RAPPORT ECOPLA FRANCE
Xxxxxx PERO ARMETTA
____________________________
Avocat à la Cour
À l’attention du Secrétaire du Comité d’entreprise de la Société ECOPLA France
Représenté par Monsieur XXXXX. Lyon, le 3 novembre 2014
RAPPORT ECOPLA FRANCE
Monsieur,
Le présent rapport a été établi à la demande de l’Union régionale des SCOP (« URSCOP »), sur mandat d’un collectif de salariés de la société Ecopla France (la « Société »), afin d’étudier la faisabilité d’une reprise de la Société par ses salariés.
Le présent rapport a pour objet d’analyser dans ce cadre, les implications légales de certaines opérations relatives à la Société Ecopla France dont les opérations de trésorerie intra-groupe.
Comme convenu, j’ai examiné les documents suivants relatifs à la société ECOPLA France, communiqués au comité d’entreprise de la Société sur le fondement de l’article L 2325-35 du Code du travail :
- Multi Currency Pooling (MCP) – Master Agreement conclu en février 2010 entre les sociétés du groupe (« Convention de cash pooling »),
- Contrat d’affacturage conclu avec Fortis en date du 10 février 2011 conclu entre Ecopla France SAS et Fortis Commercial Finance SAS.
- Rapport du commissaire aux comptes (KPMG) sur les comptes clos le 31/03/2012
- Rapport du commissaire aux comptes (KPMG) sur les comptes clos le 31/03/2013
- Rapport du commissaire aux comptes (KPMG) sur les comptes clos le 31/03/2014
- Rapport de gestion à l’assemblée générale ordinaire approuvant les comptes clos le 31/03/2013
- Procès-verbal de décisions des associés du 28/09/2012
- Procès-verbal de décisions des associés du 30/09/2013
- Procès-verbal de décisions des associés du 30/09/2014
- Rapport de gestion à l’assemblée générale ordinaire approuvant les comptes clos le 31/03/2014
- Procès-verbal de délibération du comité de direction du 31 juillet 2013
- Statuts de la Société en date du 30 septembre 2013
- Contrat de prêt conclu entre Ecopla France et NFP le 11 février 2011.
- le rapport rendu par Monsieur Xxxxxx Xxxxxxx, Expert Consulting (le « Rapport d’expertise »), à la demande des salariés de la en février 2014,
xxxxxx.xxxxxxxxxxx@xxxxxx-xxxxxxx.xx 000 xxx Xxxxxx - 00000 XXXX
Tel fixe : 00 00 00 00 00 – Téléphone mobile : 00 00 00 00 00
SIREN/SIRET 432 144 285 00074 - TVA FR 28 432 144 285
Membre d'une association de gestion agréée, le règlement par chèque est accepté
Mes travaux se sont appuyés sur la seule analyse des informations mises à ma disposition, sans que soit remise en question l’exactitude de ces informations. Mes travaux ont consisté à donner une information générale dans les différents domaines analysés..
L’intervention est effectuée pour le seul usage de ceux à qui elle est fournie à savoir l’URSCOP et le représentant du collectif de salariés de la Société dans le cadre du processus de reprise. Il convient de rappeler que l’utilisation des documents auxquels elle donne lieu (notamment mon rapport, les documents établis ou communiqués par vos soins, les correspondances…), dans un contexte différent, pourrait ne pas être appropriée. Je décline toute responsabilité vis-à-vis de tiers auxquels les documents produits lors de mon intervention auraient été communiqués ou transmis ou entre les mains desquels ils parviendraient.
À titre préliminaire, je rappelle qu’à la date du présent rapport nous n’avons pas pu obtenir communication de toutes les informations et documents que nous avions demandés à la Société.
I CONTEXTE JURIDIQUE ET FAITS
§ 1 ANALYSE DES DOCUMENTS JURIDIQUES RELATIFS AUX FAITS SIGNIFICATIFS
Les clauses caractéristiques des contrats figurent ci-après, tandis que l’analyse de la légalité des opérations figure au paragraphe II.
1.1 LA CONVENTION DE CASH POOLING DU 12 FÉVRIER 2010
Les caractéristiques principales de la convention « Multi Currency Pooling (MCP) – Master Agreement » (« Convention de Cash pooling ») conclue en février 2010 entre les sociétés du Groupe et la Banque Barclays PLC sont les suivantes :
Les sociétés participant (les « Participants ») à la convention sont toutes les sociétés filles de Pakco Ltd indiquées sur l’organigramme du Groupe à l’exception de la société Ecopla Benelux SPRL. Elles sont représentées dans le cadre de la convention par la société Xxxxxxx Food Packaging Limited (NFP).
Objet de la convention :
- La Banque octroie un prêt aux Participants, qui semble être de type découvert bancaire (« Facility agreement »). Aux fins de calcul des intérêts liés à ce prêt, la Banque déduira de l’endettement global des Participants le solde créditeur des Comptes des Participants.
- Chaque Participant autorise la banque à imputer toute somme due au titre de l’Endettement global sur le solde créditeur du compte de tout Participant, sans avoir à en demander le paiement.
Il nous est indiqué par Monsieur Xxxxxxx que le taux d’intérêt est le même que celui stipulé dans le prêt conclu entre Ecopla France et NFP, soit 2,5%. J’ignore de quel document juridique ce taux d’intérêt résulte. Sauf erreur, je pense qu’il y a une confusion entre le prêt consenti à NFP et le Facility agreement visé par la Banque Fortis.
Il conviendrait d’obtenir confirmation écrite du taux d’intérêt, cette information étant déterminante dans l’appréciation de la légalité de l’opération.
La convention ne comporte aucune indication chiffrée. L’examen de la convention ne permet pas de préciser la part supportée par chaque société du Groupe.
En vertu de la convention, la Banque peut refuser qu’un Participant procède à un prélèvement sur son propre compte, si de ce fait l’endettement global devenait supérieur à une limite donnée (« Net Limit ») stipulée dans le contrat de prêt.
J’attire votre attention sur la présence d’une clause de suspension du contrat et d’exigibilité anticipée
déclenchée par la survenance d’une procédure collective à l’encontre d’un des Participants ou de la nomination d’un administrateur (équivalent à l’administrateur judiciaire ou l’administrateur ad hoc en France). La suspension de la convention permet à la Banque de saisir le solde créditeur des comptes des Participants.
Si au moment de la résiliation de la convention de cash pooling, la Banque n’a pas encore effectué le virement des sommes dues (afin de mettre en œuvre son droit de prélèvement), la Banque peut effectuer ce prélèvement (article 2.2).
La convention de cash pooling stipule qu’un participant peut demander son retrait de la convention. Cependant ce retrait :
- ne prend effet qu’après complet paiement des sommes dues à la Banque,
- ne prend pas effet en cas de cas de suspension ou de résiliation anticipée (hypothèse d’ouverture d’une procédure collective).
La convention est soumise au droit anglais et relève de la compétence des juridictions anglaises. En France, la stipulation de l’exigibilité anticipée d’un contrat du fait de l’ouverture d’une procédure collective serait nulle et réputée non écrite.
La convention stipule que chaque Participant est garant solidaire du remboursement de l’endettement global (« MCP Liabilities ») (article 11.1), puis de façon assez contradictoire, que la somme recouvrable auprès de chaque Participant est plafonnée à hauteur de la plus basse des deux sommes suivantes (article 11.2) : soit une somme égale au Montant total de l’endettement, soit une somme égale au solde créditeur total du Participant donné (converti en devise).
La convention est à durée indéterminée.
QUEL SERAIT L’EFFET DE L’OUVERTURE D’UNE PROCÉDURE COLLECTIVE D’ECOPLA FRANCE AU REGARD DE LA CONVENTION DE CASH POOLING ?
La convention stipule une suspension du Contrat et l’exigibilité anticipée des sommes dues. J’ignore si cette clause est valable en droit anglais (droit applicable au contrat).
Si le droit français s’appliquait, la suspension du contrat et son exigibilité anticipée se heurteraient au principe français d'arrêt des poursuites individuelles ; à savoir l'ouverture d'une procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire) empêche toute action en justice contre le débiteur pour obtenir le paiement d'une somme d'argent, ainsi que toute mesure d'exécution (saisie) sur ses biens. Le principe d'arrêt des poursuites individuelles est un principe d'ordre public international. Les délais impartis à peine de déchéance et de résolution des droits sont suspendus.
Cependant, ce principe serait tempéré par :
- le droit des banques de mettre fin à leur concours bancaire si elles parviennent à démontrer que le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise ;
- Le droit d’invoquer la compensation entre les créances et les dettes existant sur un même compte ou entre des créances connexes ; en l’espèce, les créances sont connexes.
En cas de liquidation judiciaire, le principe d'arrêt des poursuites individuelles s'inverserait : il y aurait une déchéance du terme du contrat (c’est-à-dire exigibilité anticipée). En cas de plan de cession, il y aurait un report du terme.
APPLICATION INTERNATIONALE
Concernant Ecopla France, la difficulté tient au fait que le compte bancaire objet de la convention de cash pooling dont il s’agit se trouve en Angleterre.
En principe, le redressement judiciaire prononcé en France produit ses effets partout où le débiteur a ses biens (principe d’universalité de la faillite). Ce principe suppose l’acceptation par l’ordre juridique étranger des effets de la procédure collective.
Il conviendra de prendre en compte les règles applicables au Royaume Uni en cas de procédure collective, combinées au règlement (CE) n° 1346/2000 du 29 mai 2000 sur les procédures d'insolvabilité, lequel établit un cadre commun pour les procédures d'insolvabilité au sein de l'Union européenne.
Cependant, ce règlement n'est pas applicable dans tout État membre, dans la mesure où il serait incompatible avec les obligations de faillite résultant d'une convention adoptée antérieurement à son entrée en vigueur par cet État avec un ou plusieurs pays tiers, et particulièrement au Royaume-Uni, dans la mesure où il y aurait une incompatibilité avec des accords conclus précédemment dans le cadre du Commonwealth.
Ses règles reposent en effet sur le principe de l'universalité de la procédure, tout en conservant la possibilité d'ouvrir des procédures secondaires limitées au territoire de l'État membre concerné
En vertu du règlement CE, l'ouverture de la procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit réel d'un créancier ou d'un tiers sur des biens corporels ou incorporels, meubles ou immeubles appartenant au débiteur, et qui se trouvent, au moment de l'ouverture de la procédure sur le territoire d'un autre État membre (art. 5). De même l'ouverture de la procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit d'un créancier d'invoquer la compensation de sa créance avec la créance du débiteur, lorsque cette compensation est permise par la loi applicable à la créance du débiteur insolvable.
Lorsque le centre des intérêts principaux du débiteur est situé sur le territoire d'un État membre, les juridictions d'un autre État membre ne sont compétentes pour ouvrir une procédure d'insolvabilité à l'égard de ce débiteur que si celui-ci possède un établissement sur le territoire de cet autre État membre.
Le règlement CE n’ayant pas traité la question des difficultés des groupes de sociétés, afin de regrouper des procédures distinctes, la jurisprudence de divers pays européens dont la France s’est appuyée sur le critère du centre des intérêts principaux du débiteur, en considérant qu’une filiale a son centre véritable de décision au siège de la société mère ; ainsi la Cour de cassation a reconnu la validité d’une procédure collective ouverte à l’étranger (en Angleterre) contre une filiale française de la société anglaise (Cass. Com. 27 juin 2006).
Par ailleurs, des juridictions françaises ont considéré que la maison mère d’un groupe peut être le centre des intérêts principaux de ses filiales étrangères, les conduisant par renversement de la présomption, à ouvrir une procédure collective soumise au droit français à l’encontre de l’ensemble des sociétés du groupe.
L'ordonnance du 12 mars 2014, portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, a apporté certaines précisions concernant les aspects procéduraux des procédures collectives concernant les groupes de sociétés :
Lorsque plusieurs tribunaux sont saisis de procédures concernant des sociétés contrôlées par la même société ou contrôlant les mêmes sociétés au sens de l'article L 233-3 du code de commerce, un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire commun à l'ensemble des procédures peuvent être désignés (article L 662-8 du code de commerce). Il peut leur être confié une mission de coordination selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État.
1.2 LES MANAGEMENT FEES
Des management fees ont été versés en l’absence de convention écrite. Ce versement constitue un contrat (même s’il n’est pas constaté par écrit) formé entre la Société Ecopla France et ces deux sociétés.
Il ressort du rapport d’expertise de Monsieur Xxxxxxx que les management fees versés en 2012, par la Société à la société Marcell (132 k£) et à la société NFP en 2013 représentaient 0,72% du chiffre d’affaires de la Société.
Le Commissaire aux comptes ne fait pas état du versement des management fees dans les rapports généraux relatifs aux exercices 2014 et 2013. Nous attendons communication du rapport spécial pour
savoir s’il en fait état.
En 2013/2014, d’après Monsieur Xxxxxxx, le montant des management fees serait forfaitaire et ne dépendrait plus de dépenses réelles.
1.3 LES PRÊTS CONSENTIS PAR ECOPLA FRANCE AUX SOCIÉTÉS NFP ET MARCELL
Le contrat n’appelle pas de remarque particulière, mis à part la nullité de l’article 4.4 (exigibilité anticipé en cas de procédure collective, cette stipulation étant réputée non écrite).
Le prêt doit être remboursé intégralement le 31 mars 2019. Taux : 2,5%
Le contrat de prêt est soumis au droit français.
1.4 CONTRAT D’AFFACTURAGE CONCLU LE 10 FÉVRIER 2011 ENTRE ECOPLA FRANCE SAS ET FORTIS COMMERCIAL FINANCE SAS.
L’article 2 du contrat exclut de son champ d’application les créances sur des entreprises ayant des associés ou des dirigeants de droit ou de fait communs avec le client ou des liens capitalistiques avec lui.
Les conditions particulières du contrat stipulent en préambule (2e alinéa) que le contrat a été conclu en considération de la signature de conventions analogues entre les sociétés du groupe Fortis et les Sociétés NFP, Pack Co Ltd (UK), Marcell Acquisition Co Ltd, Ecko Group Ltd (UK), Ecopla Benelux SPRL (Belgique) et Bachmann Aluminium GMbH (Allemagne). En conséquence, certains paramètres ont été définis à la fois au niveau de chaque entité et au niveau du groupe Xxxxxxx ; il est bien entendu qu’en cas d’insuffisance d’une valeur au niveau des sociétés, le complément ne serait prélevé qu’en cas d’insuffisance constatée sur chacune d’elle.
Le contrat comporte une clause permettant à Fortis de résilier le contrat sans préavis en cas de modification substantielle de la situation juridique ou commerciale du Client, changement de dirigeant, dégradation significative de sa situation financière (article 12).
Nous ignorons si un avenant de ce contrat d’affacturage a été conclu depuis 2011.
Le contrat de prêt est soumis au droit français.
§ 2 LES FAITS RELEVÉS PAR LE RAPPORT D’EXPERTISE
Les faits significatifs énumérés ci-après ressortent du Rapport d’expertise :
1.1 LA SOCIÉTÉ ECOPLA FRANCE APPARTIENT À UN GROUPE DE SOCIÉTÉS
Le terme « Groupe » dans ce contexte désigne le groupe de sociétés comprenant la société Bawtry Investments Ltd et ses filiales, figurant sur le schéma ci-dessous, suite au rachat du Groupe PackCo Ltd en avril 2012 par le Groupe Bawtry Investments Ltd. Il semble que les 5 sociétés « situées entre » ECOPLA France et Pakco Ltd, soient toutes détenues à 100% par leur associé et n’ont pas d’activité industrielle et commerciale.
BAWTRY INVESTMENT | |||||||||||
PAKCO Ltd | BAWTRY CARBON | ||||||||||
MARCELL ACQ Ltd | |||||||||||
XXXXXXX FOOD PACKAGING | |||||||||||
EKCO GROUP | |||||||||||
XXXXXX & XXXXXX | |||||||||||
BACHMANN GMBH | ECOPLA HOLDINGS SAS | ||||||||||
ECOPLA France SAS | ECOPLA BENELUX SPRL |
1.2 UNE GESTION D’ECOPLA FRANCE, AU DÉTRIMENT DE SES INTÉRÊTS PROPRES
En synthèse, la conclusion suivante ressort du Rapport d’expertise :
Les résultats de la Société sont en perte depuis l’exercice 2011/2012, malgré un chiffre d’affaires relativement stable.
Le Rapport d’expertise attribue les difficultés de la Société aux charges qui pèsent sur la Société en raison de son appartenance au Groupe.
La gestion de la Société se fait au détriment de ses intérêts propres, dans l’intérêt du Groupe, sans que la Société en tire une contrepartie substantielle.
Cette forme de gestion met la Société en difficulté ; de ce fait, la Société pourrait connaître des risques de cessation des paiements à court terme.
Les faits suivants ont été relevés par le Rapport d’expertise et démontrent une gestion de la Société dans l’intérêt du Groupe au détriment d’Ecopla France. Trois opérations en particulier retiennent notre attention :
- la conclusion d’une convention de cash pooling dont les effets sont défavorables à Ecopla France ;
- le paiement de management fees dans des conditions peu transparentes : La Société verse des management fees à d’autres sociétés du groupe depuis 2007, sans que cela fasse l’objet d’une convention écrite ou autres formalités.
- l’octroi de deux prêts à ses sociétés mères par Ecopla France : un prêt à NFP dont le montant avec les intérêts cumulés s'élevait à 878 k€ en octobre 2013, et un prêt à Marcell, intérêts inclus, de 2 095 k€ à la même date.
Ces prêts ont été consentis en 2011 à un taux révisable annuel de 2,5%, remboursables en 2019 ; il semble que le remboursement du prêt soit subordonné au redressement du Groupe.
D’autres part, ils nous été indiqué que :
- Les investissements effectués par la Société sont faibles voire inadaptés (rachat du matériel de la société Xxxxxxx) et ne correspondent pas au niveau moyen d’investissement des autres sociétés du Groupe ;
- Vente à perte : certains produits ont été vendus par la Société à marge nulle ou négative. Ces ventes bénéficiaient principalement à la société Bachmann, société sœur située en Allemagne.
- Revente de matière premières à une société sœur : la Société a fait l’avance du prix d’achat de métal pour sa société sœur (Xxxxxxx) et lui a revendu le métal ensuite (pour 517 k€). La direction de la Société a indiqué à Monsieur Xxxxxxx que la revente avait eu lieu au même prix. Il n’a pas été possible d’effectuer une vérification de cette information. Par ailleurs, cette revente n’a pas fait l’objet d’une convention écrite.
- La pratique des ristournes semble peu transparente et n’a pas pu être examinée de façon approfondie, en raison du manque d’informations communiquées et de l’absence d’informations analytiques. Notamment, l’identification des bénéficiaires de ces ristournes fait défaut.
1.3 CONSÉQUENCES PRÉJUDICIABLES POUR LA SOCIÉTÉ
Le Rapport d’expertise considère que cette gestion de la trésorerie favorable au Groupe porte préjudice à la Société. À titre d’exemple, citons :
- Contrat d’affacturage : Depuis 2011, la Société, faute de trésorerie disponible pour acquérir ses matières premières s’est vue contrainte de faire financer ses créances clients par voie d’affacturage (contrat conclu avec Fortis) ;
- Hausse des coûts de la main d’œuvre directe de production, certainement liée à des problèmes organisationnels dans la production ou des difficultés d’approvisionnement liées à des questions de trésorerie non disponible (embauche d’intérimaires).
- Augmentation forte des dettes fournisseurs,
La Société vend sa production à des tiers et aux sociétés du Groupe. Il semble que les débouchés commerciaux offerts par le Groupe ne soient pas significatifs par rapport aux ventes hors groupe.
Il conviendrait de chiffrer la différence entre les avantages/coût de l’appartenance de la Société au Groupe.
Cette gestion contribue à déstabiliser la Société. Le Rapport d’expertise indique que faute d’équilibre entre les besoins en financement court (stocks, clients) et les ressources, la société pourrait connaître une rupture de ses paiements, et donc, courir des risques de dépôt de bilan.
II RISQUES JURIDIQUES
Nous envisagerons les risques juridiques que comportent les opérations décrites au paragraphe I, au regard des infractions ou règles de droit les plus significatives, sans que le présent rapport prétende à l’exhaustivité, compte tenu du temps imparti pour la rédaction du présent rapport et des informations communiquées.
§ 1 Abus de biens sociaux, Abus du crédit de la société
Nous rechercherons si l’une des opérations décrites au paragraphe I est susceptible d’être qualifiée d’abus de biens sociaux ou d’abus du crédit de la Société.
L’article 242-6 3 du code de commerce, applicable aux sociétés par actions simplifiées par renvoi d’article, définit l’abus de biens sociaux comme le fait pour le président, les administrateurs ou les directeurs généraux de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement.
1.1 LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS DE L’INFRACTION SONT LES SUIVANTS :
- l’auteur doit avoir la qualité de dirigeant (de droit ou de fait) au moment des faits ; l'abus de biens sociaux peut être reproché non seulement à des personnes physiques mais aussi à des personnes morales. Il peut être démontré que l’associé majoritaire s’est comporté en qualité de dirigeant de fait.
- usage abusif des biens, des crédits ou des voix de la société :
- La notion de « biens » regroupe tous les biens qui sont dans le patrimoine de la société, qu’ils soient ou non valorisés à l'actif du bilan ;
Abus du crédit de la société : les dirigeants de société appartenant à un groupe sont passibles de sanctions pénales s’ils utilisent le crédit ou les biens de l’une des sociétés du groupe pour en favoriser une autre.
- l’abus étant caractérisé par le risque anormal qu’il fait courir à la société ;
- au mépris de l’intérêt social : la contrariété à l'intérêt de la société tient au caractère désavantageux de l'acte pour la société qui le supporte.
- et dans l’intérêt personnel direct ou indirect des dirigeants ; la jurisprudence condamne celui qui appauvrit une société dont il est actionnaire ou dirigeant au profit d’une autre société dans laquelle il dispose également d’intérêts ;
Le but d'intérêt personnel est caractérisé par le fait que le dirigeant de la filiale agit dans l'intérêt de la société contrôlante qui est elle-même une société qu'il contrôle. Par l'intermédiaire de celle-ci c'est son intérêt personnel qu'il poursuit.
- l’élément moral : la mauvaise foi des dirigeants.
Exonération : Seul l’acte accompli dans l’intérêt du groupe permet d’écarter la qualification d’abus de biens sociaux, sous réserve :
- qu’il s’agisse d'un groupement économique fortement structuré ne reposant pas sur des bases artificielles ;
- que les sacrifices demandés à l'une des sociétés aient bien été réalisés dans l'intérêt du groupe et aient une contrepartie ;
- ces sacrifices ne fassent pas courir à la société concernée des risques trop importants pouvant grever son avenir. Pour que la responsabilité des dirigeants de fait soit écartée, il faudrait par exemple que les sacrifices réalisés n'exposent pas la société à des risques trop importants et qu’ils fassent l’objet d’une contrepartie suffisante et proportionnée (Cass. crim. – 24 juin 1991 et 4 sept. 1996).
1.2 LES PARTICULARITÉS RELATIVES À L’ABUS DE BIENS SOCIAUX EN MATIÈRE DE MANAGEMENT FEES SONT LES SUIVANTES :
La pratique des contrats de gestion en vertu desquels une société mère s'engage à fournir à ses filiales diverses prestations de caractère administratif moyennant des redevances est courante.
La rémunération de ces contrats ne doit pas être disproportionnée par rapport au coût des prestations fournies et elle ne doit pas aboutir en fait à un transfert des bénéfices des filiales à la société mère. Cette disproportion, si elle existait, pourrait, dans le cas fréquent en pratique où les sociétés ont des dirigeants communs, entraîner l'application à ces dirigeants des sanctions pénales prévues en cas d'abus des biens et du crédit de la société.
Il a été jugé que, pour échapper à cette qualification, « la convention doit être dictée par un intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d'une politique élaborée pour l'ensemble du groupe ou à tout le moins en commun, et donner lieu à la conclusion d'engagements équilibrés, le cas échéant révisables et adaptables aux circonstances ». Ces engagements doivent être établis en tenant compte, d'une part, « de la réalité et de l'efficacité des prestations fournies (...) et, d'autre part, en ce qui concerne le prix fourni en retour, des liens historiques et de solidarité unissant les sociétés et des possibilités financières de celle qui en supporte la charge » (CA Paris 29-5-1986).
Chez Ecopla France
Il conviendrait d’établir leur caractère disproportionné des management fees versés par Ecopla, par rapport aux prestations rendues pour établir l’usage abusif des biens de la Société.
Les management fees versés en 2012 par la Société représentaient une part de 0,72% du chiffre d’affaires de la Société. La jurisprudence avait considéré dans une affaire que des fees représentant 1/1000e du chiffre d’affaires n’étaient pas disproportionnés.
En l’absence d’écrit, nous ignorons quelles sont exactement les prestations rendues.
Il conviendrait de démontrer, en obtenant plus d’informations de faits, que les prestations réellement rendues sont disproportionnées aux fees pour établir la contrariété à l’intérêt social.
Un tribunal pourrait considérer que le montant des prestations n’a pas été établi en tenant compte de la réalité des prestations fournies mais en fonction d’un forfait.
La qualité de l’auteur et l’intérêt personnel de l’auteur ne pose pas de difficulté dans ce contexte.
À mon sens, il me semble que nous manquons d’éléments d’information pour apprécier si le versement des management fees par Ecopla France peut être considéré par un juge comme constituant le délit d’abus de biens sociaux ; cela semble possible si le caractère disproportionné des management fees est établi.
1.3 LES PARTICULARITÉS RELATIVES À L’ABUS DE BIENS SOCIAUX EN MATIÈRE DE CONVENTION DE TRÉSORERIE SONT LES SUIVANTES :
Les avances de trésorerie consenties par une société à une autre société du même groupe ne constituent pas un abus de biens sociaux lorsque les conditions suivantes sont réunies
a. Les deux sociétés doivent appartenir au même groupe, ce qui suppose l'existence de liens structurels entre les sociétés membres du groupe et la mise en œuvre d'une stratégie commune en vue de la réalisation d'un objectif commun.
Cette condition n'est pas remplie :
- lorsque le prétendu groupe résulte de sociétés fermées dont les liens financiers dépendent du seul pouvoir des dirigeants qui ont choisi, selon des critères personnels, l'orientation économique d'entreprises juridiquement indépendantes dont ils sont les principaux actionnaires et dont ils ont le contrôle absolu ;
- lorsque les sociétés en cause ne sont liées entre elles que par des « jeux d'écriture » et qu'il n'existe aucune politique décidée en conseil d'administration ou en assemblée générale, les opérations financières critiquées étant dissimulées dans la comptabilité par des artifices sous le couvert de contrats commerciaux fictifs (Cass. crim. 23-4-1991).
b. L'opération doit être dictée par un intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d'une politique élaborée pour l'ensemble du groupe.
c. Le concours financier ne doit pas être dépourvu de contrepartie ou rompre l'équilibre entre les engagements respectifs des diverses sociétés concernées, ni excéder les possibilités financières de celle qui en supporte la charge.
Il a même été jugé qu'une « surfacturation » faite par une société au profit de sa filiale n'était pas constitutive d'abus de biens sociaux, dès lors que cette aide n'avait pas compromis la situation financière de la société mère et qu'elle constituait une opération « normale » entre mère et filiale, excluant toute intention frauduleuse du dirigeant qui n'en avait retiré aucun profit personnel (Cass. crim. 20-10-1986).
A été condamné pour abus de biens sociaux le président de deux sociétés mère et filiale en raison d'avances de trésorerie consenties par la première à la seconde, dès lors que la société mère, soumise par la suite à une procédure de redressement judiciaire, avait accordé sans contrepartie une aide financière dépassant ses possibilités et donc contraire à son intérêt (Cass. crim. 18-1-1993).
Ces conditions s'appliquent également aux mandats de service conclus entre deux sociétés d'un même groupe ayant des administrateurs communs. Xxxx qu'avait commis un abus de biens sociaux le dirigeant d'une société faîtière d'un groupe qui avait fait verser pendant quatre ans par deux sociétés membres du groupe des redevances en exécution de conventions de prestation de services sans que la réalité de ces prestations soit établie de manière convaincante, peu important que l'exécution des conventions litigieuses ait entraîné un développement incontestable du groupe (Cass. crim. 25-10-2006).
Pour entrer en condamnation, ce qui est fréquemment le cas, les tribunaux sont particulièrement sensibles à la rémunération et au caractère excessif du prélèvement (la société prêteuse n'a plus la possibilité de disposer de sa trésorerie).
En application de la jurisprudence Xxxxxxxx-Xxxxxxxx (Cass. Crim, 10 juillet 1995), dans un contexte post acquisition: les prélèvements de trésorerie sur la cible ne doivent pas empêcher la cible de réaliser les investissements qui auraient été nécessaires.
Difficultés : En droit français, il n’y a pas d’obligation d’offrir aux sociétés participantes des conditions financières spécifiques dans le cadre des opérations relevant de la gestion centralisée de trésorerie. En tout état de cause, les ressources étant fongibles, il est difficile d’assurer la traçabilité de leur emploi afin de s’assurer que les opérations sont réalisées aux conditions de marché.
On observera que le respect de la procédure d'approbation des conventions réglementées ne suffit pas, à lui seul, pour écarter toute atteinte à l'intérêt social.
Chez Ecopla France
Appréciation de la contrepartie : Il convient que nous connaissions avec certitude le taux d’intérêt pratiqué dans la convention de cash pooling. Un tribunal chercherait si le taux de 2,5% invoqué correspond à la pratique de marché dans des circonstances identiques. Il conviendrait de comparer cette rémunération à celle qu’aurait pu obtenir Ecopla France en plaçant sa trésorerie pour une durée équivalente.
Pour mémoire, à titre de comparaison, au cours du dernier trimestre, le taux limite de déduction des intérêts servis aux comptes courants d'associés s’élevait à 2,87%.
Le caractère excessif du prélèvement est avéré chez Ecopla France : Le commissaire aux comptes indique dans son rapport sur les comptes de l’exercice clos le 31/03/2013, « les disponibilités peuvent être utilisées en compensation de soldes débiteurs d’autres sociétés du groupe à la seule initiative de la Banque. Au 31/03/2013, la quasi-totalité des disponibilités étaient bloquée en compensation de
découverts bancaires d’autres sociétés du groupe et n’étaient donc pas disponibles pour Ecopla France. »
D’après le Rapport du commissaire aux comptes sur les comptes clos le 31/03/2014, en réponse à la mention exprimant l’incertitude du commissaire aux comptes sur la continuité de l’exploitation, la Société pensait pouvoir continuer son exploitation sous réserve qu’il lui soit permis d’utiliser une partie de sa trésorerie bloquée en application de la Convention de cash pooling. La direction reconnaissait ainsi que la poursuite de la convention de cash pooling était préjudiciable à la Société.
Du fait du caractère excessif du prélèvement pour Ecopla France et en cas de démonstration de l’absence de contrepartie suffisante à la convention de cash pooling, il me semble qu’un juge pourrait considérer que le délit d’abus des biens et du crédit de la société est constitué.
L’auteur de l’infraction serait le dirigeant de droit ou de fait d’Ecopla France au moment de la signature de la convention de cash pooling.
1.3 REMARQUES GÉNÉRALES
Prescription : l’action publique se prescrit par 3 ans à compter du jour d’apparition des faits dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique.
L’abus de biens sociaux est, par nature, une infraction instantanée qui est constituée à chaque usage abusif.
Poursuite de l’infraction
La société peut agir en réparation du préjudice subi du fait de la commission de cette infraction à l’encontre des dirigeants.
Les dirigeants de droit ou de fait de la Société pourraient être poursuivis suite :
- à l’action de la victime de l’infraction, i.e., la société ou les associés ayant subi un préjudice propre ; la société peut obliger le ministère public à mettre en œuvre l’action publique même si ce dernier n’a pas jugé opportun d’exercer des poursuites. Elle se constitue alors partie civile par voie d’action (citation directe ou plainte avec constitution de partie civile).
- à l’action publique du Procureur, informé par les services de police, par un tiers – salarié ou concurrent – ou par la victime elle-même, suite à une plainte ou une dénonciation reçue en application de l’article 40-1 du Code de procédure pénale.
Toutefois, le Procureur est libre de mettre en œuvre l’action publique, en l’absence d’exercice de l’action civile par voie d’action. À ce titre, il a été jugé que les salariés ne peuvent se constituer partie civile du chef d’abus de biens sociaux.
Sanction : cinq ans d’emprisonnement et amende de 375 000 euros pour un personne physique et de 1 875 000 euros pour une personne morale.
À noter que l'infraction d’abus de biens ou du crédit de la société est punie de sept ans d'emprisonnement et de 500 000 € d'amende lorsqu'elle a été réalisée ou facilitée au moyen soit de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d'organismes établis à l'étranger, soit de l'interposition de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable établis à l'étranger.
Après la cessation des paiements, les mêmes faits seraient constitutifs du délit de banqueroute (les deux infractions sont exclusives l’une de l’autre).
Une condamnation pour abus de bien sociaux (et la réparation civile des dommages qui en découlent) n’est pas exclusive de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif (la société mère considérée comme un dirigeant de fait peut donc être condamnée du chef des deux textes).
§ 2 Risque en cas de procédure collective
Ouverture d’une procédure collective : À titre préliminaire, je vous confirme que les salariés d’une entreprise ou son comité d’entreprise n’ont pas le pouvoir de demander l’ouverture d’une procédure collective. Seuls le débiteur, un créancier ou le ministère public peuvent le demander. En revanche, en application de l’article L 631-6 du code de commerce : Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel peuvent communiquer au président du tribunal ou au ministère public tout fait révélant la cessation des paiements du débiteur.
L’existence d’un groupe permet de circonscrire les répercussions des difficultés de l'une de ses activités. Mais à partir de la procédure ouverte contre une société, il peut y avoir extension, si certaines conditions sont réunies.
En particulier, une centralisation de trésorerie équilibrée qui ménage l'intérêt de toutes les sociétés du groupe ne ferait pas naître de danger particulier. En revanche une centralisation déséquilibrée fait courir des risques. Ceux-ci peuvent provenir soit de la constatation d'une confusion des patrimoines, soit de la mise en œuvre d'une procédure de sanction contre un dirigeant.
1.1 CONFUSION DES PATRIMOINES
Lorsqu'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire est ouverte contre une société, les tribunaux se sont reconnu le pouvoir de l'étendre à d'autres sociétés et de faire une procédure unique commune à l'ensemble lorsqu'il y a confusion des patrimoines.
La confusion est reconnue en cas de flux financiers anormaux entre les sociétés du groupe. S'il y a une convention d'unité de compte entre toutes les sociétés, il est à craindre que cela caractérise le mélange des actifs et des passifs.
Une centralisation déséquilibrée caractérise des flux financiers anormaux. C'est notamment le cas lorsque la rémunération est soit trop élevée, soit trop faible ou si la société n'a plus réellement la disposition de sa trésorerie. La confusion des patrimoines peut être constatée. Conformément à la tendance générale, il faut que le caractère anormal des flux financier soit caractérisé.
Dans la jurisprudence accessible, et en prenant en considération les centralisations et plus largement les opérations de trésorerie, il y a plus de décisions qui refusent de constater la confusion que de décisions qui l'admettent.
1.2 SANCTIONS CONTRE LES DIRIGEANTS
Il existe des actions qui permettent de mettre à la charge des dirigeants fautifs, tout ou partie du passif de la société. Son éventuelle application dans l'hypothèse d'une centralisation de trésorerie tient au fait qu'en pratique, il est très fréquent, voire systématique, que la société contrôlante ait la qualité de dirigeant de la filiale. Si la centralisation fonctionne dans des conditions critiquables, il existe un risque de mise à la charge des autres sociétés du groupe qui ont la qualité de dirigeant de tout ou partie du passif de la société qui a fait l'objet de la procédure.
Les personnes visées sont les dirigeants de droit et les dirigeants de fait.
Les personnes qui peuvent agir sont le mandataire de justice (représentant des créanciers), le liquidateur et le procureur de la République, la majorité des créanciers nommés contrôleurs en cas de carence du mandataire de justice.
Deux actions sont possibles :
Action en responsabilité
Cette action correspond à l’ancienne action en comblement de l’insuffisance d’actif. L'action en responsabilité pour insuffisance d'actif n'est possible qu'en cas de liquidation ou de résolution du plan (plan de sauvegarde ou plan de redressement).
Dans la jurisprudence récente et accessible, la condamnation au comblement de passif est fréquente. Conditions d’exercice de l’action à l’encontre de la société mère :
- la filiale fait l’objet d’une procédure de liquidation avec insuffisance d’actif
- la société mère était dirigeant de droit ou de fait de la filiale
- la société mère a commis des agissements constitutifs d’une/plusieurs faute(s) de gestion
- la/les faute(s) de gestion ont contribué à l’insuffisance d’actif
Spécificités par rapport aux actions en responsabilité classiques:
- Pas d’action sans insuffisance d’actif (quand bien même il y aurait eu une faute et un dommage)
- Appréciation souple du lien causal entre la faute et le dommage (il suffit que la faute de gestion ait
« contribué » à l’insuffisance d’actif »)
- Le juge n’est pas tenu par le principe de réparation intégrale du préjudice
Chez Ecopla France
Les faits énumérés au paragraphe 1 et notamment la centralisation de trésorerie déséquilibrée pourraient constituer une faute de gestion susceptible d'engager la responsabilité du dirigeant et de le condamner à verser une indemnité représentative de tout ou partie du passif social.
Obligation aux dettes
L'obligation aux dettes sociales est une sanction patrimoniale.
S'il a commis certaines fautes, le dirigeant pourra être condamné à verser à la société une somme égale à tout ou partie du passif de la société. Cette somme n'est pas une indemnité, elle sera due même si la société a pu apurer une partie de son passif. Elle ne sera pas répartie de la même manière que l'indemnité due au titre de la responsabilité pour insuffisance d'actif. Les sommes seront affectées au désintéressement des créanciers selon l'ordre de leurs sûretés.
Parmi la liste des fautes figure le fait d’avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement"( article L. 652- 1 du code de commerce).
Chez Ecopla France
Les faits énumérés au paragraphe 1 et notamment la centralisation de trésorerie déséquilibrée pourraient constituer cette faute.
Risque de saisie par les tiers
J’attire votre attention sur le fait que lorsque la centralisation se fait par remontées réelles et que la structure centralisatrice a par ailleurs une activité qui lui est propre, les créanciers de la structure centralisatrice peuvent saisir le solde créditeur de tous les comptes de ladite structure. C'est ainsi tout l'excédent de trésorerie du groupe qui peut être saisi. La convention de centralisation a été déclarée inopposable aux créanciers de la structure centralisatrice (TGI Versailles, 3 févr. 2000 : Juris-Data n° 2000-112064).
§ 3 Conventions contraires à l’intérêt social
Les décisions prises par les dirigeants doivent être conformes à l’intérêt social, c'est-à-dire qu’elles doivent être utiles ou profitables à la société. L’intérêt social ne se confond pas nécessairement avec l’intérêt des associés.
C’est pourquoi, le fait de respecter les règles légales en matière de prise de décision et de répartition des compétences n’exonère pas nécessairement, les dirigeants de leurs responsabilités.
Les conventions conclues entre des sociétés d’un même groupe ne doivent pas avoir pour effet de léser les intérêts de l’une des sociétés parties, sous peine de sanctions judiciaires : annulation de la convention ou attribution de dommages-intérêts à la société lésée.
Peuvent agir à l’encontre des dirigeants :
- la société elle-même : action en responsabilité pour faute de gestion,
- les créanciers sociaux.
Chez Ecopla France
Il semble possible qu’un juge considère que les choix stratégiques qui ont été faits en matière de gestion de la trésorerie de la Société Ecopla France constituent une atteinte à l’intérêt social de la Société.
§ 4 Conventions réglementées
Les conventions conclues entre deux sociétés d’un même groupe sont des conventions réglementées au sens du droit des sociétés.
1.1 DOMAINE
La Société Ecopla France est une société par actions simplifiées comportant plusieurs associés. Au 30/09/2013, la société comportait 3 associés : Ecopla Holding (99,9%), EkcoGroup Ltd et NFP.
Dans une SAS, le commissaire aux comptes présente aux associés un rapport sur les conventions intervenues directement ou par personne interposée entre la société et son président, l'un de ses dirigeants, l'un de ses actionnaires disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 % ou, s'il s'agit d'une société actionnaire, la société la contrôlant au sens de l’article L 233-3 du code de commerce.
Les statuts d’une SAS peuvent aménager ces règles légales mais ils ne peuvent pas les restreindre.
Par exception, les conventions portant sur des opérations « courantes et conclues à des conditions normales » ne sont soumises à aucune formalité.
À ce titre, la doctrine considère qu’il est recommandé de soumettre les conventions de cash pooling conclues entre sociétés ayant des dirigeants communs à la procédure des conventions réglementées dès lors qu'il existe un doute sur le caractère normal des conditions financières de la centralisation notamment compte tenu des montants en cause, des possibilités financières de la société qui en supporte la charge et du taux appliqué.
L’appréciation du caractère normal dépend de circonstances de fait. Selon l'Association Nationale des Sociétés par Actions (ANSA), il convient notamment de vérifier que les montants en cause n'excèdent pas les possibilités financières de la société qui en supporte la charge, et que le taux d'intérêt est normal au regard de la nature de l'opération et des conditions en vigueur à l'intérieur du groupe, qui doivent être égalitaires entre les participants.
Chez Ecopla France
L’article 00 xxx xxxxxxx xx xx xxxxxxx Xxxxxx Xxxxxx modifiés le 30 septembre 2013 tente de restreindre le champ d’application de la procédure légale des conventions réglementée ; il ne vise que les « conventions passées entre la Société et son président ou l’un de ses éventuels dirigeants ». Cette clause des statuts
n’est pas valable dans la mesure où elle s’oppose à une règle impérative. Nous en ferons donc abstraction dans notre analyse.
Les prêts consentis par Ecopla France, la convention de cash pooling et l’octoi de management fees
entrent dans le champ d’application des procédures réglementées.
Il ne me semble pas possible d’invoquer l’exception des conventions courantes et conclues à des conditions normales à ces trois opérations, dans le contexte d’Ecopla France. La procédure suivante aurait donc dû être respectée.
Le Commissaire aux comptes a été informé de la conclusion de cette convention ; son rapport général en fait état, ainsi que de la conclusion des prêts visés ci-après, sans qu’il soit précisé que ces conventions constituent des conventions réglementées.
Les associés d’Ecopla France ont approuvé les conventions réglementées énumérées dans le rapport spécial du commissaire aux comptes dans le cadre de l’approbation des comptes clos le 31/03/2012, 2013 et 2014. Nous attendons communication de ce rapport spécial pour valider sa portée et le respect des procédures applicables.
1.2 PROCÉDURE
Aucun délai n'est prévu par la loi pour aviser le commissaire aux comptes de la conclusion de ces conventions.
Les associés statuent sur le rapport spécial du commissaire aux comptes.
Chez Ecopla France
Nous n’avons pas pu obtenir les rapports spéciaux du commissaire aux comptes relatifs au trois derniers exercices. Il a été indiqué oralement à Monsieur Xxxxxxx que ces rapports n’avaient pas établi, en raison d’une « dispense » applicable. Sauf erreur de ma part, je ne vois pas de quelle dispense légale il pourrait s’agir et il conviendrait que la Société nous le démontre.
En tout état de cause, le procès-verbal de décisions des associés du 30/09/2013 et du 30/09/2014 indique que les associés ont approuvé les conventions réglementées visées dans le rapport spécial du commissaire aux comptes sur les conventions réglementées (3e décision).
Nous pouvons donc en conclure qu’un rapport spécial a été établi.
Nous ignorons quelles sont les conventions communiquées au commissaire aux comptes.
De plus, le rapport de gestion devrait rappeler quelles sont ces conventions réglementées. Ce qui n’est pas le cas.
Nous pouvons en conclure (provisoirement, jusqu’à communication de plus de documents) que la procédure des conventions réglementées ne semble pas avoir été respectée.
1.3 SANCTION
Les conventions non approuvées, produisent néanmoins leurs effets, à charge pour la personne intéressée et éventuellement pour le président et les autres dirigeants d'en supporter les conséquences dommageables pour la société.
Le défaut de rapport sur les conventions soumises à contrôle, comme le défaut de consultation des associés, entraîne les mêmes sanctions que le refus d'approbation.
§ 4 Respect de la spécialité de l'objet social
Concernant l'objet social des sociétés participantes à la centralisation de trésorerie, il convient que l'objet social figurant dans les statuts inclut les opérations financières. Les actes accomplis au-delà de l’objet social sont inopposables à la société.
Chez Ecopla France
Dans les statuts de la Société en date du 30 septembre 2013, l’objet social de la société comporte bien la réalisation d’opérations financières. Le principe de spécialité de l’objet social est donc bien respecté.
§ 5 Interdiction pour une société d’avancer des fonds, octroyer des prêts, consentir des sûretés en vue de la souscription ou de l'acquisition de ses propres actions
Nous vous indiquons, de façon plus générale que la loi interdit la constitution de sûretés sur des biens qui appartiennent à une filiale en vue de l’acquisition de ses titres par la holding.
Chez Ecopla France
Nous n’avons pas d’informations précises sur les modalités d’acquisition de la Société par Bawtry Investment. Ce point pourrait le cas échéant, faire l’objet d’un examen approfondi.
§ 6 Conventions interdites
En vertu des dispositions de l’article L 225-43 du code de commerce, applicable aux SAS sur renvoi de l’article L 227-12 du code de commerce, à peine de nullité du contrat, il est interdit aux dirigeants, autres que les personnes morales de contracter, sous quelque forme que ce soit, des emprunts auprès de la société, de se faire consentir par elle un découvert, en compte courant ou autrement, ainsi que de faire cautionner ou avaliser par elle leurs engagements envers les tiers.
Cette disposition permet aux personnes morales d’effectuer de telles conventions.
Chez Ecopla France
Les prêts consentis par Ecopla France à sa société mère ne sont pas des conventions interdites au sens de l’article L 225-43 du code de commerce dans la mesure où ils sont consentis à une personne morale.
§ 7 Obligations en matière de contrôle des changes et de balance des paiements
Des obligations peuvent peser sur les entreprises françaises en matière de déclaration "Balance des paiements" notamment lorsque le pooling est associé à du netting.
Ce point pourrait le cas échéant, faire l’objet d’un examen approfondi par un spécialiste de la matière.
§ 8 Règlementation bancaire
Bien que relevant de l’activité bancaire et comme tel soumis au monopole des établissements de crédit, les pools de trésorerie ou prêts intergroupes sont autorisés par les dispositions de l’article L 511-7, I-3 du Code monétaire et financier : « une entreprise peut procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou indirectement, des liens de capital conférant à l'une des entreprises liées un pouvoir de contrôle effectif sur les autres ».
Les entreprises non soumises à la loi bancaire peuvent effectuer tous les types possibles d’opérations financières dès lors que celles-ci ne bénéficient pas à des tiers extérieurs au groupe auquel elles appartiennent.
Les opérations de trésorerie peuvent intervenir entre la société mère et ses filiales ou sous-filiales ou entre une filiale et une autre société sœur.
Concernant Ecopla France
Au vu des éléments qui m’ont été communiqués, les opérations liées à la trésorerie (prêts et cash pooling) intervenant entre les sociétés du Groupe n’entrent pas dans le champ du monopole bancaire, dans la mesure où les opérations ont lieu à l’intérieur du groupe.
§ 9 Investissements étrangers
La règlementation des investissements étrangers effectués en France
La règlementation des investissements étrangers effectués en France s’applique non seulement aux acquisitions d’entreprises et aux prises de contrôle majoritaires mais également aux opérations, réalisées au moyen de conventions, entraînant une prise de contrôle de fait, telles que l’octroi de prêts ou de garanties substantielles.
Toutefois, les investissements et opérations assimilées à ceux-ci effectués entre sociétés appartenant toutes au même groupe c’est-à-dire détenues à plus de 50% du capital ou des droits de vote directement ou indirectement par le même actionnaire échappent aux obligations résultant de cette réglementation.
Chez Ecopla France
Les opérations liées à la trésorerie (prêts et cash pooling) intervenant entre les sociétés du Groupe n’entrent pas dans le champ de la règlementation des investissements étrangers effectués en France dans la mesure où ils sont effectués entre sociétés appartenant toutes au même groupe.
La règlementation des investissements français à l’étranger
Les investissements français à l’étranger sont soumis à l’application de la loi étrangère ou des conventions internationales.
Concernant Ecopla France
Les comptes bancaires visés dans la Convention de cash pooling étant situés en Angleterre, il conviendrait de s’assurer du respect du droit anglais en matière d’investissement étranger.
III RISQUES FISCAUX
§1. Aides intra groupe
Les remarques en matière fiscale ci-après sont d’ordre général et ne sont pas exhaustives ; elles ne constituent qu’une première approche des questions soulevées par les opérations réalisées entre les sociétés du Groupe et Ecopla France et méritent d’être approfondies par un spécialiste du droit fiscal.
Les sociétés bénéficient du principe de liberté de gestion dans le traitement des relations entre sociétés du même groupe. L'Administration peut en revanche procéder à un contrôle de la légalité des opérations réalisées : le contrôle de la légalité, s'agissant d'opérations intragroupe, pourra s'effectuer éventuellement sous l'angle de l'abus de droit ou sous l'angle de l'acte anormal de gestion. Dans le cadre des aides intragroupe, c'est fréquemment l'acte anormal de gestion qui retiendra l'attention.
Définition de l’acte anormal de gestion : L'acte anormal de gestion est celui qui est accompli dans l'intérêt d'un tiers, qui n’a pas été réalisé dans l'intérêt direct de l'exploitation ou qui n'apporte à l'entreprise qu'un intérêt minime hors de proportion avec l'avantage que le tiers peut en retirer. L'opération en cause ne doit pas être réalisée au profit des dirigeants, du personnel ou de tiers.
En présence d’un acte anormal de gestion, l’administration rejette la déductibilité de la charge et impose le profit qui aurait normalement dû être réalisé.
Principe
Les dépenses ou pertes correspondant à des avantages financiers accordés par une entreprise à une autre ne sont pas déductibles pour la détermination de son résultat taxable.
Exception
- Les dépenses ou pertes peuvent être prises en compte en vue de la détermination du bénéfice dès lors que les avantages financiers qui sont à leur origine peuvent être considérés comme effectués dans l'intérêt de l'entreprise prêtant son aide et non comme une simple libéralité ;
S'agissant d'appliquer la notion d'acte de gestion anormal, la jurisprudence considère que l'intérêt du groupe pris comme un tout ne se substitue pas à l'intérêt propre de la société membre pour permettre d'apprécier le caractère d'un avantage financier octroyé par cette dernière à une filiale, une mère ou une société sœur.
La notion d'intérêt de l'exploitation ne peut s'apprécier qu'au regard de la seule entité qui consent l'aide et non pas au niveau du groupe. Les règles sont les mêmes dans le cas d’une intégration fiscale.
Pour rechercher, au titre d'une opération déterminée s'il existe ou non une contrepartie, il est d'usage de distinguer les aides à caractère commercial et les aides à caractère financier :
- Les aides à caractère commercial sont déductibles (réforme de l’article 39 du code général des impôts (« CGI ») intervenue en 2012).
- L'aide à caractère commercial est l'aide qui est consentie à une autre entreprise. L'objectif de l'aide réside dans le maintien ou le développement de l'activité « commerciale » proprement dite de l'entreprise. L'effort sous forme d'aide étant consenti au profit de l'activité même de l'entreprise, l'opération est présumée faite dans l'intérêt direct de cette entreprise.
- Ainsi par exemple, la jurisprudence a considéré que pouvaient être qualifiées d'aide à caractère commercial, des transactions effectuées à prix coûtant avec une société sœur qui représente un débouché commercial important ou des avances sans intérêts consenties à une société chargée de mettre un point un prototype dont on doit avoir l'exploitation exclusive..
- D'un point de vue fiscal, le régime des aides à caractère commercial est le suivant : le sacrifice consenti par la société vient en déduction de son résultat imposable ; chez la société aidée, symétriquement, l'abandon ou la subvention a la nature de produit imposable.
- Mais le principe se complique dans un contexte international, notamment dans l'hypothèse où ce qui sera déductible en France aura vocation à être taxé à l'étranger. Complications encore lorsque des aides à caractère commercial sont consenties alors que simultanément, ou de manière quasi concomitante, une des deux sociétés en présence va prendre une participation dans le capital de l'autre. Dans cette situation en effet, l'aide consentie sera soumise à des examens plus approfondis afin de voir si, sous couvert de générosité, l'opération ne dissimule pas en réalité un complément de prix dans le cadre de la prise de participation.
- Les aides à caractère financier
- La loi fait désormais obstacle à toute déduction fiscale des aides à caractère financier consenties à une filiale, française ou étrangère, quels qu'en soient la forme et le régime fiscal, même si cette aide correspond à l'intérêt de l'entreprise qui la consent.
- Dans ce cas, au contraire, l'optique pour la société qui en aide une autre est une optique patrimoniale. Il s'agit de préserver la valeur de la participation détenue dans une autre société : le point central, c'est le lien capitalistique. L'aide à caractère financier est l'aide qui va permettre de maintenir en état sa ligne de participation.
- L'aide à caractère financier est justifiée par le souci d'éviter les conséquences qui pourraient résulter pour la mère de la défaillance de sa fille. L'aide à caractère financier relève donc du principe de précaution.
- Le régime des aides à caractère financier a été étendu par la jurisprudence aux aides consenties aux sous-filiales.
- Les décisions rendues en matière d’aide de la fille à la mère l'ont souvent été dans un contexte où des relations commerciales existaient entre les sociétés en présence et où l'intérêt de la filiale justifiait la déductibilité de ces aides.
- Sur les aides à caractère financier, la jurisprudence semble admettre la possibilité de prendre en compte les opérations réalisées par une fille à sa mère ou par une sous-filiale à sa mère dans la mesure où l'intérêt propre de la filiale ou de la sous-filiale peut être établi. Ainsi dans un arrêt du 22 janvier 2010, le Conseil d'État a considéré qu'une sous-filiale n'établissait pas, en l'absence de relations commerciales avec la mère, que sa survie était liée à celle de la mère. A contrario, il faut en déduire que si la survie de la mère conditionne la survie de la filiale ou de la sous-filiale, l'enjeu est de nature à justifier l'aide consentie.
Chez Ecopla France
Il semble possible que l’administration fiscale analyse les différentes aides consenties par la société Ecopla France aux autres sociétés du Groupe, dans le cadre notamment de la convention de cash pooling et des prêts comme devant faire l’objet d’une réintégration dans les résultats d’Ecopla France.
Concernant les management fees
La jurisprudence a considéré qu’il convenait de réintégrer dans les résultats d'une société A la quote- part des frais généraux facturés par la société mère à cette société A dès lors que cette dernière n'établissait pas la réalité et l'importance de l'assistance financière qui aurait été fournie par la société mère (CAA Bordeaux, 3e ch., 12 déc. 1995).
Chez Ecopla France
Compte tenu des règles applicables et de l’absence de documentation permettant de justifier des prestations fournies (absence de convention et de factures), il semble probable que l’administration fiscale remette en question la déductibilité des management fees par Ecopla France.
§2. Contrôle des transferts de bénéfices
Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France.
§3. Autres aspects de droit fiscal
Les autres aspects fiscaux et notamment en matière de TVA méritent d’être approfondis par un spécialiste en droit fiscal.
IV REVENTE À PERTE
Le Rapport d’expertise constate que des produits ont été vendus à marge nulle ou négative au bénéfice de la société Bachmann, société sœur située en Allemagne.
Risque en matière fiscale
Dans le cas d’une vérification de comptabilité de la Société, il existe un risque que l’administration fiscale française, sur la base de l’absence de marge réalisée en France, caractérise l’opération d’acte anormal de gestion et réintègre dans le résultat de la Société le montant de la marge qui aurait dû être appliqué.
Par ailleurs, il faut noter que si l’administration fiscale française suppose que la Société a transféré des bénéfices en Allemagne, elle pourra réclamer à Ecopla France des informations et des documents concernant les relations entretenues avec Xxxxxxxx ainsi que sur la politique de prix de transfert en vigueur au sein du Groupe.
Si l’administration fiscale française n’obtient pas ces informations, elle est autorisée à évaluer le montant du transfert de bénéfices à l’aide des informations à sa disposition (à noter qu’en application de la convention de double imposition signée entre la France et l’Allemagne, l’administration fiscale française est autorisée à se renseigner auprès de l’administration fiscale allemande concernant Xxxxxxxx ainsi que la politique de prix de transfert en vigueur au sein du groupe).
Pour caractériser une vente à perte, l’article L 442-2 du code de commerce français définit le prix d’achat effectif comme étant le prix unitaire net figurant sur la facture d'achat, minoré du montant de
l'ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et majoré des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport.
Le prix d'achat effectif tel que défini ci-dessus est affecté d'un coefficient de 0,9 pour le grossiste qui distribue des produits ou services exclusivement à des professionnels qui lui sont indépendants et qui exercent une activité de revendeur au détail, de transformateur ou de prestataire de services final. Est indépendante au sens de la phrase précédente toute entreprise libre de déterminer sa politique commerciale et dépourvue de lien capitalistique ou d'affiliation avec le grossiste.
Au cas présent, il existe un risque que les ventes réalisées dans ces conditions par Ecopla France au profit de Xxxxxxxx soient qualifiées de vente à perte.
Sanction
- Responsabilité pénale
La vente à perte est sanctionnée par une amende de 75k€ pour les particuliers et 375k€ pour les sociétés. Le cas échéant, la responsabilité pénale du Président Directeur Général d’Ecopla France pourrait être engagée.
À noter qu’il est envisageable que le ministère public n’engage pas de poursuites contre la société ou son Président Directeur Général dans la mesure où les montants concernés sont faibles.
- Risque de responsabilité civile
En présence d’une vente à perte, les actionnaires d’Ecopla France pourraient engager la responsabilité civile de leur Président Directeur Général sur le fondement d’une faute de gestion.
Le Président Directeur Général ne serait pas tenu pour responsable s’il pouvait prouver que ses actes ont été dictés par l’actionnaire.
Un tiers (un concurrent, par exemple) pourrait également engager la responsabilité civile du Président Directeur Général d’Ecopla France, s’il avait intérêt à le faire, sur le fondement d’une faute séparable de ses fonctions.
La vente à perte est un acte de concurrence déloyale qui peut justifier, de la part des tiers concernés (« les victimes »), un recours contre Ecopla France afin d’obtenir des dommages et intérêts.
********