CONTRAT D’ARCHITECTE
CONTRAT D’ARCHITECTE
Absence de contrat écrit précisant les tarifs de l’intervention, conséquences
1ère chambre A, 6 mars 2014 – RG 12/288
L’architecte qui n’a fait pas signer un contrat écrit précisant les tarifs de son intervention a manqué à son devoir d’information résultant de l’article L 111-2 du Code de la Consommation et des règles déontologiques de la profession d’architecte.
Si cette faute ne permet pas de faire droit intégralement à l’exception d’inexécution opposée par le maître de l’ouvrage et ne le prive pas à tout droit à rémunération pour les prestations accomplies, elle a cependant préjudicié à son cocontractant qui n’ayant pas bénéficié de toutes les informations qu’il était en droit d’attendre, a pu croire que ses honoraires seraient moindres.
De ce fait, elle l’exonère partiellement de son obligation au paiement et justifie leur réduction.
Clause de saisine préalable du conseil de l’ordre
1ère chambre A, 1er mars 2012 - RG 2011.626,
Lorsque les stipulations d’un contrat d’architecte imposent de saisir le conseil de l’ordre pour avis « avant toute procédure judiciaire » et que le litige concerne une responsabilité contractuelle de droit commun née de l’exécution du contrat, la saisine de ce conseil en préalable à celle du juge des référés pour obtenir une astreinte ne dispense pas le demandeur de la renouveler avant de saisir le juge du fond d’une action en responsabilité contractuelle de l’architecte.
Clause excluant la responsabilité in solidum de l’architecte à raison des dommages imputables à d’autres intervenants
1ère chambre A, 10 novembre 2016, RG 13/09115
Ne crée pas de déséquilibre significatif au détriment des maîtres de l’ouvrage non professionnels une clause d’un contrat d’architecte leur interdisant de faire peser sur lui les conséquences d'une responsabilité solidaire ou in solidum à raison des dommages imputables à d'autres intervenants dès lors qu'elle ne limite pas la responsabilité de l'architecte qui doit répondre de toutes les fautes commises dans le cadre de sa mission et qu'elle ne les prive pas du droit d'obtenir la réparation intégrale des dommages imputables à ce constructeur.
L’assureur de l’architecte, qui ne doit sa garantie aux maîtres de l’ouvrage qu'au titre de la dette de responsabilité de son assuré, ne peut être tenu d'assumer les conséquences financières d'une responsabilité solidaire ou in solidum que son assuré ne s'est pas engagé à assumer envers ses co- contractants.
1ère A, 23 octobre 2014 – XX 00/0000
Une clause excluant la responsabilité solidaire ou in solidum de l’architecte à raison des dommages imputables à d’autres intervenants est valable dans le cadre d’un litige où sa responsabilité est retenue sur un fondement contractuel de droit commun et non sur celui de l’article 1792 du code civil.
Elle ne peut être considérée comme abusive. En effet, elle ne crée pas un déséquilibre significatif entre le professionnel et le non professionnel et ne vide pas la responsabilité de l’architecte de son contenu, puisque puisqu’il reste responsable de toutes ses fautes commises dans l’exercice de sa mission, mais uniquement de ses fautes sans solidarité avec les autres intervenants à la construction.
1ère A2, 6 mai 2008, RG 07/419
Dans un contrat de maîtrise d’œuvre, la clause en vertu de laquelle l’architecte
« n’assumera les responsabilités professionnelles (…) que dans la mesure de ses fautes personnelles » et « ne pourra être tenu responsable ni solidairement, ni in solidum des fautes commises par d’autres intervenants » ne fait pas obstacle à sa condamnation à la réparation intégrale du dommage, dès lors qu’il est démontré à son encontre des fautes par lui commises, que ces fautes ont contribué à la réalisation de l’entier préjudice, et que par conséquent cette condamnation fait
assumer à l’architecte ses seules fautes personnelles sans assumer celles commises par l’entrepreneur.
Idem : 1ère A1, 20 novembre 2007, RG 06/6623
RESPONSABILITE DE L’ARCHITECTE MAITRE D’ŒUVRE
Obligation de contrôler la bonne exécution des travaux
1ère Chambre A, 26 janvier 2017, RG 13/09087
A failli à sa mission de maîtrise d'oeuvre complète l’architecte qui n’a découvert les défauts apparents affectant la toiture qu’à l’occasion d’une expertise privée alors qu’il lui appartenait de les déceler lui-même et que les infiltrations qui en sont résultées auraient pu être évitées s’il avait donné les directives nécessaires et contrôlé la bonne exécution des travaux. La résiliation du contrat à l’initiative du maître de l’ouvrage est dès lors imputable à ses torts exclusifs. Sa faute ayant contribué à la réalisation de l'entier dommage, il doit être condamné à réparation in solidum avec l’entrepreneur.
1ère chambre A, 10 novembre 2016, RG 13/09115
Doit être déclarée entièrement responsable de la résiliation du contrat d’architecte par le maître de l’ouvrage une société d’architectes qui, investie d'une mission complète incluant l'ordonnancement, le pilotage et la coordination du chantier, a manqué gravement à ses obligations envers lui en contribuant, par ses négligences fautives, à un retard de 19 mois sur les 28 mois accusés au total par le chantier et en étant partiellement à l'origine des multiples désordres et malfaçons apparus pendant les travaux dont certains ont occasionné un risque imminent d'effondrement.
Obligation de contrôler les situations de travaux et les factures
1ère A, 16 novembre 2017, RG 13.5962
L’architecte chargé de la coordination des travaux étant tenu de vérifier l'adéquation entre les situations de travaux et la réalité du travail exécuté et de contrôler les factures avant que le maître de l'ouvrage ne les règle, il a
manqué à ses obligations contractuelles s’il ne lui a signalé aucune des anomalies relevées par l’expert judiciaire et lui a fait croire que les factures correspondaient aux travaux exécutés et pouvaient être acquittées sans difficulté alors qu'il n'en était rien. En conséquence, il doit donc être condamné à lui payer le trop versé.
Devoir d’information et de conseil
1ère A, 16 novembre 2017, RG 13.5962
A manqué à ses obligations l'architecte qui a accepté de conduire les travaux de surélévation de la toiture d’un hôtel situé dans une commune classée sans attendre l'aval de l'administration, alors qu'il aurait dû mettre en garde le maître de l’ouvrage sur les risques liés à un éventuel refus de l'administration et s'abstenir de poursuivre la direction du chantier en cas de volonté de celui-ci de passer outre ces recommandations.
Toutefois, ce manquement n'est pas à l'origine de l'échec du projet dès lors que, si l'architecte s'était conformé à ses obligations, cela n'aurait pas évité l'interruption du chantier puisque l'administration n'aurait quand même pas donné son accord pour la surélévation de la toiture. Cette faute a seulement fait perdre une chance au maître de l’ouvrage d'éviter le paiement des travaux inutiles.
1ère A, 15 juin 2017 – RG 14.03757
Bien qu'ils n'aient pas donné leur accord par écrit, les maîtres de l'ouvrage ont manifesté leur intention non équivoque de ratifier les modifications contractuelles apparentes apportées par le maître d’œuvre à l'avant projet définitif en n'élevant aucune protestation ni réserve sur ces changements visibles lors de la réception et en payant, hors retenues de garantie, le montant des factures validées par le maître d'oeuvre durant la construction.
Ils ne peuvent lui reprocher d'avoir failli dans sa mission d'assistance aux opérations de réception en ne leur ayant pas conseillé de former des réserves sur des modifications contractuelles très apparentes auxquelles ils ne se sont jamais opposés et qu'ils ont au contraire ratifiées en toute connaissance de cause.
1ère A1, 20 octobre 0000, XX 00/0000
Bien que non investi de la conception technique du bâtiment et de la direction des travaux, il incombait à l'architecte ayant reçu la mission de déposer des demandes de permis modificatifs d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur les risques inhérents aux changements de destination et de configuration du sous-sol en l'alertant sur la nécessité de faire réaliser des études complémentaires afin de s'assurer de la parfaite étanchéité du local destiné à accueillir des chambres froides et des zones de stockage de fruits et légumes.
En ayant manqué à ses obligations, il a causé un préjudice au maître de l'ouvrage et engagé sa responsabilité à son égard puisque celui-ci n'a pas pris les dispositions nécessaires permettant d'étanchéiser efficacement le sous-sol en sollicitant les études complémentaires préconisées et en faisant réaliser un vide sanitaire.
Garantie décennale
Etendue de l’obligation
1ère Xx. X, 00 décembre 2016, RG 13/08490
Un architecte maître d’œuvre a engagé sa responsabilité décennale au titre de fissures provenant de tassements différentiels, nonobstant l’interruption de sa mission après sa mission d'assistance à la passation des marchés et avant la phase d'exécution des travaux, dès lors qu’il lui appartenait, dès le stade des avant projets et de la conception générale inclus dans ses missions exécutées et facturées, de se préoccuper des contraintes du sol afin d'y adapter la conception de l'ouvrage et de soumettre aux entreprises consultées des plans et coupes intégrant ces contraintes et de solliciter à cet effet une étude de sol .
1ère A - 16 octobre 2014 - RG 12/871
L’architecte maître d’œuvre étant tenu au respect des normes de prévention et de sauvegarde propres à assurer la sécurité des personnes, la livraison de locaux « brut de béton » ne le dispensait pas de concevoir un immeuble qui devait répondre aux normes de sécurité lorsqu’il serait utilisé selon sa destination prévue d’immeuble voué exclusivement à des activités tertiaires et appelé à recevoir du personnel et du public en adéquation avec la surface des
locaux, et ce, sans pouvoir se satisfaire des données théoriques et imprécises du bureau de contrôle .
1ère A2, 4 mars 2008, RG : 06/7256
La mission complète de maîtrise d’œuvre, conférant un pouvoir général de direction des travaux et de coordination des activités de tous les locateurs d’ouvrage emporte l’obligation de prendre les mesures propres à remédier aux désordres en cours de chantier, au besoin en s’adressant à une autre entreprise.
En se bornant à dénoncer les malfaçons affectant les travaux réalisés par un locateur d’ouvrage, le maître d’œuvre n’a pas satisfait à cette obligation, quand bien même il l’a plusieurs fois mis en demeure d’y remédier sous huitaine, faute de quoi il se chargerait de les faire reprendre par un autre artisan, dès lors que ces sommations sont restées vaines et que ces menaces n’ont jamais été mises à exécution, et qu’il n’a pris à cet égard aucune mesure concrète et n’a pas réglé les difficultés.
Dépassement budgétaire
1ère chambre A, 10 novembre 2016, RG 13/09115
Les maîtres de l’ouvrage qui ont supporté un dépassement budgétaire de 8% ne démontrent pas que ce dépassement est imputable à une faute de l’architecte qui les aurait trompés sur le coût prévisible des travaux alors que c'est à leur demande que la surface habitable a augmenté de plus d'un tiers par rapport à la surface prévue à l'origine, qu'ils ont été informés de l'augmentation corrélative de l'enveloppe budgétaire sans aucune protestation de leur part et que les marchés de second œuvre ont été finalisés sur la base de ce nouveau bilan prévisionnel.