Afin de favoriser le mandant au détriment des créanciers du mandataire, l’art. 401 CO prévoit deux privilèges au mandant :
La cession légale des créances acquises par le mandataire contre des tiers en exécution du contrat de mandat lorsque le mandant a satisfait ses propres obligations.
Le droit de revendication dans la faillite du mandataire sur des biens mobiliers acquis par le mandataire en exécution régulière du contrat de mandat à condition que le mandant ait exécuté ses propres obligations.
4. La responsabilité du mandataire
La responsabilité du mandataire est régie par l’art. 398 CO qui renvoie aux règles sur la responsabilité du travailleur dans le cadre d’un contrat de travail et plus spécifiquement à l’art. 321e al. 1 et 2 CO qui prévoit que le travailleur répond du dommage qu’il cause à l’employeur intentionnellement ou par négligence. La mesure de la diligence qui incombe au travailleur se détermine par le contrat, compte tenu du risque professionnel, de l’instruction ou des connaissances techniques nécessaires pour accomplir le travail promis, ainsi que des aptitudes et qualités du travailleur que l’employeur connaissait ou aurait dû connaître.
4.1 La responsabilité personnelle
Le mandataire est donc responsable envers le mandant de la bonne, soigneuse et fidèle exécution du contrat de mandat (art. 398 al. 2 CO). Le degré de diligence s’examinera au regard de l’art. 321e al. 2 CO réglant la responsabilité du travailleur.
Afin d’engager la responsabilité du mandataire au sens de l’art. 97 CO (cf. la directive intitulée « Généralités relatives aux contrats »), le mandant devra prouver la réalisation de quatre conditions :
Il faut un préjudice (dommage matériel ou tort moral),
Il faut une violation du contrat, c’est-à-dire une violation des obligations du mandataire,
Il faut une faute intentionnelle ou par négligence commise par le mandataire capable de discernement. Toute faute entre en considération, même aussi légère qu’elle soit. Le fardeau de la preuve est ici renversé : le législateur part du principe que le mandataire a commis une faute. Ce sera alors au mandataire de prouver que tel n’est pas le cas.
Il est difficile de distinguer entre la preuve de la violation du contrat (soit le non- respect de l’obligation de diligence du mandataire) et celle de la faute. Les deux se recoupent largement, ainsi, lorsque le mandant parvient à prouver la violation du contrat, de fait, il prouve la faute.
Il faut encore un lien de causalité naturel et adéquat. La causalité est naturelle lorsque il y a lieu d’admettre que, sans la violation du contrat de mandat, le préjudice ne se serait pas produit. La violation du contrat est la condition sine qua non de la survenance du préjudice mais il n’est pas nécessaire que cette violation soit la cause unique ou immédiate du préjudice : il suffit que la violation du contrat, associée à d’éventuels autres facteurs, ait provoqué l’atteinte. La causalité est adéquate lorsque le comportement de l’auteur était propre, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s’est produit.
L’art. 397 al. 2 CO rajoute que lorsque le mandataire ne respecte pas les instructions du mandant mais répare le dommage à sa charge, le mandat est censé être correctement exécuté.
4.2 La responsabilité pour les tiers
La responsabilité pour les auxiliaires est traitée à l’art. 101 CO. Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, comme des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail. Ainsi, le mandataire répond des actes de l’auxiliaire comme si c’était lui-même qui avait agit. L’art. 101 al. 2 CO prévoit qu’il est possible de conclure une convention préalable excluant en tout ou en partie la responsabilité dérivant du fait des auxiliaires. Le système autorise aux parties de choisir la personne qui supporte le dommage causé par l’auxiliaire du débiteur.
Il convient donc, en cas de délégation de travail à une personne auxiliaire de régler dans le contrat la question de la responsabilité car à défaut, c’est le débiteur qui sera responsable (art. 101 al. 1 et 2 CO).
La responsabilité pour les sous-mandataires est régie à l’art. 399 al. 2 CO. Lorsque la substitution est autorisée, le mandataire ne répond que s’il a commis personnellement une faute dans le choix du sous-mandataire ou dans l’instruction qu’il a donnée à ce dernier. Il faut de plus, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral et la doctrine, que le mandataire ait agit en procédant à la substitution, exclusivement dans l’intérêt du mandant. Lorsque la substitution n’est pas autorisée, l’art. 399 al. 1 CO prévoit le même régime que l’art. 101 CO, c’est-à-dire que le mandataire répond des actes du sous-mandataire comme s’il s’agissait des siens.
Ainsi, en cas de substitution licite, le mandataire devra bien se veiller à choisir un sous- mandataire qualifié, à lui donner toutes les instructions nécessaires et à ne déléguer le travail que dans l’intérêt exlcusif du mandat. Ainsi, le recours à un sous-mandataire dans l’intérêt du mandataire (problème de temps à disposition, vacances etc…) ne justifie pas l’exonération de responsabilité du mandataire.
4.3 La limitation de la responsabilité
Il est possible de déroger au système de responsabilité en prévoyant certaines exclusions de responsabilité du mandataire. Des règles générales limitent cependant cette possibilité. L’art. 100 al. 1 CO prévoit que le mandataire ne peut pas s’exonérer de toute responsabilité en cas de dol ou de faute grave. Il est cependant possible de s’exonérer pour faute légère.
Pour rappel, l’art. 101 al. 2 CO prévoit la possibilité pour le mandataire de s’exonérer de la responsabilité du fait d’un auxiliaire.
Il est possible pour le mandant d’agir contre le mandataire pour cause d’inexécution ou de mauvaise exécution du contrat dans un délai de 10 ans en vertu de l’art. 127 al. 1 CO.
5. Les obligations du mandant
Le mandant doit, en vertu de l’art. 402 al. 1 CO, rembourser les impenses en principal et intérêts (il s’agit des avances et autres frais) encourues par le mandataire en vue de l’exécution régulière du mandat. En d’autres termes, toute diminution patrimoniale du mandataire en lien avec l’exécution correcte du mandat doit être remboursée par le mandant. Cette règle est cependant dispositive et peut être évitée par les parties lors de la conclusion du contrat en prévoyant que le mandataire prendra en charge les impenses qu’il doit payer lors de l’exécution du contrat.
Le mandant doit de plus, toujours en vertu de l’art. 402 al. 1 CO, libérer le mandataire qui s’engage envers des tiers à payer des sommes dans le cadre de l’exécution régulière du mandat. Lorsque la dette contractée par le mandataire dans le cadre du contrat de mandat n’est pas encore arrivée à échéance, il est possible de procéder à une reprise de dette pour autant que le tiers soit d’accord. Si ce dernier refuse, le Tribunal fédéral autorise le mandataire à exiger en tout temps que le mandat lui garantisse par quelque moyen que ce soit le montant de la dette.
6. La fin du contrat de mandat
Le contrat de mandat peut être révoqué ou répudié en tout temps selon l’art. 404 al. 1 CO. Si la révocation a lieu en temps inopportun pour une des partie, l’art 404 al. 2 CO prévoit qu’une indemnisation du dommage causé par la révocation devra être payée par la partie qui résilie le contrat.
En outre, selon l’art. 405 al. 1 CO, le mandat se termine par la perte de l’exercice des droits civils, par la faillite, par la mort ou par la déclaration d’absence soit du mandant, soit du mandataire à moins que le contraire n’ait été convenu dans le contrat ou ne résulte de la nature de l’affaire (notamment si le contrat de mandat a été conclu avec le mandataire en raison de ses qualifications personnelles spécifiques).
7. Le droit d’auteur
Lorsque le contrat de mandat porte sur le développement d’un logiciel informatique, se pose alors la question du droit d’auteur. Cette question n’est pas liée au contrat de mandat spécifiquement car en effet, la question du droit d’auteur est indépendante des art. 394ss CO.
7.1 Les généralités du droit d’auteur en matière de logiciel
L’art. 2 al. 3 de la loi sur le droit d’auteur et les droits voisins (LDA) protège expressément les logiciels. Ils sont en effet considérés comme une oeuvre littéraire. La structure interne (les éléments de forme) du logiciel est protégée par le droit d’auteur, contrairement à ses principes de solution (méthode de calcul, algorithmes).
7.2 La cessibilité des droits d’auteur et les licences
L’auteur est la personne physique qui a créé l’oeuvre (art. 6 LDA), soit l’informaticien mandaté par le mandant. Les droits d’auteur sur son propre logiciel lui reviennent. L’auteur dispose alors de deux possibilité pour permettre à une tierce personne d’exercer les droits sur son logiciel :
Il peut céder ses droits, c’est-à-dire prévoir le transfert de la titularité des droits d’auteur au mandant. Il est alors dépourvu de ses droits d’auteur.
Il peut conclure un contrat de licence. Il s’agit du contrat par lequel le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle accorde à son cocontractant, le licencié, une autorisation d’utiliser ce droit selon les modalités du contrat. L’auteur reste cependant titulaire des droits d’auteur.
Que se passe-t-il si le contrat de mandat ne prévoit rien expressément sur la cession des droits d’auteur ? Aucune règle légale ne répond à la question. De plus, ce n’est pas forcément celui qui commande l’oeuvre et qui la paie (le mandant) qui devient titulaire des droits d’auteur. Il convient d’appliquer la « théorie dite de la finalité » qui prévoit qu’en cas de doute sur l’étendue des droits cédés, il faut analyser le but poursuivi par les parties pour en déduire les éventuels droits accordés. Une cession tacite est alors concevable.
Exemple : une entreprise (le mandant) charge un analyste programmeur indépendant (le mandataire), par contrat de mandat, de développer un logiciel spécifique afin que ce dernier puisse traiter ses données. Le contrat est muet concernant le sort des droits d’auteurs relatifs au logiciel :
L’entreprise pourra-t-elle prétendre au droit d’utiliser le logiciel ? Oui, en vertu de la théorie de la finalité, le but du contrat était clairement que l’entreprise puisse utiliser ce logiciel afin de traiter ses données.
L’entreprise pourra-t-elle prétendre au droit de commercialiser le logiciel ? En vertu du but du contrat, l’analyste programmeur est resté titulaire des droits de commercialiser le logiciel car l’entreprise a contracté dans l’unique but d’obtenir un logiciel capable de traiter ses données. Cependant, on peut se demander si cette solution est vraiment légitime au regard de l’injustice qu’elle entraîne (l’analyste programmeur est financé pour développer un logiciel et le commercialise par la suite). Cette question, controversée, devra être réglée spécifiquement.
L’entreprise pourra-t-elle prétendre au droit de faire évoluer le logiciel ? Au vu du but du contrat, il est possible d’avancer que le droit de modifier le logiciel est resté chez son auteur. Cependant, cette question juridique est liée à une question technique. En effet, pour modifier le logiciel commandé, le mandant devra disposer du code source pour modifier le logiciel. Si tel n’est pas le cas et que le contrat ne prévoit rien, le mandant se confronte à une impossibilité matérielle de modifier le logiciel. Un procès en remise du code source pourrait être envisageable mais, au vu des longues procédures qui peuvent prendre des années, le jugement interviendrait trop tard.
L’application de la théorie de la finalité peut se révéler vague en pratique lorsque le but du contrat est vague. Des règles contractuelles claires son préférables. Il est impératif pour la partie qui commande un logiciel de régler les éventuelles questions de commercialisation et de modification du logiciel en prévoyant notamment que le code source devra être remis au mandant en vue d’améliorations futures du logiciel.
8. La problématique des faux indépendants
Le mandant ne paie pas les cotisations d’assurances sociales de son mandataire indépendant. Cependant, la qualification par les parties de leur relation contractuelle a peu d’importance pour définir le statut du mandataire. En effet, il est possible qu’en concluant un contrat de mandat les parties s’accordent à dire que le mandataire est un indépendant mais qu’en réalité, dans les faits, ce ne soit pas le cas (par exemple, le mandataire s’avère être économiquement dépendant du mandant). Il existe un certain nombre de critères indiquant si on se trouve face à une personne indépendante ou au contraire face à une personne dépendante. Si le juge constate après coup que le mandataire s’avère être dépendant, les conséquences financières ne sont pas négligeables. Le mandant court le risque de devoir payer la totalité des cotisations AVS en plus des honoraires déjà payés.
La personne mandatée est indépendante si elle travaille en son propre nom, à son propre compte, qu’elle est indépendante dans son travail et assume elle-même le risque économique. C’est la caisse de compensation qui examine si la personne en question est une personne inépendante ou ne l’est pas et confirme ainsi son statut.
Il est donc préférable, pour un mandat, de s’assurer auprès de la caisse de compensation que le mandataire est bien une personne annoncée pour l’activité demandée en qualité de personne exerçant une activité lucrative indépendante au regard des assurances sociales.
Pour savoir si une personne exerce une activité lucrative à titre indépendant, divers critères permettent de donner des indices en ce sens.
L’activité est exercée au nom de la personne indépendante et pour son propre compte.
La personne indépendante prend en charge le risque économique. En d’autres termes, elle est rémunérée en fonction des résultats effectués et supporte le risque que son créancier ne la paie pas.
La personne indépendante ne reçoit pas de directives de la part d’autrui concernant
notamment son temps de travail, son organisation du travail etc… Elle n’est pas intégrée dans une structure de travail comme le serait un travailleur vis-à-vis de son employeur.
La personne est en général considérée comme indépendante lorsqu’elle engage son propre personnel et/ou dispose de son propre numéro de TVA.
8.3 LES CONSEQUENCES DU STATUT DE FAUX INDEPENDANT
Lorsqu’un mandant conclut un contrat de mandat avec un « faux indépendant » (une personne censée exercer une activité lucrative indépendante mais qui se révèle par la suite être une personne dépendante au vu des critères ci-dessus), les conséquences touchent les assurances sociales suivantes :
AVS / AI / APG / AC : l’employé qui a 18 ans révolus et qui exerce une activité lucrative doit verser des cotisations aux diverses assurances sociales. L’employeur devra procéder à l’annonce de ses employés à la caisse de compensation compétente. Le mandant (qui s’avère être un employeur) devra alors remplir ses obligations envers la caisse de compensation en versant les cotisations du mandataire (qui s’avère être un employé) bien qu’il ait déjà payé le mandataire.
Prévoyance professionnelle : les salariés qui ont plus de 17 ans et qui reçoivent d’un même employeur un salaire annuel supérieur à 21’150 francs doivent être assurés. Tout employeur employant des salariés soumis à l'assurance obligatoire doit être affilié à une institution de prévoyance inscrite dans le registre de la prévoyance professionnelle.
Assurance-accident : le travailleur occupé en Suisse doit être affilié à l’assurance- accident obligatoirement. C’est l’employeur qui doit veiller à ce que les travailleurs qu’il emploie soient assurés.
Il convient de préciser que les dispositions impératives relatives au contrat de travail sont pleinement applicables. Voici les dispositions les plus importantes :
Vacances et jours de congé (art. 329 al. 1 CO, art. 329a al. 1 CO),
Obligation de payer le salaire en cas d’empêchement de l’employé de travailler sans sa faute (maladie, accident, obligation légale) pour un temps limité en fonction de la durée des rapports de travail (art. 324a CO, art. 324b CO).
Résiliation obligatoire du contrat de travail conclu pour une durée indéterminée et respect du délai de congé (art. 335 al. 1 CO). À défaut de convention contraire, le contrat peut être résilié pour la fin d'un mois moyennant un délai de congé d'un mois pendant la première année de service, de deux mois de la deuxième à la neuvième année de service, de trois mois ultérieurement (art. 335c al. 1 CO).
Obligation de délivrer au travailleur un certificat de travail (art. 330a CO).
9. Exemples type de contrat de mandat
Contrat de mandat
(modèle)
Entre les soussignés
X…..[mandataire] , …….à…….
d’une part,
et
Y……[mandant] , …….à……..
d’autre part.
But de la collaboration
Le but de la collaboration entre X et Y, dans le cadre de ce contrat, est de développer un logiciel informatique visant à […], développé sur la base de l’idée de […]. Suite aux négociations entrprises avec Y […], il est convenu de conclure un contrat de mandat. Cette collaboration sera régie par ce qui suit :
Bref descriptif de la situation de départ entre le mandant et le mandataire ainsi que des buts de la collaboration.
Objet du contrat
Le mandataire s’engage à effectuer toutes les tâches précises convenues avec le mandant selon le cahier des charges annexé au présent contrat. Les tâches principales sont les suivantes :
- …
- …
Description des tâches convenues entre le mandant et le mandataire. Si la description est trop fastidieuse au vu de la complexité des tâches, il est possible de les prévoir en termes généraux et d’inclure le cahier des charges en annexe au contrat.
Rémunération
X facture à Y ses honoraires qui sont fixés à CHF […] (brut ou net)
- à l’heure,
- selon un taux d’occupation,
- à la provision,
- selon un forfait.
Le montant des honoraires s’élève cependant à CHF […] (brut ou net) au maximum.
Une attestation sera remise par le mandant à la caisse de compensation AVS compétente considérant le mandataire comme personne exerçant une activité lucrative indépendante au sens de l’AVS. Le mandataire versera lui-même les cotisations d’assurances sociales obligatoires sur le montant des honoraires. Ainsi, le mandant ne versera pas de cotisations d’assurances sociales.
Si le statut d’indépendant n’est pas clair au vu des critères énumérés au chapitre 8.2 :
Les cotisations d’assurances sociales seront déduites du montant des honoraires. La qualification du contrat ne change en rien au vu de cette précision.
Les impenses suivantes, prises en charge dans un premier temps par le mandataire afin
d’exécuter correctement le présent contrat, seront remboursées par le mandant au mandataire :
- …
Délégation
X s’engage expressément à effectuer le travail personnellement selon les règles de l’art et ne recourera en aucun cas à un sous-mandataire ni à un auxiliaire au sens des art. 68 CO et 398 al. 3 CO.
ou
X sera en mesure de déléguer les tâches qui lui sont confiées à un auxiliaire ou à un sous- mandataire et cela, dans l’intérêt du mandant au sens des art. 68 CO et 398 al. 3 CO.
Cette question dépend des qualifications du mandataire. Si le mandant désire que le mandataire effectue personnellement le travail confié, il faudra le préciser pour mettre les choses au clair.
Obligations du mandant et du mandataire
Les parties se réfères aux art. 394ss CO pour ce qui est de la réglementation relative aux obligations du mandant et du mandataire [sous réserve de la question du remboursement des impenses prévue à l’art. 402 al. 1 CO qui est expressément réglée dans le présent contrat sous le titre « rémunération »].
Il convient de préciser que le mandant doit, en vertu de l’art. 402 al. 1 CO, rembourser les impenses au mandataire. Si dans la clause du contrat relative à la rémunération, le paiement des frais a été explicitement réglé (par ex. le mandant ne rembourse qu’une partie des frais encourus), il conviendra de le préciser ici.
Il est possible d’être plus précis et de convenir expressément les obligations du mandataire. En voici quelques exemples :
- Le mandataire s’engage à effectuer le présent contrat avec tout le soin et la diligence requise par les règles de l’art.
- Il s’engage à respecter son obligation de fidélité et à garder le secret sur les informations confidentielles reçue dans le cadre de sa mission relatives du mandant.
- Il s’engage à rendre compte de sa gestion à l’expiration du contrat, et à informer périodiquement son mandant [à sa demande] sur l’état d’avancement du contrat.
- À l’échéance du mandat, il restitue les pièces et documents en sa possession appartenant au mandant et reçus dans le cadre de l’exécution de son mandat. Il s’engage à ne conserver aucun dossier, fichier d’adresses et autres documents qui appartiennent au mandant, ou effectués par le mandataire pour le compte du mandant.
Responsabilité [en cas de délégation à un auxiliaire]
En cas de délégation du travail à un auxiliaire, le mandataire se décharge au sens de l’art. 101 al. 2 CO de la responsabilité de l’auxiliaire.
ou
Le mandataire est responsable du dommage causé dans l’accomplissement du travail effectué par son auxiliaire conformément à l’article 101 CO.
D roit d’auteur relatif au logiciel
Le mandataire est l’auteur de l’oeuvre commandée et reste ainsi titulaire des droits d’auteur. Il est cependant tenu de céder au mandant un droit de licence et d’exploitation dans la mesure du nécessaire contre rémunération / à titre gratuit. Le mandant sera alors autorisé à commercialiser / à modifier l’oeuvre et se voit alors remettre le code source du logiciel.
Début et fin du contrat
Le mandat commence le … [date] et est conclu pour une durée déterminée / pour la durée nécessaire à la réalisation de l’objet du contrat.
Le mandat prend fin le … [date] / dès que la mission a été réalisée / à l’échéance de la date prévue.
Résiliation
L’accord peut être dénoncé par l’une ou l’autre des parties en tout temps, sous réserve de la responsabilité encourue par une résiliation en temps inopportun de l’art. 404 CO.
Droit applicable
Le présent contrat est soumis au droit suisse. Les dispositions des art. 394ss CO sont pour le surplus applicables, dans la mesure où les parties n’y ont pas dérogé expressément.
En matière de for, tout litige subséquent portant sur l’interprétation ou l’exécution du contrat sera soumis aux tribunaux ordinaires du canton de […].
Le présent accord entre en vigueur dès le …...
Ainsi fait à …….., le ……..
X. Y.
(signature) (signature)
Table des matières
2. La conclusion du contrat de mandat 3
2.1 La forme du contrat de mandat 3
2.2 La gratuité du contrat de mandat 3
3. Les obligations du mandataire 4
3.1 L’obligation de rendre service 4
3.2 L’obligation de diligence 5
3.3 L’obligation de fidélité 5
3.4 L’obligation de rendre compte et de restitution 5
4. La responsabilité du mandataire 5
4.1 La responsabilité personnelle 5
4.2 La responsabilité pour les tiers 6
4.3 La limitation de la responsabilité 7
4.4 Le délai de prescription 7
5. Les obligations du mandant 7
6. La fin du contrat de mandat 7
7.1 Les généralités du droit d’auteur en matière de logiciel 8
7.2 La cessibilité des droits d’auteur et les licences 8
8. La problématique des faux indépendants 9