L’option multi-franchise dans la stratégie de développement des réseaux de franchise
Contrat de recherche 2010-2011 commandité par la Fédération Française de la Franchise
L’option multi-franchise dans la stratégie de développement des réseaux de franchise
Xxxxxxx Xxxxxx, ESSCA Ecole de Management Xxxxxxx Xxxxxxxxx, ESSCA Ecole de Management Xxxxxx Xxxxxxx, Université de Montpellier 2, MRM Xxxxxx Xxxxxxxxxxxx, Aston Business School
Rapport final – Octobre 2011
Remerciements
L’équipe de recherche remercie la Fédération Française de la Franchise pour la confiance qu’elle lui a témoignée en lui accordant ce contrat et lors des divers échanges et points d’étape réalisés au cours de l’année écoulée.
Que soient particulièrement remerciés Mr Xxx Xxxx, Président de la FFF, Xxx Xxxxxxx Xxxxxx, Déléguée générale de la FFF – et à travers elle son équipe – et Mr le Professeur Xxxxxx Xxxxx, Directeur du Comité Scientifique de la FFF ainsi que l’ensemble des membres du Comité.
Nous remercions également les partenaires financiers, la Banque Populaire et HSBC.
Le thème de cette recherche, relativement « nouveau » pour la recherche en franchise, a intéressé la très grande majorité des franchiseurs et des franchisés croisés au cours des douze derniers mois. Nos sollicitations ont été nombreuses et parfois insistantes. L’accueil que nous avons reçu a toujours été positif.
Que l’ensemble des franchiseurs et des franchisés en soient remerciés.
L’équipe de recherche,
Xxxxxxx XXXXXX, Professeur de Marketing, Directeur de la recherche et des développements, ESSCA Ecole de Management, coordinateur du contrat
Xxxxxxx XXXXXXXXX, Professeur de Marketing, ESSCA Ecole de Management
Xxxxxx XXXXXXX, Maître de Conférences en Marketing, Université de Montpellier 2, MRM Xxxxxx XXXXXXXXXXXX, Professeur de Marketing, Aston Business School
Contact :
Xxxxxxx XXXXXX
ESSCA Ecole de Management 0, xxx Xxxxxx Xxxxxxx, XX 00000
00000 XXXXXX Xxxxx 00
Tél. : 00.00.00.00.00
e-mail : xxxxxxx.xxxxxx@xxxxx.xx
Introduction
« Devenir multi-franchisé, un pari à relever ». Franchise Magazine consacrait récemment ses pages conseils au modèle de la multi-franchise1, suggérant à la fois l’actualité et l’intérêt de cette stratégie de développement pour un réseau.
Franchiseurs et experts reconnaissent de nombreux avantages à la faculté offerte aux franchisés d’ouvrir plusieurs unités : une croissance plus rapide, une performance plus élevée, un maillage territorial facilité ou encore le moyen de fidéliser les franchisés.
Pourtant, la multi-franchise a jusque récemment peu intéressé la recherche en franchise. Le fait que son existence remette en cause plusieurs des explications théoriques classiques de la franchise n’est sûrement pas étranger à ce phénomène. La majorité des travaux continuent ainsi de considérer les franchisés comme des entités de petite taille, avec un pouvoir limité face à un franchiseur tout puissant (Xxxxx et Xxxxxxxxxx, 2005). Dans le même temps, on observe que de plus en plus de réseaux recourent à la multi-franchise pour se développer.
En fait, la multi-franchise questionne. Si elle n’avait que des avantages, tous les réseaux seraient aujourd’hui organisés en multi-franchise. Or, si xx xxxxxxxx x’xxxxx xxx xxxxxxxxxx xx xxxxx-xxxxxxxxx, rares sont ceux dont la proportion de franchisés à la tête d’au moins deux unités dépasse 25%.
L’existence de la multi-franchise questionne ensuite les motivations des franchiseurs et plus largement le processus décisionnel à l’œuvre dans les réseaux. En fait, et il s’agit là de l’un des principaux enseignements de cette recherche, la multi-franchise « n’attend pas le nombre des années ». Il ne s’agit donc plus seulement d’une fantaisie circonstancielle qui apparaitrait au fil du développement du réseau mais de plus en plus d’une alternative stratégique de développement parfois très tôt mobilisée.
Face à ces interrogations, cette recherche a pour principal objectif de comprendre les déterminants et les conséquences pour un réseau de franchise du recours à l’option multi- franchise pour se développer. Il s’agit de proposer à la fois des clés de lecture du phénomène mais également des clés d’action utiles à la prise de décision.
1 Xxxx Xx Xxxxxxxx, Devenir multi-franchisé : un pari à relever, Franchise Magazine, Octobre- Novembre 2011, N° 226, pp. 116-118.
Les réseaux recherchant avant tout la performance, il est dans un premier temps nécessaire de s’interroger sur pourquoi les réseaux recourent à la multi-franchise : au-delà des intuitions exprimées par les franchiseurs rencontrés, se développer en multi-franchise permet-il réellement à un réseau de croître plus rapidement, de mieux couvrir son territoire de vente, d’obtenir un niveau de performance économique plus élevé ? Se développer en multi- franchise permet-il au franchiseur de faire des économies, en particulier en termes de coûts de contrôle, de disposer d’un réseau plus homogène, de faire mieux appliquer par des unités dispersées les évolutions souhaitées ? Ces différents objectifs peuvent-ils être atteints simultanément et sans se contredire ? Enfin, existe-t-il un taux de multi-franchise optimal ?
Dans un deuxième temps, au-delà des avantages liés à l’option multi-franchise pour se développer, quels sont les facteurs qui favorisent le développement d’un réseau en multi- franchise ? Les théories classiques – théorie de la rareté des ressources, théorie des coûts de transaction et théorie de l’agence – offrent un cadre pertinent pour expliquer ce mode de développement de réseau. Elles sont ici mobilisées pour développer un modèle intégrateur de l’étude de la multi-franchise, modèle testé auprès des franchiseurs et de leurs franchisés.
Le développement en multi-franchise pose également des questions à caractère managérial. Objectifs et attentes d’un franchisé peuvent diverger selon qu’il est à la tête d’une ou de plusieurs unités. La question se pose alors de l’existence de différences en termes de comportement et de performance selon le profil du franchisé (tableau 0.1). On peut ainsi se demander si les franchisés multi-unités sont plus fidèles à leur réseau principal ou si, au contraire, parce qu’ils peuvent prétendre à un retour sur investissement plus rapide, s’ils sont plus enclins à basculer vers une enseigne concurrente. Leur poids économique dans le réseau favorise-t-il des comportements opportunistes ? Autant d’interrogations dont les réponses doivent permettre de mieux comprendre le phénomène de la multi-franchise dans sa globalité.
Tableau 0.1 – Définitions mono, multi et pluri-franchise
Point(s) de vente détenus par le franchisé | Enseigne(s) | F ranchiseur(s) | Type | Exemple |
1 (mono) | 1 (mono) | 1 (mono) | mono point de vente mono enseigne mono franchiseur f ranchisé mono-unité | Franchisé à la tête d’1 seul supermarché Carrefour Market |
≤ 2 (multi) | 1 (mono) | 1 (mono) | multi points de vente mono enseigne mono franchiseur f ranchisé multi-unités | Franchisé à la tête d’au moins 2 supermarchés Carrefour Market |
≤ 2 (multi) | ≤ 2 (multi) | 1 (mono) | multi points de vente multi enseignes mono franchiseur franchisé pluri-unités [avec f ranchiseur unique] | Franchisé Carrefour à la tête d’au moins 1 supermarché Carrefour Market et d’1 magasin de proximité Carrefour City |
≤ 2 (multi) | ≤ 2 (multi) | ≤ 2 (multi) | multi points de vente multi enseignes multi franchiseurs franchisé pluri-unités [avec f ranchiseurs multiples] | Franchisé à la tête d’au moins 1 supermarché Carrefour Market et d’au moins 1 restaurant Pizza Hut |
Les réponses à l’ensemble des interrogations soulevées par l’étude de la multi-franchise reposent sur l’analyse de données collectées au cours de quatre étapes successives dont les modalités sont détaillées ci-après (tableau 0.2).
Tableau 0.2 - Les quatre collectes de données de la recherche
Etape | Echantillon | Supports de collecte |
Panorama de la multi-franchise en France | 357 réseaux (mono-enseigne) | Enquête annuelle fff Questionnaire de recherche franchiseurs (annexe 3a) |
Enquête qualitative | 12 franchiseurs pratiquant la multi- franchise et 6 franchisés multi- unités dont 4 pluri-franchisés | Guide d’entretien franchiseur Guide d’entretien franchisé (annexes 1 et 2) |
Enquête quantitative franchiseurs | 188 réseaux de franchise (mono-enseigne) | Questionnaire de recherche franchiseurs (annexe 3a) |
Enquête quantitative franchisés | 497 franchisés dont 132 multi-unités | Questionnaire de recherche franchisés (annexe 4a) |
L’enquête qualitative menée auprès d’une vingtaine d’acteurs de la franchise, franchiseurs et franchisés, a permis d’identifier les motivations qui sous-tendent le recours à l’option multi- franchise par un réseau. Elle montre également la diversité des pratiques.
La double enquête quantitative auprès des franchiseurs a permis de dresser le panorama de la multi-franchise en France et de tester un modèle d’aide à la décision qui distingue d’un coté les facteurs déterminants du développement des réseaux en multi-franchise et de l’autre les effets de ce développement sur leur niveau de performance qualitative et économique.
Enfin, l’enquête quantitative auprès des franchisés a permis de vérifier si les perceptions
franchiseurs rejoignaient la réalité telle que la vivent leurs franchisés.
Le rapport de recherche est structuré en sept chapitres distincts (figure 0.1).
Les deux premiers chapitres portent sur la définition du cadre conceptuel de la recherche et la présentation de la méthodologie de collecte des données. Les chapitres 3 et 4 sont relatifs au panorama de la multi-franchise en France et à l’analyse des avantages compétitifs qu’offre à un réseau le recours à l’option multi-franchise pour se développer. Le chapitre 5 porte sur l’étude des forces à l’œuvre dans la décision de se développer en multi-franchise. Le chapitre
6 analyse les profils des franchisés mono vs multi-unités selon leur orientation entrepreneuriale. Enfin, le chapitre 7 synthétise les principaux résultats obtenus et propose aux franchiseurs un ensemble de recommandations susceptibles de les aider dans leur prise de décision.
Chapitre 5 Déterminants du recours à la multi-franchise
Figure 0.1 - Structure du rapport de recherche
Chapitre 1
Cadre conceptuel de la recherche
Chapitre 4
Avantages compétitifs et performance de la multi-franchise
Chapitre 3 Panorama de la multi-franchise et motivations des franchiseurs
Chapitre 2
Méthodologie de la recherche
Chapitre 6
Profil entrepreneurial des franchisés multi-unités
Chapitre 7
Synthèse des résultats
et implications managériales
Chapitre 1
CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE
Comme nous l’avons signalé en introduction, ce n’est que relativement récemment que la recherche en franchise a commencé à s’intéresser au développement des réseaux via le recours à l’option multi-franchise. Pendant longtemps, la multi-franchise, comme le phénomène lié de l’apparition de réseaux dans les réseaux (chains within the chains), a été traité de manière parcellaire ou anecdotique par les travaux.
Le développement de la multi-franchise questionne en fait les cadres théoriques classiques – théorie de la rareté des ressources et théorie de l’agence – retenus par xx xxxxxxxxxxx xxx x’xxxxxxxxx xx xx xxxxxxxxx. Cela peut expliquer que peu d’auteurs aient voulu s’engager dans son étude. Les recherches sur la multi-franchise depuis une quinzaine d’années ne cherchent en effet que rarement à en comprendre le développement. Elles portent avant tout sur ses apports à la croissance et au contrôle des réseaux, ce qui limite la portée de leurs résultats aux plans académique et managérial. Quelques auteurs ont bien tenté d’aborder le sujet sous l’angle de ses déterminants (Xxxxxxx et Xxxxxxxxxxx, 2010 ; Xxxxxxx, 0000 ; Xxxx et Xxxxxxx, 2006) mais la plupart se sont contentés de développer des approches conceptuelles ou descriptives dont la validité empirique reste à démontrer.
Basé sur une discussion des apports et des limites des travaux existants (section 1), ce chapitre montre que l’étude de la multi-franchise, à la fois dans ses déterminants et ses conséquences, offre au contraire l’opportunité de revisiter les cadres théoriques classiques pour proposer une vision intégrative du phénomène. Ce faisant, nous suivons la recommandation de Xxxxx et al. (2004) de privilégier la diversité théorique quand on étudie pourquoi une entreprise choisit la (multi)franchise pour se développer et comment la (multi)franchise influence la performance organisationnelle d’un réseau.
L’objectif est d’éclairer la compréhension de ce qui est devenu une réalité majeure dans les réseaux français2 et de montrer que le recours à l’option multi-franchise par un réseau pour se développer est un choix stratégique dont les effets sont sensibles en termes de performance. Le cadre conceptuel de la recherche s’attache donc à définir un modèle d’analyse qui explore à la fois les déterminants et les conséquences du recours par un réseau à la multi-franchise. Il est construit en juxtaposant trois cadres théoriques : la théorie des ressources, la théorie de l’agence et la théorie des coûts de transaction Il privilégie une approche duale franchiseur- franchisé (sections 2).
1.1 Apports et limites des travaux sur la multi-franchise
C’est au cours des années 1990 que sont publiées les premières recherches empiriques sur la multi-franchise. Ces recherches s’intéressent principalement au lien entre développement en multi-franchise et vitesse de croissance du réseau.
Xxxxxxxx et Xxx (1995) montrent, à partir d’une étude auprès de 169 réseaux américains de différents secteurs, qu’il existe un lien positif entre le taux de franchisés multi-unités dans un réseau et la vitesse de croissance de ce réseau (en nombre d’unités franchisées). Mais la multi- franchise n’est alors pas considérée sous l’angle d’une stratégie de développement et les deux auteurs s’interrogent sur le sens de la relation observée : est-elle due au fait que le réseau opère sur un marché porteur et qu’il attire des franchisés ambitieux qui exigent de pouvoir rapidement ouvrir plusieurs unités ou est-ce parce qu’il favorise la multi-franchise qu’il se développe plus vite ? Si l’étude ne permet pas de répondre à la question, elle suggère néanmoins que l’incertitude dans laquelle opère un réseau peut jouer un rôle sur son développement en multi-franchise.
Xxxxxxxx et Xxxx (1996) abordent la question sous un angle plus déterministe. Ils observent tout d’abord, à partir d’une recherche auprès de 152 franchiseurs du secteur de la restauration rapide aux Etats-Unis, que la multi-franchise est la règle et non l’exception : 88% des réseaux étudiés ont des franchisés à la tête de plusieurs unités.
2 Cf. Chapitre 0 - Xxxxxxxx xx xx xxxxx-xxxxxxxxx xx Xxxxxx et motivations des franchiseurs
Comme Xxxxxxxx et Xxx (1995), ils trouvent ensuite que plus un réseau compte de franchisés multi-unités, plus il connaît un taux de croissance en franchise élevé. Ils expliquent ce résultat par les économies que permet de réaliser la multi-franchise en termes de coûts de recrutement et de formation des franchisés. A l’appui de cet argument, l’étude FFF réalisée en 1999 par Xxxxx et Le Gall auprès des réseaux français montre que le temps moyen nécessaire pour qu’un franchisé soit performant dans une nouvelle unité est moitié moins long si le franchisé est déjà dans le réseau (3,6 mois contre 8,8 mois).
Le lien entre multi-franchise et croissance du réseau est à la même époque abordé indirectement par les travaux sur la survie des unités en franchise.
Dans une étude portant sur la survie à deux et trois ans de plus de 50.000 nouveaux restaurants aux Etats-Unis, Bates (1998) observe qu’une nouvelle unité en franchise a une chance de survivre bien supérieure à celle d’un commerçant indépendant. Mais il note que tous les franchisés ne sont pas égaux dans ce domaine. En précisant que près de 85% des nouvelles unités en franchise dont il a observé le taux de survie sont en fait des unités qui appartiennent à des mini-chaînes, il suggère que le fait d’être à la tête de plusieurs unités du même réseau renforce les chances de succès d’une unité supplémentaire d’un franchisé.
Xxxxxxxx et Xxx Xxxxxx (2003), dans une étude sur la survie des réseaux américains sur la période 1994-1997, soulignent que le taux de survie d’un franchisé peut effectivement être influencé par le nombre d’unités qu’il possède. Si leurs données ne permettent pas de distinguer mono vs multi-franchisés, ils dressent néanmoins la liste des bénéfices de la multi- franchise : un taux de croissance plus élevé, une plus grande facilité d’accès aux capitaux, des acteurs plus expérimentés, un renforcement de la fréquence et de l’efficacité des contrôles au niveau des unités ou encore des compétences distinctives franchiseur-franchisés qui se renforcent les unes les autres.
Xxxxxx et Xxxxx (2004) avancent qu’une nouvelle unité dans un réseau profite effectivement à la fois de l’expérience et des savoir-faire développés par le franchiseur et le cas échéant par le franchisé, surtout quand ce dernier est à la tête de plusieurs unités. A partir d’une étude portant sur 2474 pizzérias de l’Etat du Texas dont 1670 appartiennent à des mini-chaînes, ils observent que les unités appartenant à une mini-chaîne bénéficient en général davantage que les unités isolées de l’expérience que la tête de réseau a développé localement.
L’ « expérience locale » du franchiseur est définie comme la capacité de ce dernier à filtrer les innovations développées par ses franchisés, à les codifier puis à les diffuser auprès des autres unités du système. Plus un franchiseur dispose d’un niveau élevé d’expérience locale, plus le risque d’échec des unités en franchise s’en trouve réduit, d’autant plus si ces dernières font partie d’une mini-chaîne.
A partir du début des années 2000, les recherches quittent le périmètre de l’étude du lien entre multi-franchise et croissance ou survie des réseaux pour se tourner vers l’étude des stratégies d’allocation territoriale d’unités multiples.
Kalnin et Lafontaine (2004) étudient comment les franchiseurs allouent une nouvelle unité sur un territoire donné. A partir d’une recherche portant sur sept chaînes de restauration rapide aux Texas, ils montrent que les réseaux privilégient généralement une stratégie de proximité, favorisant le développement de grappes de franchisés. En permettant à un franchisé de placer ses différentes unités sur un même territoire, le franchiseur réduit ses coûts de contrôle mais également les risques de concurrence et de conflits entre les franchisés de son réseau3.
Xxx et Xxxxx (2009) abordent la question de l’allocation territoriale des unités dans le cadre de la restructuration d’un territoire de vente par un franchiseur. L’analyse des pratiques de 40 réseaux britanniques appartenant à six secteurs montre que les franchiseurs recourent à l’option multi-franchise, en particulier lorsqu’ils souhaitent restructurer leurs territoires de vente en cours de contrat avec un franchisé. La possibilité offerte à un franchisé d’ouvrir une unité supplémentaire du réseau est alors liée à l’acceptation par celui-ci d’une révision de sa zone d’exclusivité.
Au-delà de la question de l’allocation territoriale des unités, ce qu’expriment ces travaux est que l’octroi (ou non) d’une unité supplémentaire à un franchisé peut servir de levier de management du réseau. C’est ce que montre Xxxxxxxxx (2003) à partir de l’étude des documents d’information précontractuels de 96 franchises américaines. Elle observe que plus un réseau est en multi-franchise, c'est-à-dire plus il comprend d’unités appartenant à une mini- chaîne, moins il connaît de conflits juridiques ou de ruptures des relations en cours de contrat. Elle explique ce résultat par le fait que les franchisés en place dans un réseau ont un
3 Nous verrons ultérieurement que la majorité des réseaux français privilégient ce type d’approche en
autorisant leurs franchisés multi-unités à opérer des points de vente géographiquement rapprochés.
comportement d’autant plus en conformité avec les attentes du franchiseur qu’ils peuvent espérer obtenir à terme le droit d’ouvrir une unité supplémentaire. La multi-franchise joue alors un rôle de « signal » auprès des franchisés en place. Bercovitz (2003) souligne toutefois que l’effet incitatif diminue lorsque la tête de réseau n’est pas transparente en termes de stratégie d’allocation des unités supplémentaires.
Plusieurs des travaux précités (Xxxxxxxx et Xxx, 1995 ; Xxxxxxxx et Dant, 1996) distinguent et comparent différentes formes contractuelles de développement en multi- franchise : la multi-franchise séquentielle ou incrémentale ; la multi-franchise via des accords de zone ; enfin, la multi-franchise via des accords de master franchise.
Dans le cas de la franchise séquentielle, le franchisé est autorisé à ouvrir plusieurs points de vente de l’enseigne de manière successive, en général en fonction des résultats obtenus dans son/ses unité(s) précédente(s) et des opportunités d’affaire au sein du réseau.
Une zone géographique ou territoire peut également être attribuée au franchisé via un accord particulier dit « accord de zone ». Dans ce type d’accord, des objectifs sont fixés au franchisé en termes de rythme d’ouvertures de nouveaux points de vente.
Dans la troisième forme possible, la master franchise, « le franchiseur conclut un contrat dit de master franchise avec un opérateur […] (subfranchisor), par lequel il l’autorise à ouvrir et détenir en propre des unités et à franchiser le concept, sur un territoire spécifié pour une période donnée. Le contrat de master franchise implique un franchisage direct entre le master franchisé et les franchisés (subfranchisees) » (Nègre, 2006).
Xxxxxxxx et Xxx (1995) concentrent leur étude sur deux modalités contractuelles de master franchise, l’accord de zone et le subfranchising. Ils observent que l’emploi de ces deux modalités est corrélé positivement à la croissance du réseau4.
Xxxxxxxx et Xxxx (1996) proposent l’hypothèse que le recours aux accords de zone est une stratégie moins efficace en termes de croissance qu’une stratégie incrémentale. Dans le cas
4 La master franchise n’entrant pas dans le périmètre de notre étude en raison de son objet et de son recours essentiellement dans le domaine de la franchise internationale, il n’y sera plus fait référence dans la suite du rapport.
d’accords de zone, il n’est pas possible de connaître ex-ante les qualités du candidat. Il s’agit donc d’une modalité contractuelle de développement qui ne diminue pas le risque de problèmes de sélection adverse avec les nouveaux franchisés (contrairement au recours à la franchise séquentielle). Toutefois, les données qu’ils collectent ne leur permettent pas de vérifier leur hypothèse.
Les travaux sur la multi franchise, qu’ils aient traités du phénomène directement ou indirectement, offrent donc des résultats qui suggèrent 1) l’existence d’un lien positif entre multi-franchise et croissance du réseau ; 2) l’existence d’un lien positif entre multi-franchise et survie des franchisés ; 3) que le pouvoir du franchiseur d’octroyer une unité supplémentaire est un levier de contrôle des franchisés.
En revanche, leurs résultats laissent de nombreuses questions en suspens. Ils ne permettent pas de départager clairement les différentes modalités contractuelles observées dans les réseaux (incrémentale vs accords de zone) en termes d’efficacité ; les liens observés ne révèlent pas de causalité; ils reposent pour l’essentiel sur des études mono-sectorielle et mono-pays (la restauration aux Etats-Unis) ; enfin, et ainsi que le reconnaît Xxxxxxx (1998), les recherches portent souvent sur l’étude de réseaux de très grande taille – jusque 3600 unités en franchise dans son cas – et qui ont réussi.
On peut ajouter que la notion de territoire (et celle d’accord de zone) telle qu’elle est comprise aux Etats-Unis n’est pas comparable avec la notion de territoire en France (les distances ne sont pas les mêmes) ; que les travaux n’abordent pas la question de la pluri-franchise ; enfin, qu’ils portent quasi-exclusivement sur l’interrogation des seuls franchiseurs.
Malgré leurs apports respectifs, ces travaux successifs présentent donc des limites qui réduisent la généralisabilité de leurs résultats, empêchant de disposer à ce jour d’un cadre intégrateur permettant de comprendre à la fois les déterminants et les conséquences du développement en multi-franchise et donc les raisons qui conduisent un réseau à choisir cette option pour se développer.
Les limites précitées et l’argument théorique sont autant de facteurs qui orientent la suite de notre travail. Celui-ci propose d’étudier le phénomène à la fois dans ses déterminants et dans
ses conséquences, en recueillant à la fois la perception des franchiseurs et celle des franchisés
à partir d’une approche multi-théorique et multi-sectorielle.
Le modèle de la décision de multi-franchiser et des conséquences de cette décision a ainsi pour objectif d’éclairer les décideurs quant au choix à opérer en termes de développement en multi-franchise en répondant à cinq questions principales : pourquoi, quand, comment, avec qui et pour quels résultats ?
1.2 Déterminants et conséquences de la multi-franchise :
proposition d’un modèle d’aide à la décision
Pourquoi la multi-franchise et pour quelle performance ? Ce sont là les deux principales questions que nous avons posées aux franchiseurs et aux franchisés. Le poids que pèse aujourd’hui la multi-franchise en France (cf. chapitre 3) suggère qu’elle a depuis longtemps dépassé la simple fantaisie circonstancielle pour devenir dans de nombreux réseaux une option stratégique de développement. Il s’agit donc 1) d’identifier et de valider empiriquement les arguments qui peuvent expliquer le recours par un réseau à l’option multi- franchise pour se développer et 2) de mesurer si une telle stratégie de développement présente des avantages compétitifs particuliers par rapport à une stratégie de développement privilégiant la mono-franchise.
1.2.1 Une lecture multi-théorique des déterminants de la multi-franchise5
Comme observé précédemment, les travaux académiques se sont peu intéressés aux facteurs explicatifs de la multi-franchise. Le recours à l’option multi-franchise par un réseau pour se développer a en fait longtemps été considéré comme une stratégie de croissance indésirable. Le fait que la multi-franchise questionne plusieurs des bénéfices que la perspective agentielle reconnait à la franchise par rapport au succursalisme n’est pas étrangère à ce phénomène (Xxxxxxxx et Dark, 1987).
5 Les hypothèses de la recherche relatives au modèle franchiseur apparaissent en lettres capitales ( H1, H2, etc.) ; celles relatives au modèle franchisé apparaissent en lettres minuscules et italiques (h1, h2, etc.). Le lecteur trouvera pages 26 et 27 une synthèse des deux modèles et des hypothèses liées.
Nous montrons que les cadres théoriques dominants de la recherche en franchise – la théorie de l’agence et la théorie de la rareté des ressources (Xxxxxxxxxxxxxx et al., 2006) mais aussi la théorie des coûts de transaction – restent pourtant pertinentes pour expliquer l’existence de la multi-franchise.
1.2.1.1 Théorie de la rareté des ressources et multi-franchise
Le développement en propre est considéré comme préférable au développement en franchise car il offre à la firme des niveaux de rentabilité plus élevés. C’est ce que disent Xxxxxxxxx et Xxxxx (1969) dans leur article séminal sur les raisons qui conduisent une firme…à franchiser. Car il existe des situations où la firme est amenée à privilégier la franchise, en particulier quand il est nécessaire de réaliser très vite des économies d’échelle pour se développer puis se maintenir sur son marché. Selon la théorie de la rareté des ressources, la franchise représente alors le moyen pour le franchiseur de contourner le problème de ressources propres limitées en accédant aux ressources financières et managériales des franchisés. Une fois que le réseau aura atteint ses objectifs en matière d’économies d’échelle et de taille, il concentrera ses efforts sur une croissance plus qualitative, axée sur la maximisation de la performance des unités en franchise existantes. Les moyens financiers qu’il en retirera lui permettront de racheter les unités franchisées les plus performantes pour revenir vers un mode de développement succursaliste.
La réalité empirique ne vérifie toutefois qu’imparfaitement la théorie de la rareté des ressources. Xxxx (1973) montre ainsi que si les réseaux ont effectivement recours à la franchise en début de vie, peu de franchiseurs reviennent ensuite à la pleine propriété. Un phénomène qu’il explique par leur réticence à racheter les unités les moins profitables ou isolées.
En outre, Xxxxx (1978) souligne que l’argument capitalistique est fallacieux lorsqu’on l’applique au franchisé. Partant du principe qu’un franchisé est averse au risque, s’il accepte de mettre tout son capital dans une seule unité – plutôt que de prendre des parts dans plusieurs unités – il s’attend à obtenir un niveau de rémunération de ce capital plus élevé. Le franchiseur doit donc accepter de voir la sienne réduite. Or, selon Xxxxx, cela coûterait moins cher à un franchiseur de solliciter le marché pour se développer que de recourir à des
franchisés à qui il devra verser un premium en raison du risque qu’il leur fait courir. La réalité montre pourtant que de nombreux franchiseurs continuent de se développer en franchise…et sans pour autant verser à leurs franchisés une rémunération plus élevée.
L’octroi d’une unité supplémentaire à un franchisé peut représenter ce premium, le franchisé acceptant une rémunération moindre pour sa première unité par rapport à ce qu’il pourrait obtenir sur le marché car il espère que toute unité supplémentaire lui permettra de dégager une rémunération moyenne par unité plus élevée. La théorie de la rareté des ressources supporte ainsi l’existence de la multi-franchise dans ses déterminants et ses conséquences.
Au plan des déterminants, la multi-franchise peut être vue comme le moyen pour le franchiseur d’accélérer son développement en s’appuyant sur des franchisés qui auront dégagé des ressources financières à partir de leur(s) première(s) unité(s). Au-delà, octroyer une unité supplémentaire permet un gain pour le franchiseur en termes de coûts de recrutement et de formation (Xxxxxxxx et Dant, 1996). Même les réseaux jeunes l’ont compris. Le panorama de la multi-franchise (chapitre 3) montre ainsi qu’il n’existe pas de relation linéaire entre l’âge d’un réseau et son taux de multi-franchise, ce qui suggère bien que la multi-franchise est une option de développement qui peut être choisie par les réseaux très tôt dans leur existence. Ce qui conduit à poser comme hypothèse :
H1a : Plus les capacités financières du franchiseur pour se développer en propre sont limitées, plus il est développé en multi-franchise
Au-delà des ressources financières, deux autres types de « ressources » (qui ont émergé de nos entretiens) pourraient avoir un effet sur le taux de multi-franchise d’un réseau. La première est relative au volume et à la qualité des candidatures que reçoit le réseau. Un déficit dans ce domaine peut conduire un franchiseur à s’appuyer davantage sur les franchisés en place. Ce qui amène à tester :
H1b : Plus le réseau reçoit des candidatures nombreuses et de qualité, moins il est développé en multi-franchise
La seconde relève de l’importance que le franchiseur accorde à la connaissance de son marché
local par le franchisé. Cette connaissance est essentielle à la réussite d’un réseau. Elle peut
conduire celui-ci à appuyer son développement sur le recours à la mono-franchise afin de
s’assurer de la proximité de ses franchisés avec leur marché local. Cela conduit à poser :
H1c : Plus la connaissance par le franchisé de son marché local est nécessaire pour la réussite du concept, moins le réseau est développé en multi-franchise
Au plan des conséquences, nous avons noté précédemment que l’octroi d’une unité supplémentaire pouvait être considéré comme une forme indirecte de rémunération du capital du franchisé. Cela revient à considérer que la rémunération marginale de chaque unité supplémentaire est croissante. C’est à cette condition que le franchisé accepte une moindre rémunération dans le cadre de sa première unité dans l’espoir d’obtenir à terme une nouvelle unité. Nous posons donc que :
h4a : Plus un franchisé possède d’unités du réseau, plus il est performant en termes de
croissance de son chiffre d’affaires moyen par unité
h4b : Plus un franchisé possède d’unités du réseau, plus il est performant en termes de
croissance de son résultat net moyen par unité
1.2.1.2 Théorie des coûts de transaction et multi-franchise
L’économie des coûts de transaction (Xxxxxxxxxx, 2002 ; 2000) offre un cadre théorique permettant de comprendre le choix d’une structure de gouvernement des relations d’échange. Elle repose sur le postulat selon lequel toute relation est associée à des coûts de transaction qui sont les coûts de mise en œuvre, de suivi et de contrôle du contrat d’échange qui lie les partenaires de la relation. Ces coûts sont nombreux. Dans le cas de la franchise, il s’agit des coûts supportés par le franchiseur et le franchisé ex-ante ou ex-post : coûts liés à la recherche d’un partenaire, à sa sélection, à la négociation contractuelle ; coûts de sélection adverse ; coûts liés au contrôle des comportements afin de limiter le risque moral ; coûts d’adaptation, etc. (Xxxxx et Le Gall, 1999).
Le développement en franchise plutôt qu’en succursalisme correspond à une recherche de minimisation de ces coûts. Ces derniers sont toutefois influencés par de nombreux facteurs
d’environnement des transactions. Parmi eux, trois exercent une pression particulière qui explique le choix par un réseau de se développer (ou non) en franchise : la spécificité des actifs, l’incertitude liée à l’environnement d’affaire et l’incertitude liée au comportement du partenaire de l’échange (Dant, 1996).
Les actifs spécifiques sont des investissements matériels (équipements, mobiliers, fournitures, etc.) ou immatériels (enseigne, apprentissage des savoir-faire, communication, etc.) qui sont difficilement réutilisables dans une autre relation d’affaire, parce qu’ils sont spécialisés et dédiés à une relation particulière (Xxxxxx et Chanut, 2010). Plus ils sont élevés dans une relation d’échange, plus la partie qui les supporte est en situation de dépendance car elle s’expose au comportement opportuniste de son cocontractant. Toute rupture de la relation se traduit en effet par une perte (Xxxxx et Xxxx, 1988).
Les travaux empiriques valident cette hypothèse en montrant que plus un réseau demande à ses franchisés un niveau d’investissement spécifique élevé, plus il a tendance à se développer en propre. L’une des explications est qu’il lui est difficile de trouver des franchisés prêts à réaliser des investissements à la hauteur du montant attendu (Dant, 1996) ; c’est également le moyen de protéger sa marque quand des efforts importants ont été faits pour la développer (Minkler et Park, 1994).
Le développement en multi franchise questionne ces résultats. On peut en effet émettre l’hypothèse qu’un réseau réalisant des niveaux élevés d’investissements spécifiques pourra préférer la franchise au succursalisme… ou plutôt la multi-franchise au succursalisme.
La multi-franchise contredit en effet les deux arguments qui, selon la théorie des coûts de transaction, limitent le développement d’un réseau en franchise. Tout d’abord, la peur du franchiseur de voir ses investissements dans la construction de la marque réduits à néant par des franchisés adoptant des comportements opportunistes : les franchisés sollicités pour ouvrir une unité supplémentaire croient suffisamment dans la marque pour accepter d’y consacrer des ressources supplémentaires. Ensuite, les franchisés prêts à ouvrir une unité supplémentaire ont en général dégagé des revenus des unités qu’ils possèdent déjà. Ils sont donc davantage en mesure de réaliser le montant des investissements demandés. Cela conduit à poser :
H2a : Plus le franchiseur supporte des investissements spécifiques élevés, plus le réseau
est développé en multi-franchise
Xxxxxxx (1995) suggèrant que les franchisés multi-unités répliquent les méthodes de travail de leur franchiseur, la perspective transactionnelle peut donc aussi être mobilisée pour analyser le choix des franchisés de se développer (ou non) en multi-unités.
Allam et Le Gall (1999) proposent de distinguer deux principaux types d’actifs spécifiques en franchise, selon qu’ils portent sur des investissements matériels (actifs spécifiques physiques) ou sur des investissements immatériels liés en particulier à l’apprentissage des savoir-faire par les membres du réseau (actifs spécifiques humains).
Les investissements en actifs spécifiques d’un franchisé dans une unité le lient d’autant plus à l’enseigne qu’ils sont élevés. Cela l’encourage à renforcer sa présence dans l’enseigne en investissant dans une unité supplémentaire. Cela lui permet de rééquilibrer le rapport de force qu’il entretient avec son franchiseur et par là de sécuriser son investissement. Cela conduit à tester les hypothèses suivantes :
h1 : Plus un franchisé supporte un niveau élevé d’investissements en actifs spécifiques physiques, plus il possède d’unités de l’enseigne
h2 : Plus un franchisé multi-unités supporte un niveau élevé d’investissements en actifs spécifiques humains, plus il possède d’unités de l’enseigne
h5 : Plus un franchisé possède d’unités du réseau, plus il accorde une valeur forte à l’image de marque du réseau
L’incertitude environnementale qui entoure la relation de franchise est un autre facteur qui influence les coûts de transaction.
Il est en effet difficile dans un environnement d’affaire incertain de prévoir de manière exhaustive ce qui peut survenir dans le futur. Les contrats sont donc incomplets et prêtent le flanc à interprétation. La théorie des coûts de transaction suggère dans cette situation que l’internalisation des activités via le recours à la firme est le mode organisationnel à privilégier. Un réseau exerçant son activité dans un environnement d’affaires incertain aurait donc davantage recours au développement en propre qu’à la franchise. C’est ce que démontre Dant (1996) à partir de l’observation de la stratégie de développement de 179 réseaux de franchise aux Etats-Unis.
Si on reprend le raisonnement tenu précédemment, la multi-franchise questionne cet argument. On peut penser que travailler avec des franchisés en place qui connaissent le marché et maîtrisent les savoir-faire du réseau rassurera d’autant plus le franchiseur qu’il évolue dans un environnement d’affaire incertain. Le franchisé multi-unités est censé avoir un niveau de clairvoyance plus élevé puisqu’il connaît l’enseigne et son marché et dispose d’une expérience des affaires. On peut donc poser que :
H2b : Plus le franchiseur exerce son activité dans un environnement d’affaires incertain,
plus le réseau est développé en multi-franchise6
Le troisième facteur influençant les coûts de transaction est l’incertitude liée au
comportement des acteurs.
Selon la perspective transactionnelle, les acteurs sont, par définition, opportunistes, c'est-à- dire qu’ils recherchent leur intérêt propre et n’hésitent pas ce faisant à « tromper, désinformer, déguiser, omettre, choquer ou induire en erreur un autre agent » (Xxxxx-Xxxxxxxxxx et Xxxxxx, 1997). Un réseau dispose de nombreux leviers formels et informels afin de limiter ce type de comportement. Parmi ces derniers, la sélection des franchisés représente un levier particulièrement efficace (Xxxxxxxxxxx et Xxxxx, 1999).
Le risque perçu par le franchiseur de comportements opportunistes chez les futurs franchisés peut dès lors le conduire à privilégier de travailler avec des franchisés en place dans le cadre de sa stratégie de développement. Comme noté précédemment, il aura pris le temps de les observer dans leur activité. Ce qui conduit à poser :
H2c : Plus le franchiseur perçoit un niveau d’incertitude élevé dans le comportement de
ses futurs franchisés, plus le réseau est développé en multi-franchise
6 A ce titre, la période retenue par cette recherche (2008-2011) est particulièrement appropriée au test de cette hypothèse.
1.2.1.3 Théorie de l’agence et multi-franchise
Xxxxx (1978) a été l’un des premiers à remettre en cause l’explication de la franchise par la théorie de la rareté des ressources en montrant que l’argument « capital » n’expliquait pas la franchise (cf. supra 1.1.1). Il propose une explication alternative qui s’inspire des travaux d’Xxxxxxx et Demsetz (1972) et de Xxxxxx et Xxxxxxxx (1976) sur la surveillance et le contrôle à l’intérieur de la firme.
Il suggère que la franchise est un mode de développement qui sera utilisé dans des situations ou le point de vente est éloigné du siège du réseau, ce qui en rend le contrôle coûteux. Le réseau a alors recours à des mécanismes incitatifs afin de limiter le risque que les unités franchisées n’adoptent des comportements déviants. « Et le moyen le plus simple de motiver le franchisé est de lui donner la plus grande part du profit » (Xxxxx, 1978).
Mais si le partage de la rente contribue à réduire la tendance des franchisés à fournir des efforts inférieurs à ceux attendus (shirking), il n’empêche pas qu’ils adoptent parfois des comportements de cavalier libre ou de passager clandestin (free-riding). Le contrat de franchise seul ne saurait donc suffire et le franchiseur doit s’appuyer sur des mécanismes de contrôle formels et informels afin d’encadrer les comportements de ses franchisés.
Pour Xxxxxxxx et Dark (1987), la multi-franchise est un mécanisme possible pour contrôler ces comportements, en particulier lorsque les différentes unités du franchisé sont rapprochées. Ils trouvent toutefois deux arguments qui en font une option de développement indésirable pour un réseau : la première est que les franchisés multi-unités auraient tendance à sous-investir et à réclamer des niveaux de rentabilité plus élevés ; la seconde est que la multi-franchise réintroduit le problème que la franchise était censée résoudre par rapport au développement en propre, celui de la moindre motivation du salarié (ici employé par le franchisé multi-unités) par rapport à un franchisé mono-unité à la tête de son point de vente.
Toutefois, si on reprend le premier argument des auteurs, la multi-franchise doit permettre de réduire les coûts de contrôle du réseau supportés par le franchiseur.
Parallèlement, en lien avec les hypothèses X0x, X0x, X0x qui tentent d’expliquer l’existence de la multi-franchise coté franchiseur, on peut faire l’hypothèse que les franchisés multi- unités sont moins opportunistes que les franchisés mono-unité. L’argument supportant cette hypothèse est que plus le franchisé a investi dans un réseau en ouvrant des unités multiples,
plus il a intérêt à se comporter conformément aux attentes de son franchiseur et ceci pour deux raisons : la première est que cela peut lui permettre d’obtenir une unité supplémentaire ; la seconde est qu’il n’a pas intérêt à adopter un comportement déviant au risque de perdre son investissement. Cela conduit à tester dans une perspective agentielle les hypothèses suivantes :
Coté franchiseurs :
H6 : Plus un réseau compte un nombre élevé de franchisés multi-unités, plus les coûts de contrôle du réseau sont réduits
Coté franchisés :
h6 : Plus un franchisé possède d’unités du réseau, moins il est opportuniste
1.2.2 Les avantages compétitifs et la performance de la multi-franchise
Bradach (1998 ; 1995) montre, à partir d’une étude de cas réalisée sur cinq chaînes américaines du secteur de la restauration rapide que le recours à l’option multi-franchise offre, par rapport au recours à l’option mono-franchise, deux principaux avantages compétitifs : une croissance plus rapide du réseau (« les franchisés multi-unités sont une source de croissance relativement peu coûteuse ») et une capacité à accompagner plus facilement et rapidement les évolutions générales mises en œuvre par la tête de réseau (« les franchisés multi-unités contribuent certainement moins au plan de l’innovation au niveau local […] mais le fait qu’ils pilotent plusieurs franchises facilite la mise en œuvre des nouvelles idées »). Ce serait donc là deux des motivations des réseaux pour se développer en multi-franchise.
En revanche, ses observations l’amènent à constater qu’un franchisé mono-unité réagit généralement avec plus de rapidité aux évolutions du marché local qu’un franchisé multi- unités, souvent éloigné du ou des marchés sur lesquels il opère (« les franchisés multi-unités copient en général les pratiques des succursales ») et que le recours à l’une ou l’autre des deux stratégies pour se développer – mono ou multi-franchise – n’a pas d’incidence sur le degré d’uniformité du réseau (« alors que tout penserait à croire que l’inverse se produirait »).
Néanmoins, Xxxxxxx (1998) a montré, dans une étude multisectorielle commanditée par la FFF et portant sur la mixité franchise-succursalisme, que les conclusions de Xxxxxxx n’étaient pas toujours reproduites dans le cas français. Nos entretiens laissent d’ailleurs plutôt penser à un effet favorable de la multi-franchise en termes d’uniformité du réseau (cf. chapitre 3 : partie consacrée aux motivations des franchiseurs pour se développer en multi-franchise).
Au-delà de la croissance du réseau (calculée en nombre d’unités franchisées), le recours à l’option multi-franchise par un réseau s’inscrit également dans la perspective de dégager une performance économique supérieure selon les franchiseurs interrogés (cf. chapitre 3).
Nous cherchons donc à vérifier à la fois la pertinence des conclusions de Xxxxxxx (1995) et l’hypothèse de l’existence d’un lien entre multi-franchise et performance économique en interrogeant les franchiseurs et les franchisés. Cela se traduit par une série d’hypothèses relatives aux effets de la multi-franchise coté franchiseur et de la multi-unité coté franchisés :
Coté franchiseurs :
H3 : Plus le réseau est développé en multi-franchise,
- H3a : plus il connaît une croissance forte
- H3b : plus il a une couverture territoriale élevée
- H3c : plus il s’adapte facilement aux évolutions de son environnement
- H3d : plus il présente un degré d’uniformité élevé
- H3e : moins il réagit rapidement aux évolutions de son marché local
H4 : Plus le réseau est développé en multi-franchise, plus il connaît un niveau de performance économique élevée
H5 : Plus le réseau est développé en multi-franchise, plus la valeur de son image de marque est forte
Coté franchisés : on retrouve la même série d’hypothèses (sauf pour la croissance)
h3: Par rapport à un franchisé mono-unité, un franchisé multi-unités
- h3a : présente un degré d’uniformité plus élevé
- h3b : est moins réactif aux évolutions de son environnement local
- h3c : s’adapte plus facilement aux évolutions de l’environnement d’affaire dans
lequel évolue son réseau
h5 : Par rapport à un franchisé mono-unité, un franchisé multi-unités a un niveau plus
élevé de perception de la valeur de l’image de marque de son réseau
A la lumière du faible nombre de travaux sur les déterminants et les conséquences de la multi- franchise, le modèle décisionnel que nous testons repose sur l’analyse de liens directs entre les différentes variables antécédentes ou conséquences de la multi-franchise. Ce n’est qu’ultérieurement qu’il conviendra d’affiner notre modèle, par exemple en recherchant la présence d’effets médiateurs ou modérateurs.
Nous retenons néanmoins dans la partie amont du modèle plusieurs variables de contrôle qu’il nous semble utile de mobiliser pour mieux comprendre la multi-franchise : âge du réseau, taille, type de franchise (distribution de produits vs services ; achat répété vs non répété) ; proportion d’unités en franchise, appartenance à un réseau multimarques.
Les modèles franchiseurs et franchisés sont décrits de manière synthétique ci-après.
1.3 Synthèse du modèle « franchiseurs » (sens de la relation attendu)
Taux de multi-franchise
du réseau
T H E O RI E D E L ’A G E N C E
- H6 : Coûts de contrôle du réseau (-)
IM A G E D E M A R Q U E
- H5 : Valeur de l’image de marque (+)
PE R F O R M A N C E
- H4 : Performance économique du réseau (+)
A V A N T A G ES C O MPE T I T I FS
- H3a : Croissance du réseau (+)
- H3b : Couverture territoriale (+)
- H3c : Adaptation générale du réseau (+)
- H3d : Uniformité du réseau (+)
- H3e : Réactivité du réseau aux évolutions locales (-)
T H E O RI E D E L A R A R E T E D ES R ESSO UR C ES - H1a : Capacités financières du franchiseur pour se développer en propre (-) - H1b : Nombre et qualité des candidatures reçues (-) - H1c : Importance de la connaissance du marché local pour la réussite du point de vente (-) | |
T H E O RI E D ES C O U TS D E T R A NSA C T I O N - H2a : Investissements spécifiques du franchiseur (+) - H2b : Niveau d’incertitude environnementale (+) - H2c : Niveau d’incertitude sur les comportements (+) | |
V A RI A B L ES D E C O N T R O L E
- Age du réseau
- Taille du réseau (succursales + franchises)
- Franchise de distribution de produits vs services
- Achat répété vs non répété
- Proportion d’unités franchisées
- Appartenance du réseau à un groupe multimarques
1.4 Synthèse du modèle « franchisé » (sens de la relation attendu)
F ranchisés multi-unités versus mono-unité
T H E O RI E D ES C O U TS D E T R A NSA C T I O N
- h1 : Actifs spécifiques physiques (+)
- h2 : Actifs spécifiques humains (+)
T H E O RI E D E L ’A G E N C E
- h6 : Niveau d’opportunisme du franchisé (-)
IM A G E D E M A R Q U E
- h5 : Valeur de l’image de marque (+)
PE R F O R M A N C E
- h4a : Performance (C.A. moyen par unité) (+)
- h4b : Performance (résultat net moyen par unité) (+)
A V A N T A G ES C O MPE T I T I FS
- h3a : Uniformité (+)
- h3b : Réactivité aux évolutions locales (-)
- h3c : Adaptation générale du système (+)
V A RI A B L ES D E C O N T R O L E
- Motivation économique (dégager un revenu ou développer un patrimoine)
- Type de développement privilégié (séquentiel vs accord de zone)
Chapitre 2
METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Ce chapitre détaille la démarche de collecte de données à la fois auprès des franchiseurs et des franchisés puis la méthode retenue pour leur analyse dans le cadre 1) de l’étude du poids de la multi-franchise en France (section 1) ; 2) de l’étude qualitative portant sur les pratiques des réseaux (section 2) ; 3) de l’étude relative à l’analyse des déterminants et des conséquences de la multi-franchise (section 3).
2.1 Méthodologie du panorama de la multi-franchise
Si la réalité de la multi-franchise semble aller de soi (elle justifie notre recherche), il serait toutefois peu compréhensible de déployer un appareillage méthodologique lourd pour étudier un phénomène qui se révélerait mineur. Comme il n’existe pas de données sur la multi- franchise en France, la première étape de la recherche a donc consisté à s’assurer de son poids dans les réseaux.
2.1.1 Instrument d’enquête
L’annuaire « Toute la Franchise » édité chaque année par la FFF est une source d’information riche sur les réseaux. Il ne permet toutefois pas d’identifier le nombre de franchisés d’un réseau et encore moins le nombre de franchisés à la tête de plusieurs unités. On ne sait donc pas aujourd’hui quel est le taux de multi-franchise des réseaux français, c'est-à-dire le pourcentage de franchisés des réseaux qui sont à la tête de plusieurs unités.
Nous avons sollicité l’aide de la FFF en octobre 2010 afin de profiter du support de collecte de données que représente son enquête annuelle. A notre demande, la FFF a accepté d’ajouter
à la question principale qu’elle pose chaque année aux franchisés – quel est le nombre
d’unités en franchise dans votre réseau ? – deux questions :
- quel est le nombre de franchisés dans votre réseau ?
- quel est le nombre de franchisés dans votre réseau qui ont au moins deux unités ?
La première question permet de mesurer le nombre moyen d’unités possédés par un franchisé
du réseau : nombre d’unités en franchise du réseau / nombre de franchisés du réseau [a]
La seconde question permet de mesurer le taux de multi-franchise du réseau qui peut-être approché de deux manières :
- nombre de franchisés du réseau ayant au moins deux unités / nombre de franchisés du réseau [b]
- nombre d’unités en franchise du réseau faisant partie d’une mini-chaîne / nombre
d’unités en franchise du réseau [c]
Cette seconde question permet également de mesurer la taille moyenne d’une mini-chaîne dans le réseau : (nombre d’unités en franchise du réseau – [nombre de franchisés du réseau – nombre de franchisés du réseau ayant au moins deux unités]) / nombre de franchisés du réseau ayant au moins deux unité [d].
Nous considérons dans cette recherche que plus un réseau de franchise compte un pourcentage élevé de franchisés à la tête d’au moins deux unités, plus son degré de développement en multi-franchise est élevé. Nous privilégions ce type de mesure ([b]) du taux ou degré de multi-franchise d’un réseau dans le cadre du test de nos hypothèses de recherche et ceci pour trois raisons7 :
- premièrement, la question que se posent les franchiseurs interrogés est bien celle de l’intérêt qu’il y a à laisser leurs franchisés être à la tête de plusieurs unités (viennent ensuite les questions du taux de multi-franchise optimal au niveau du réseau et du taux de multi-unités optimal au niveau du franchisé) ;
- ensuite, il s’agit d’une mesure plus juste du taux de multi-franchise d’un réseau. En raisonnant par l’absurde, on pourrait rencontrer le cas suivant dans un réseau : 100 unités en franchise pour 26 franchisés dont un seul détiendrait 75 unités. Retenir la
7 En revanche, pour le panorama de la multi-franchise en France (cf. Chapitre 3), les mesures [a], [b]
et [d] ont été retenues ; [c] ne l’a pas été pour la raison signalée plus haut.
mesure [c] donnerait un degré de développement en multi-franchise du réseau de 75% avec un seul franchisé multi-unités ;
- enfin, la majorité des travaux empiriques sur la multi-franchise retiennent la mesure [b]. Retenir cette mesure favorise donc la comparaison de nos résultats avec ceux obtenus par les travaux antérieurs.
2.1.2 Collecte des données, échantillon et méthode d’analyse des données
Les résultats obtenus à cette étape ont été complétés par ceux issus de l’enquête postale administrée auprès des réseaux dans le cadre du test du modèle franchiseur (voir ci-dessous, section 3).
Au total, nous disposons d’informations sur 357 réseaux qui représentent 9214 succursales, 21030 unités en franchise, 13813 franchisés dont 2926 qui possèdent au moins 2 unités.
Le panorama de la multi franchise repose sur des analyses descriptives qui ont vocation à dresser un portrait de la multi-franchise selon six variables qui caractérisent les réseaux : le secteur d’activité, l’âge, la taille, le taux de mixité, la durée du contrat, l’appartenance à un réseau multimarques.
L’échantillon et le panorama sont présentés en détail dans le chapitre 3.
2.2 Méthodologie de l’enquête qualitative
Pour réel que soit le phénomène, on peut s’interroger sur son développement : la multi- franchise dans un réseau résulte-t-elle d’un processus décisionnel réfléchi ou d’une fantaisie circonstancielle, voire des deux à la fois ? Afin d’appréhender les motivations d’un réseau de recourir à l’option multi-franchise pour se développer, une enquête exploratoire qualitative a été réalisée auprès d’une xxxxxxxxx x’xxxxxxx xx xx xxxxxxxxx.
2.2.1 Instrument d’enquête
L’enquête qualitative menée avait pour objectif d’identifier :
- les avantages et les inconvénients de l’option multi-franchise,
- les critères d’octroi d’un nouveau point de vente à un franchisé,
- les processus formels et informels en jeu,
- les incidences sur le management du réseau du passage d’une relation franchiseur - franchisé mono-unité à une relation franchiseur - franchisé multi-unités.
L’enquête qualitative menée auprès des franchisés multi-unités avait pour principal objectif de s’assurer que les perceptions exprimées par les franchiseurs correspondaient au vécu des franchisés.
Les guides d’entretien franchiseur et franchisé sont présentés en annexe.
2.2.2 Collecte des données, échantillon et méthode d’analyse des données
Nous avons rencontré les dirigeants et/ou responsables du développement de 12 réseaux qui ont tous été identifiés par l’équipe de recherche. Tous les réseaux interrogés comprenaient des franchisés multi-unités et quatre d’entre eux appartenaient à un réseau multi-enseignes. Nous avons volontairement privilégié une approche multisectorielle et questionné des franchiseurs à des étapes différentes de leur développement (depuis un réseau lancé il y a trois ans à un réseau âgé d’une quarantaine d’année).
Afin d’élargir le spectre des réponses, nous avons fait le choix de ne pas apparier franchiseurs et franchisés. Xxx xxx franchisés multi-unités interrogés appartiennent donc pour cinq d’entre eux à des réseaux différents de ceux des franchiseurs rencontrés ; ils comprennent entre deux unités (de la même enseigne) et 10 unités (d’enseignes et de groupes de franchise différents).
Les entretiens ont duré entre une heure et deux heures trente. Chacun des 18 entretiens réalisés a fait l’objet d’une retranscription intégrale pour analyse. L’analyse des données textuelles ainsi collectées a été réalisée manuellement.
Les résultats de l’étude qualitative sont présentés dans le chapitre 0 x xx xxxxx xx xxxxxxxx xx
xx xxxxx-xxxxxxxxx xx Xxxxxx.
2.3 Méthodologie de l’enquête quantitative
2.3.1 Enquête auprès des franchiseurs
2.3.1.1 Instrument d’enquête
Le test du modèle « franchiseurs » s’appuie sur l’administration d’un questionnaire de
recherche auprès des réseaux de franchise situés en France.
Le questionnaire de recherche a été développé à partir de la revue de la littérature et des entretiens qualitatifs. Il a été testé auprès de plusieurs franchiseurs afin de s’assurer de sa compréhension et que son autoadministration ne dépassait pas 10 à 12 minutes.
Les échelles de mesure du questionnaire franchiseur ainsi que les résultats des analyses de fiabilité et de validité sont détaillées en annexe.
2.3.1.2 Méthode de collecte de données et échantillon
Le questionnaire de recherche a été adressé à tous les réseaux listés dans l’annuaire 2010 de la FFF (133 adhérents et 365 non adhérents). Cette liste de réseaux a été complétée à partir de données réseaux dont les caractéristiques (nom, âge, secteur, durée contrat, etc.) ont été obtenues via des revues professionnelles. Un total de 593 réseaux a ainsi été retenu dans un premier temps.
Le questionnaire de recherche a été adressé par courrier postal début mars 2011 à chacun d’entre eux. Il était accompagné d’une lettre introductive expliquant l’objet de l’étude et offrant aux répondants de recevoir une synthèse des résultats. Une enveloppe T (préaffranchie) pour le retour était également jointe.
La FFF nous avait également fourni une liste complémentaire de 730 réseaux permettant d’approcher le nombre total des réseaux en France. Cette liste présentait néanmoins quelques faiblesses sur lesquelles la FFF nous avait alertées : il s’agissait d’une liste de réseaux n’ayant pas répondu à l’enquête annuelle ; les informations n’avaient pas toujours pu être suffisamment recoupées ; certains des réseaux pouvaient avoir disparu au moment de notre
enquête, etc. Nous avons néanmoins décidé, dans le cadre du panorama de la multi-franchise, d’adresser le questionnaire de recherche à chacun des réseaux de la liste. Très rapidement, il s’est avéré que les limites du fichier telles qu’exprimées par la FFF étaient fondées. Au-delà d’un nombre très réduit de retours (1 % !), de nombreux courriers nous sont revenus qui n’avaient pas pu atteindre leur destinataire (plus de 130 NPAI en quelques jours). En conséquence, nous n’avons pas retenu dans le fichier final de travail les quelques questionnaires retournés par les réseaux de cette liste.
Notre population mère finale est donc constituée des 593 réseaux identifiés initialement.
Deux membres de l’équipe de recherche se sont rendus à Franchise Expo Paris le 22 mars 2011 afin de « mobiliser » les adhérents de la FFF qui n’avaient pas encore répondu à l’enquête. L’accueil qui nous a été réservé a été positif. Un questionnaire et une enveloppe retour ont été déposés auprès des réseaux rencontrés à cette occasion.
Le premier envoi a permis de collecter 119 réponses utilisables.
Une relance par courrier a été opérée courant avril 2011 auprès des 474 réseaux n’ayant pas
répondu au premier envoi. Cela a permis de collecter 42 réponses utilisables supplémentaires.
Une seconde et dernière relance par courrier a été opérée courant mai 2011 auprès des 432 réseaux n’ayant pas répondu au premier envoi et à la relance qui a suivi. Cela a permis de collecter 31 réponses utilisables supplémentaires.
Au total, l’échantillon de la recherche comprend donc 188 réseaux, soit un taux de retour de 31,70% (188/593)8.
8 Le total des réponses obtenues était de 199. Toutefois, 11 réponses n’ont pas été retenues dans l’échantillon final pour les raisons suivantes : impossibilité de distinguer le nombre d’unités en franchise par rapport au nombre de franchisés (4), chiffres mêlant différentes enseignes (3), réseaux ayant moins de trois années d’existence (3), réseau master franchisé (1).
2.3.1.3 Méthode d’analyse des données
Les analyses statistiques et le test du modèle franchiseur ont été réalisés à l’aide du logiciel
SPSS version 19 et du logiciel Mplus.
Les données descriptives de l’échantillon de recherche reposent sur des analyses de fréquence.
Les échelles de mesure ont fait l’objet d’analyses de validité et de fiabilité destinées à s’assurer de la qualité de l’instrument d’enquête. Les construits retenus dans le cadre du test des hypothèses de recherche reposent sur les moyennes arithmétiques des réponses aux items conservés pour chacune des variables au terme des analyses précédentes.
Echelles et résultats des tests de validité et de fiabilité (pourcentage de variance restituée et ratios critiques) sont détaillés en annexe 3b ainsi que les résultats des analyses de corrélation bi-variées entre les construits.
Afin d’estimer le modèle franchiseur dans son ensemble, nous avons eu recours à une analyse causale (path model) à l’aide du logiciel MPLus. Notre modèle comporte une variable censurée médiatrice qui est la proportion de franchisés multi-unités du réseau (par rapport au nombre total de franchisés). Sur 188 franchiseurs constituant l’échantillon de la recherche, 43 (soit 22%) n’ont pas de franchisés multi-unités. La variable médiatrice de notre modèle – le taux de multi-franchise – ne suivant pas une loi normale, nous avons donc appliqué les recommandations de Xxxxxx et Muthen (2006) en estimant un modèle de chemin critique avec des données choisies en utilisant un estimateur de probabilité maximale avec erreurs standards robustes (MLR)9.
Nous avons ensuite divisé l’échantillon de la recherche en cinq groupes puis nous avons recouru à des analyses de variance (ANOVA) afin d’identifier s’il existait des différences de moyennes significatives dans les réponses entre les réseaux selon le groupe d’appartenance.
Cette démarche n’a été appliquée qu’à l’étude du taux de multi-franchise comme déterminant des avantages compétitifs retenus par le modèle de recherche franchiseur (croissance, couverture territoriale, performance, uniformité et coûts de contrôle).
9 En prenant simultanément en compte toutes les relations, l’approche retenue donne des résultats plus robustes qu’une approche en deux temps qui consisterait à d’abord analyser l’impact des déterminants de la multi-franchise pour ensuite s’intéresser à ses conséquences.
Les résultats du test des hypothèses relatives au modèle franchiseur sont présentés chapitre 4 (avantages compétitifs et performance de la multi-franchise) et chapitre 5 (déterminants de la multi-franchise).
2.3.2 Enquête auprès des franchisés
2.3.2.1 Instrument d’enquête
Afin de valider les perceptions exprimées par les franchiseurs, un questionnaire de recherche a été administré auprès des franchisés appartenant aux 188 réseaux ayant répondu à l’enquête franchiseur.
Le questionnaire de recherche franchisé a été développé à partir de la revue de la littérature et des entretiens qualitatifs. Il a été testé auprès de plusieurs franchisés multi-unités afin de s’assurer de sa compréhension et que son autoadministration ne dépassait pas 10 à 12 minutes. Les échelles de mesure du questionnaire franchisé ainsi que les résultats des analyses de fiabilité et de validité sont détaillées en annexe.
2.3.2.2 Méthode de collecte de données et échantillon
Le questionnaire de recherche a été adressé en juin 2011 par courrier à 3970 franchisés appartenant aux 188 réseaux ayant répondu à l’enquête franchiseur. Le questionnaire était accompagné d’une lettre introductive expliquant l’objet de l’étude et offrant aux répondants de recevoir une synthèse des résultats. Une enveloppe T (préaffranchie) pour le retour était également jointe.
Nous avons reçu 424 réponses utiles suite à ce premier envoi.
Trois relances par courrier électronique (avec un lien vers le questionnaire de recherche en
ligne) ont ensuite été opérées auprès des franchisés n’ayant pas répondu au questionnaire.
73 réponses utiles supplémentaires ont été reçues.
Au total, l’échantillon de la recherche compte 497 franchisés (soit un taux de retour de 13,13% si on déduit de la population mère initiale les 185 questionnaires NPAI retournés).
132 sont des franchisés ayant au moins deux unités, parmi lesquels 44 sont des pluri- franchisés. Parmi ces derniers, 18 ont des unités d’enseignes différentes du même franchiseur et 26 ont des enseignes différentes de franchiseurs différents.
2.3.2.3 Méthode d’analyse des données
Les analyses statistiques et le test du modèle franchiseur ont été réalisés à l’aide du logiciel
SPSS version 19.
Les données descriptives de l’échantillon de recherche reposent sur des analyses de fréquence.
Les échelles de mesure ont fait l’objet d’analyses de validité et de fiabilité destinées à s’assurer de la qualité de l’instrument d’enquête. Les construits retenus dans le cadre du test des hypothèses de recherche reposent sur les moyennes arithmétiques des réponses aux items conservés pour chacune des variables au terme des analyses précédentes.
Echelles et résultats des tests de validité et de fiabilité (pourcentage de variance restituée et ratios critiques) sont détaillés en annexe 4b ainsi que les résultats des analyses de corrélation bi-variées entre les construits.
Des analyses de variance (ANOVA) ont été réalisées pour mesurer si les réponses obtenues aux questions liées à l’analyse des comportements, attitude et performance (uniformité, adaptation, chiffre d’affaires moyen ou rentabilité moyenne par unité, opportunisme) différaient significativement selon le profil du franchisé retenu par la recherche.
Pour appréhender le rôle déterminant des investissements spécifiques et de la motivation économique, nous avons recouru à une analyse de régression logistique. Cette méthode est à privilégier lorsque l’on cherche à « évaluer l’impact d’un ensemble de variables sur l’occurrence ou non d’un évènement comme un choix » (Xxxxxx-Xxxxxx et al., 2008). Il s’agissait ici de vérifier si la décision du franchisé de se lancer en multi-unités était liée à sa stratégie économique ou encore au niveau des investissements qu’il avait réalisé dans le réseau.
Les résultats du test des hypothèses relatives au modèle franchisé sont présentés chapitre 4 (avantages compétitifs et performance de la multi-franchise), chapitre 5 (déterminants de la multi-franchise) et chapitre 6 (profils des franchisés multi-unités).
Chapitre 3
PANORAMA DE LA MULTI-FRANCHISE ET MOTIVATIONS DES FRANCHISEURS
Afin de mieux comprendre le développement de la multi-franchise en France, il est important d’appréhender son poids dans les réseaux. C’est le rôle du panorama de la multi-franchise que propose la première partie de ce chapitre (section 1). Nous proposons ensuite, à partir de l’analyse des 18 entretiens qualitatifs, de décrypter les motivations des réseaux qui se développent en multi-franchise (section 2). Une dernière partie porte sur une validation empirique de ces motivations, sur l’analyse du niveau de satisfaction des franchiseurs par rapport à leur stratégie de développement (mono ou multi-franchise) et sur leur intention de poursuivre ou non dans la même voie au cours des prochaines années (section 3).
3.1 Panorama de la multi-franchise
Le portrait de la multi-franchise en France est construit en examinant d’abord les caractéristiques générales de la base de données franchiseurs puis en étudiant les liens entre ces caractéristiques et les pratiques des réseaux en matière de multi-franchise.
3.1.1 Enquête auprès des franchiseurs
Notre base de données pour le panorama est composée de 357 réseaux de franchise comptant 30244 points de vente sur le marché français et présentant les caractéristiques suivantes (tableau 3.1).
Tableau 3.1 - Caractéristiques échantillon panorama
Nombre de réseaux de franchise | 357 |
Moyenne d'âge des réseaux | 14 ans |
Nombre d'unités en propre | 9214 |
Nombre d'unités en franchise | 21030 |
Taux de mixité des réseaux | 70% |
Nombre de franchisés | 13813 |
Nombre de franchisés multi-unités | 2926 |
Taux moyen FMU 1 [b] | 21,18% |
Taux moyen FMU 2 [a] | 1,52 |
Taille moyenne des mini-chaînes [d] | 3,47 |
Le réseau le plus jeune que nous avons observé avait un an d’âge10, le plus ancien se déclare quasi centenaire. La majorité des franchiseurs interrogés ont entre 10 et 30 ans d’activité. La moyenne d’âge est de 14 ans.
Ces entreprises développent des réseaux essentiellement en franchise, avec un taux de mixité
moyen (proportion d’unités en franchise dans le réseau) de 70%.
Les 357 réseaux comptent 9214 unités en propre et 21030 unités en franchisé appartenant à 13813 franchisés, dont 2926 sont des franchisés possédant au moins deux unités dans le réseau. Ce sont ces franchisés multi-unités qui sont au cœur de notre recherche.
Le panorama s’appuie sur plusieurs taux pour approcher le poids de la multi-franchise dans les réseaux :
Taux F M U 1 = nombre de franchisés ayant au moins deux unités / nombre total de franchisés [b]
Taux FMU 2 = nombre d’unités en franchise / nombre total de franchisés [a]
Les taux FMU1 observés dans la base de données franchiseurs varient entre 0 (réseaux
n’ayant aucun franchisé multi-unités) et 75%. La moyenne est de 21,18%. Ce taux moyen
10 Pour rappel, le test du modèle franchiseur a lui été réalisé sur 188 réseaux dont l’âge minimum était
de trois ans.
signifie que 21,18% des franchisés français sont des franchisés à la tête de plusieurs unités. Ce pourcentage représente donc le poids de la multi-franchise en France11.
On observe que 92 réseaux déclarent n’avoir aucun franchisé ayant au moins deux unités dans leur réseau. Ce qui signifie que la multi-franchise concerne 75% des réseaux français. On ne peut donc pas parler d’un épiphénomène !
Certains réseaux ont un taux FMU2 égal à 1 (ce sont les 92 réseaux qui n’ont pas recours à la multi-franchise), tandis que d’autres ont des taux FMU2 dépassant 7. Sur l’ensemble des réseaux étudiés, un franchisé possède, en moyenne, 1,52 unité. Ce chiffre cache toutefois des disparités comme le montrera l’analyse ultérieure sur la taille des mini-chaînes.
Comme nous l’avons noté dans le chapitre 2, un troisième indicateur important pour l’évaluation de l’importance de la multi-franchise est en effet la taille moyenne des mini- chaînes détenues par les franchisés ayant au moins deux unités.
Taille moyenne de la mini-chaîne = (unités en franchise – (nombre de franchisés –
nombre de franchisés multi-unités)) / nombre de franchisés multi-unités [d]
Ce ratio exprime le nombre d’unités que possède, en moyenne, un franchisé multi-unités dans un réseau. Dans la mesure où un franchisé multi-unités détient, par définition, au moins deux unités en franchise, la taille moyenne de la mini-chaîne est toujours égale ou supérieure à 2. Dans la base de données utilisée pour ce panorama, la taille des mini-chaînes varie entre 2 et 22, avec une taille moyenne de 3,47. Un franchisé multi-unités (dans un même réseau) possède donc, en moyenne, entre 3 et 4 unités en franchise.
3.1.2 Analyse des réponses par critère caractéristique
Certaines informations concernant les réseaux étudiés et faisant partie de la base de données collectées peuvent être mises en relation avec les indicateurs de développement de la multi- franchise. Il s’xxxx xx xxxxxxx x’xxxxxxxx, xx xxxx xx xxxxxxxxx, du type de réseau, de son âge, de sa taille, de son taux de mixité et de la durée du contrat.
11 Le panorama ne distingue que les franchisés mono et multi-unités au sein d’un même réseau. C’est l’enquête franchisés qui permettra de distinguer parmi ces derniers ceux qui sont pluri-franchisés.
3.1.2.1 Analyse par secteur d’activité
Dans la base de données, quinze secteurs d’activité ont été identifiés : équipement de la personne, équipement de la maison, alimentaire, commerces divers, services automobile, bâtiment et énergie, coiffure et esthétique, autres services à la personne, services aux entreprises, formation, hôtels, restauration rapide, restauration à thème, immobilier et voyages.
Une classification des réseaux selon l’activité permet de constater le poids de chaque secteur.
Figure 3.1 - Le nombre de réseaux par secteur d’activité
Cette répartition sectorielle montre, sur les 357 réseaux dans la base de données, le nombre total de réseaux dans chacun des quinze secteurs d’activité. Dans le secteur de l’équipement de la personne, par exemple, ce sont les données provenant de 42 réseaux de franchise qui contribuent à l’élaboration de ce panorama.
En termes de type de franchise, 140 réseaux (soit 39% du total des réseaux) sont des franchises de produits, tandis que 217 réseaux (soit 61% des réseaux) ont pour activité principale la prestation d’un service. Parmi les franchises de produits, ce sont les secteurs
commerces divers et équipement de la personne qui comptent le plus de réseaux. Dans le domaine de la franchise des services, les secteurs coiffure et esthétique et autres services à la personne représentent une part importante en nombre de réseaux. Relativement peu de réseaux dans la base de données évoluent dans les secteurs voyages ou formation.
Il est également possible d’évaluer le poids de chaque secteur d’activité en fonction du nombre d’unités dans chaque réseau. Cette répartition permet de lier le secteur d’activité et la taille du réseau (unités en propre et unités en franchise) pour une analyse plus aisée du poids sectoriel.
Figure 3.2 - Les secteurs d’activité et leurs poids en nombre d’unités
Cette répartition par nombre d’unités permet de constater, par exemple, que les réseaux de produits ont, en général, plus d’unités que les réseaux de services puisque 42% des unités étudiées sont dans le domaine de la franchise de produits alors qu’ils ne représentent que 39% des réseaux figurant dans la base de données. Par ailleurs, certains secteurs d’activité sont
composés essentiellement de petits réseaux en termes de nombre d’unités. C’est notamment le
cas des services aux entreprises et de la formation.
Il est ensuite intéressant d’examiner par secteur les différents indicateurs retenus pour décrire la multi-franchise dans le cadre de ce panorama ([a], [b] et [d]). Cette analyse souligne certaines différences sectorielles en matière de développement via la multi-franchise.
Le taux FMU1, qui représente le pourcentage de franchisés multi-unités dans les réseaux, varie de 9,60% (dans le secteur bâtiment et énergie) à 40,96% (dans le secteur de la restauration rapide). Pour rappel, ce taux moyen sur l’ensemble des réseaux de franchise est de 21,18%.
Figure 3.3 - Taux FMU1 par secteur d’activité
Une forte présence de la multi-franchise est constatée dans les secteurs de l’équipement de la personne, des services automobiles, de la coiffure et de l’esthétique, de l’hôtellerie, de la restauration rapide et des voyages puisque plus d’un quart des franchisés dans ces secteurs d’activité ont au moins deux unités.
Il est intéressant de noter que la multi-franchise est moins développée dans la restauration à thème (11,61% en moyenne) alors qu’elle est fréquemment utilisée dans la restauration rapide (plus de 40% en moyenne). Elle est également peu développée dans l’alimentaire, l’équipement de la maison, les autres services à la personne, les services aux entreprises, la formation et l’immobilier.
Pour le taux FMU2, qui représente le nombre moyen d’unités par franchisé (nombre d’unités en franchise / nombre total de franchisés) et qui est de 1,52 sur l’ensemble des réseaux étudiés, des différences existent entre les secteurs d’activité également.
Figure 3.4 - Taux FMU2 par secteur d’activité
Dans le secteur des voyages, ce taux est de 2,14 alors qu’il est de 1,11 dans le bâtiment et l’énergie, de 1,15 dans les services aux entreprises et de 1,19 dans l’immobilier. Comme pour le taux FMU1, la restauration rapide est caractérisée par un taux FMU2 plus élevé que la moyenne tous secteurs confondus.
Compte tenu des écarts importants constatés parmi les différents réseaux dans certains secteurs d’activité, il est intéressant d’analyser la dispersion observée dans l’échantillon (tableau 3.2). L’écart type représente la dispersion au sein du groupe d’entreprises composant le secteur d’activité. Plus l’écart-type est grand et plus la dispersion dans le secteur d’activité en question est importante. Pour le taux FMU1, par exemple, la dispersion est la plus importante dans les secteurs de la coiffure et de l’esthétique, des voyages et de la formation.
Pour le taux FMU2, c’est dans les secteurs de l’alimentaire, des voyages et de la restauration rapide que les écarts sont les plus marqués. Enfin, pour la taille moyenne de la mini-chaîne, les secteurs des voyages, de la restauration rapide et de l’alimentaire enregistrent les plus fortes dispersions.
Tableau 3.2 – Ecarts-types F M U1, F M U2 et taille de mini-chaîne
Secteur d'activité | Nombre de réseaux | Ecart- type taux F M U 1 | Ecart- type taux F M U 2 | Ecart-type taille moyenne mini-chaîne |
Equipement de la personne | 42 | 0,17 | 0,65 | 2,87 |
Equipement de la maison | 27 | 0,18 | 0,77 | 3,08 |
Alimentaire | 28 | 0,19 | 1,38 | 3,46 |
Commerce divers | 43 | 0,16 | 0,35 | 2,16 |
Services auto | 14 | 0,17 | 0,40 | 0,59 |
Bâtiment et énergie | 24 | 0,14 | 0,17 | 0,53 |
Coiffure & esthétique | 34 | 0,26 | 0,67 | 1,13 |
Autres services à la personne | 35 | 0,13 | 0,78 | 1,87 |
Services aux entreprises | 27 | 0,21 | 0,21 | 0,55 |
Formation | 6 | 0,25 | 0,37 | 0,35 |
Hôtels | 7 | 0,19 | 0,35 | 1,03 |
Restauration rapide | 26 | 0,22 | 0,82 | 4,30 |
Restauration à thème | 26 | 0,12 | 0,39 | 1,10 |
Immobilier | 14 | 0,15 | 0,29 | 0,70 |
Voyages | 4 | 0,26 | 0,85 | 5,77 |
Dans l’ensemble, quel que soit l’indicateur étudié, les écarts les plus faibles sont constatés pour les secteurs du bâtiment et de l’énergie, de l’immobilier et des services automobiles. L’analyse sectorielle des indicateurs de la franchise multi-unités est donc assez aisée pour ces réseaux puisque les taux moyens reflètent une bonne homogénéité au sein du secteur.
De fortes dispersions sont observées dans les secteurs des voyages, de l’alimentaire et de la restauration rapide. L’analyse des taux moyens s’avère donc plus délicate pour les réseaux évoluant dans ces secteurs. Il convient alors, pour ces secteurs d’activité, de nuancer les valeurs moyennes qui peuvent cacher en réalité de très fortes disparités (parfois liées à la présence d’un seul réseau « atypique » dans l’échantillon). Ces fortes disparités peuvent expliquer, en partie, les taux de multi-franchise élevés pour les secteurs des voyages et de la restauration rapide.
Le troisième indicateur porte sur la taille moyenne de la mini-chaîne.
Figure 3.5 - Taille moyenne de la mini-chaîne par secteur d’activité
La taille moyenne d’une mini-chaîne sur l’ensemble des réseaux est de 3,47 unités. Il est peu surprenant de voir que cet indicateur est élevé pour la restauration rapide et les voyages, deux secteurs ayant des taux FMU1 importants, indiquant ainsi un recours plus développé à la multi-franchise, mais aussi des écarts-types importants qui reflètent des disparités au sein de ces deux secteurs d’activité.
Il est intéressant de constater une taille moyenne de mini-chaîne de plus de 4 unités dans les secteurs de l’alimentaire et des services à la personne alors que les taux FMU1 sont faibles pour ces deux secteurs. Cette observation signifie que relativement peu de franchisés dans ces secteurs possèdent plus de deux unités, mais que les franchisés multi-unités sont des franchisés de taille importante. L’analyse des écarts-types soutient ce constat. Dans le secteur du bâtiment et de l’énergie et dans celui des services aux entreprises, les mini-chaînes sont plus petites. Celles-ci dépassent de peu deux unités (2,13 et 2,14 respectivement), suggérant, en lien avec les taux FMU1 observés faibles, un recours à la multi-franchise par les franchiseurs de ces deux secteurs.
3.1.2.2 Analyse par type de réseau d’appartenance (mono vs multimarques)
Le panorama repose sur une collecte de données auprès d’enseignes identifiées individuellement. Certaines sont toutefois rattachées à des franchiseurs qui ont un portefeuille de marques. C’est le cas de 42 réseaux qui appartiennent à 29 groupes multimarques. Ces réseaux se trouvent essentiellement dans les secteurs du textile, de l’hôtellerie, de la restauration, du commerce alimentaire et des services à la personne. Les analyses effectuées permettent d’observer des taux de multi-franchise plus élevés dans ces réseaux que dans les réseaux monomarque.
Le taux FMU1 est de 36,01% dans les groupes multimarques et de 18,31% dans les réseaux monomarque.
Figure 3.6 - Taux F M U1 par type de réseau
Les franchisés multi-unités représentent donc une part non-négligeable des franchisés dans les groupes multi-enseignes puisque le taux FMU1 est nettement supérieur au taux FMU1 moyen observé sur l’ensemble de l’échantillon (soit 21,18%). Bien que les données obtenues ne permettent pas d’apporter des précisions chiffrées sur la pluri-franchise (franchisés multi- unités ayant des unités de plusieurs enseignes du même groupe ou de groupes différents), il est probable qu’un certain nombre de ces franchisés multi-unités dans les groupes multi- enseignes sont des pluri-franchisés ayant plusieurs unités d’enseignes différentes du même groupe.
Le même constat s’impose pour le taux FMU2 lors de la comparaison des réseaux multi- enseignes versus mono-enseigne.
Figure 3.7 - Taux F M U2 par type de réseau
Le nombre moyen d’unités par franchisé est plus élevé dans les groupes développant plusieurs enseignes. Un franchisé possède, en moyenne, plus d’unités lorsqu’il adhère à un groupe multi-enseignes que lorsqu’il fait partie d’un réseau mono-enseigne. Le taux FMU2 observé dans les groupes est de 1,81 unité par franchisé alors qu’il est de 1,47 unité pour la catégorie hors-groupe. Ce taux FMU2 dépasse deux unités en moyenne par franchisé pour plusieurs groupes observés.
Bien que les taux FMU soient plus élevés dans les réseaux appartenant à des groupes multi- enseignes, le nombre d’unités exploitées par un franchisé multi-unités, c’est-à-dire la taille moyenne de la mini-chaîne, est légèrement plus élevée dans les réseaux mono-enseigne.
Figure 3.8 - Taille moyenne de la mini-chaîne par type de réseau
Les franchisés multi-unités possèdent ainsi en moyenne légèrement plus d’unités dans les réseaux mono-enseigne que dans les groupes multi-enseignes. Dans les réseaux appartenant à un groupe multi-enseignes, la taille moyenne de la mini-chaîne est de 3,26 unités alors qu’elle est de 3,55 unités dans les réseaux mono-enseigne. Ce constat pourrait s’expliquer par la présence éventuelle de pluri-franchisés dans les groupes multimarques ; il est en effet possible que les pluri-franchisés limitent la taille de chacune de leurs mini-chaînes en raison de la diversification de leurs activités dans plusieurs marques ou réseaux.
3.1.2.3 Analyse par âge du réseau
L’âge du réseau de franchise est également un facteur à prendre en considération pour décrire l’état actuel de la multi-franchise. L’âge de l’entreprise franchiseur et l’âge du réseau peuvent être tous les deux mis en relation avec les différents indicateurs de développement de la multi- franchise. Dans le cadre de ce panorama, les deux critères d’âge (entreprise et réseau) montrent les mêmes tendances. Il semble toutefois plus opportun de retenir l’âge du réseau puisqu’il s’agit du critère d’âge qui traduit le mieux l’expérience du franchiseur dans le développement et la gestion d’un réseau de franchisés.
Parmi les franchiseurs étudiés pour ce panorama, la moyenne d’âge en franchise est de 14 ans avec une majorité (plus de 55%) des franchiseurs ayant entre 10 et 30 ans d’expérience à la tête d’un réseau. Pour rendre plus lisible l’analyse par âge, des tranches d’âge de 5 ans ont été retenues afin de regrouper les réseaux en fonction de leur expérience en franchise.
Le taux FMU1, exprimant le pourcentage de franchisés multi-unités parmi l’ensemble des franchisés, varie entre 10,90% pour les jeunes réseaux ayant 1 à 5 ans d’expérience et 22,22% pour les réseaux les plus expérimentés. Le taux le plus élevé constaté dans l’échantillon est de 26,62% pour les réseaux ayant entre 16 et 20 ans d’activité.
Figure 3.9 - Taux F M U1 par âge du réseau
Trois « temps » semblent se dégager. Tout d’abord, lors de la croissance du réseau (entre 1 et 20 ans), une augmentation constante du taux FMU1 est observée. Le poids de la multi- franchise est multiplié par près de 2,5 pendant cette période. La volonté d’aller vite peut expliquer ce phénomène. Ensuite, le poids la multi-franchise recule pendant une quinzaine d’années (entre 21 et 35 ans) pour atteindre (revenir à ?) un taux plancher de 12,18%. Cela pourrait correspondre à une période pendant laquelle la notoriété et l’expérience du franchiseur lui permettent de recruter aisément de nouveaux franchisés et de moins s’appuyer sur les franchisés multi-unités en place pour garantir le développement du réseau (les premiers franchisés multi-unités peuvent aussi quitter le réseau). Enfin, la part de la multi-franchise repart à la hausse à partir de 36 ans avec une croissance régulière jusqu’à 22,22% pour les réseaux les plus âgés. Il est possible que les franchisés recrutés pendant la deuxième période deviennent à leur tour franchisés multi-unités pendant cette phase de maturité. Nous revenons dans le dernier chapitre sur ce phénomène de vague qui est observé et qui peut faire penser que la multi-franchise pourrait avoir un caractère transitoire.
Pour le deuxième taux, FMU2, qui exprime le nombre moyen d’unités par franchisé, très peu d’écarts sont observés entre les différentes tranches d’âge. Pour les réseaux les plus jeunes, âgés de 1 à 5 ans, le taux FMU2 est de 1,23 unités par franchisé alors que ce taux est de 1,47 pour la tranche 21 à 25 ans.
Figure 3.10 - Taux F M U2 par âge du réseau
Relativement peu de variations dans le taux FMU2 apparaissent avant 40 ans d’activité. Toutefois, pour les réseaux les plus âgés (> 40 ans), le nombre d’unités par franchisé augmente sensiblement. Les taux FMU2 sont de 1,86 unité pour le groupe 41 à 45 ans et de 1,81 unité pour le groupe le plus âgé. Cela signifie qu’un franchisé possède, en moyenne, plus d’unités lorsqu’il fait partie d’un réseau ayant une expérience importante que lorsqu’il adhère à un réseau plus jeune et en phase de lancement ou de croissance. Il est également intéressant de noter que très peu de réseaux ayant moins de 30 ans ont un taux FMU2 dépassant 2 unités alors que cette observation est très fréquente dans les réseaux de plus de 30 ans.
La taille moyenne de la mini-chaîne appartenant à un franchisé multi-unités évolue également
avec l’âge du réseau.
Figure 3.11 - Taille moyenne de la mini-chaîne par âge du réseau
Pour quelques jeunes réseaux, présents essentiellement dans le domaine des services, la taille moyenne de la mini-chaîne peut dépasser les trois unités par franchisé multi-unités. Mais, dans l’ensemble, le nombre moyen d’unités varie entre 2,5 et 3 pendant les trente premières années d’activité (2,47 unités en moyenne pour la tranche d’âge 16 à 20 ans et 3,07 pour la tranche 1 à 5 ans). Ce ratio augmente ensuite à partir du groupe 31 à 35 ans. La taille de la mini-chaîne est de 4,38 unités en moyenne pour les réseaux âgés de 31 à 35 ans. Cette taille moyenne monte même jusqu’à 6 unités par franchisé multi-unités pour les réseaux âgés de 41 à 45 ans.
Comme nous le soulignions en introduction de ce rapport, la multi-franchise n’attend pas le nombre des années. On constate ainsi, ce que décrit bien ce panorama, que la multi-franchise est aujourd’hui un levier de développement utilisé par des réseaux très jeunes. Si les multi- franchisés deviennent donc plus grand en nombre d’unités lorsque les réseaux gagnent en expérience, comme l’indiquent le taux FMU2 et la taille moyenne de la mini-chaîne, dans le même temps, la proportion de franchisés multi-unités par rapport aux franchisés mono-unité semble passer par des phases différentes au cours du cycle de vie du réseau de franchise.
Ces résultats interrogent en fait sur le lien entre âge du réseau et recours à la multi-franchise pour se développer.
3.1.2.4 Analyse par taille de réseau
La taille du réseau peut aussi être liée au recours par un réseau à l’option multi-franchise pour se développer.
Pour l’analyse de la taille du réseau, les unités en propre et les unités en franchise sont prises en considération afin de tenir compte de la taille globale du réseau. Dans l’échantillon étudié, la taille globale du réseau varie entre 2 unités et 900 unités, pour une taille moyenne du réseau de 85 unités (26 unités en propre et 59 unités en franchise). Comme pour les autres critères, la taille du réseau a été mise en relation avec les trois indicateurs de la franchise multi-unités.
Bien que des fluctuations importantes du taux FMU1 soient constatées au sein d’une même taille de réseau, une augmentation de la proportion de franchisés multi-unités est visible lorsque la taille du réseau augmente.
Figure 3.12 - Taux F M U1 par taille du réseau
La tendance linéaire permet de constater une croissance constante et régulière de la proportion des franchisés multi-unités dans le réseau avec l’augmentation de la taille de l’enseigne. Cette tendance linéaire varie entre environ 6% pour les petits réseaux de moins de 10 unités à plus de 35% pour les réseaux de plus de 500 unités. En général, plus la taille globale du réseau est grande, plus les franchisés multi-unités représentent une part importante des adhérents au réseau.
Pour le taux moyen FMU2 qui représente le nombre moyen d’unités détenues par un franchisé
dans le réseau, un lien entre le taux et la taille globale du réseau est également observé.
Figure 3.13 - Taux F M U2 par taille du réseau
Malgré quelques disparités importantes parmi les réseaux ayant le même nombre d’unités dans le réseau ou ayant des comportements atypiques comme, par exemple, ce réseau dans le commerce alimentaire ayant plus de 300 unités avec un taux FMU1 de 85% et un taux FMU2 de 7,20 unités par franchisé, la tendance linéaire permet de lisser les fluctuations et de constater une hausse du taux FMU2 parallèlement à la croissance de la taille du réseau. Ce taux, proche de 1 pour les petits réseaux et suggérant pas ou peu de recours à la franchise multi-unités, est en moyenne proche de 2 unités par franchisé dans les réseaux plus grands ayant plusieurs centaines d’unités.
En ce qui concerne la taille moyenne des mini-chaînes, quelques cas exceptionnels peuvent
être observés dans l’échantillon.
Figure 3.14 - Taille moyenne de la mini-chaîne par taille du réseau
Il s’agit, par exemple, de petits réseaux ayant un seul franchisé qui est franchisé multi-unités et qui possède l’ensemble des unités en franchise du réseau. Ou encore, dans quelques cas isolés parmi les réseaux plus grands, la taille moyenne de la mini-chaîne est de 15 ou de 16. Malgré ces variations de taille des franchisés multi-unités, la tendance linéaire montre une augmentation de la taille des mini-chaînes en parallèle avec la taille globale du réseau. D’une façon générale, les mini-chaînes les plus grandes sont observées dans les réseaux les plus grands. La taille de la mini-chaîne est d’environ 2,5 unités en moyenne pour les petits réseaux et évolue jusqu’à 3,75 unités en moyenne pour les réseaux de plusieurs centaines d’unités.
3.1.2.5 Analyse par taux de mixité du réseau
Le taux de mixité exprime le poids des unités en franchise par rapport au poids des unités en succursales dans un réseau. Ce taux est proche de 0 pour les réseaux ayant très peu de franchisés et il est proche de 100% pour les réseaux composés quasi-exclusivement de franchisés. Dans l’échantillon de référence de 357 réseaux, le taux de mixité moyen observé est de 70%, ce qui signifie qu’en moyenne 7 unités sur 10 dans le réseau sont des unités en franchise. Les réseaux étudiés utilisent donc principalement la franchise pour se développer. Seuls cinq réseaux observés ont un taux de mixité de moins de 10% alors que plus de cinquante réseaux ont un taux de mixité proche de 100%.
Comme pour les autres critères, il est important d’étudier les indicateurs de la multi-franchise à la lumière du taux de mixité franchise-succursale pour ce panorama. Il est à noter toutefois que, parmi les réseaux ayant un taux de mixité très faible (moins de 10% d’unités en franchise sur l’ensemble d’unités de l’enseigne), un des cinq réseaux est composé essentiellement de franchisés multi-unités avec un taux FMU 1 de plus de 69%. La présence de ce réseau dans l’échantillon pour l’analyse par le taux de mixité modifie sensiblement les données pour la catégorie de franchiseurs ayant taux de mixité entre 0 et 10% et peut donc expliquer les résultats élevés pour les trois indicateurs de la franchise multi-unités pour l’ensemble de la catégorie 0 à 10% de taux de mixité. C’est la raison pour laquelle la catégorie taux de mixité de moins de 10% est écartée de la présente analyse. Une tendance plus claire semble, en effet, se dessiner à partir de la catégorie 11% à 20% de taux de mixité.
.
Le taux moyen FMU1 pour l’ensemble de l’échantillon est de 21,18%, mais des variations
importantes de taux existent en fonction de la mixité franchises-succursales.
Figure 3.15 - Taux F M U1 par taux de mixité du réseau
Dans les réseaux ayant une minorité d’unités en franchise par rapport aux unités en propre, la proportion de franchisés multi-unités est inférieure à 20% et se situe d’une manière générale entre 15% et 18%. Une nette hausse du taux FMU1 est constatée dans les réseaux dès qu’ils atteignent un taux de mixité dépassant 50%. Le taux FMU1 monte à près de 30% pour les réseaux ayant un taux de mixité entre 51% et 60% et grimpe même jusqu’à 35,57% pour la catégorie 61% à 70% d’unités en franchise dans le réseau. Une baisse de la proportion moyenne de franchisés multi-unités est enfin observée à partir du seuil de 70% de taux de mixité. Dans les catégories ayant un taux de mixité entre 71% et 100%, les taux moyens FMU1 sont respectivement de 19,74%, 17,87% et 17,71%. En moyenne, la proportion de franchisés multi-unités dans le réseau est donc la plus importante pour les entreprises se situant dans la fourchette de 50% à 70% des unités en franchise.
Plusieurs éléments d’analyse pourraient expliquer ce lien entre le taux de mixité et le taux FMU1. Pour les réseaux ayant relativement peu recours à la franchise (avec un taux de mixité de moins de 40%), les modes de développement de la franchise (dont la FMU) sont assez peu
explorés, l’accent étant mis sur l’acquisition d’unités en propre. Pour les réseaux ayant un taux de mixité beaucoup plus important (plus de 70%), les franchiseurs semblent adopter une vision « originelle » de la franchise (c’est-à-dire une unité = un franchisé). Il est possible que la franchise mono-unité soit le mode de développement privilégié dès la création de ces réseaux. Toutefois, entre ces deux groupes de franchiseurs, ceux ayant un taux de mixité entre 40 et 70% présentent des caractéristiques intéressantes. Ces franchiseurs semblent diversifier le plus leurs modes de développement de façon à saisir les opportunités telles qu’elles se présentent : le choix de gérer certaines unités en propre, le recrutement de nouveaux franchisés et l’octroi d’unités supplémentaires à des franchisés existants.
Pour le second taux de franchise multi-unités qui représente le nombre moyen d’unités par franchisé dans un réseau, des pics importants sont également constatés pour les réseaux ayant entre 50% et 70% d’unités en franchise.
Figure 3.16 - Taux F M U2 par taux de mixité du réseau
Alors que le taux FMU2 moyen sur l’ensemble de l’échantillon est de 1,52, ce taux moyen ne dépasse pas 1,40 pour les réseaux ayant moins de 40% ou plus de 70% d’unités en franchise. Pour les réseaux ayant entre 51% et 60% d’unités en franchise, chaque franchisé est, en moyenne, à la tête de 1,72 unités. Pour les réseaux ayant un taux de mixité de 61 à 70%, le nombre d’unités moyen par franchisé est de 1,81.
En analysant les deux taux de franchise multi-unités, que ce soit la proportion de multi- franchisés dans le réseau ou le nombre d’unités détenues en moyenne par chaque franchisé, un constat s’impose : la multi-franchise semble être utilisée davantage par les franchiseurs adoptant un taux de mixité entre 50% et 70% que par les autres franchiseurs. Ce lien pourrait s’expliquer par la diversification des modes de développement de cette catégorie de franchiseurs.
La taille de la mini-chaîne gérée par un franchisé multi-unités peut également être mise en relation avec le taux de mixité du réseau. Sur l’ensemble de l’échantillon, la taille moyenne de la mini-chaîne est de 3,47 unités par multi-franchisé.
Figure 3.17 - Taille moyenne de la mini-chaîne par taux de mixité du réseau
La taille moyenne de la mini-chaîne la plus importante (3,84) est observée pour la catégorie de franchiseurs ayant entre 41% et 50% de leur réseau en franchise. C’est dans cette catégorie de mixité que les franchisés multi-unités ont le plus d’unités. Alors que des variations sont constatées pour les réseaux composés de moins de 40% d’unités en franchise, la taille moyenne de la mini-chaîne diminue de façon régulière à partir de 50% d’unités en franchise dans le réseau. Par rapport aux taux FMU1 et FMU2, la tendance linéaire descendante confirme la baisse de la taille moyenne de la mini-chaîne avec l’augmentation du taux de mixité du réseau de franchise.
3.1.2.6 Analyse par durée du contrat
Le dernier critère à être mis en relation avec les indicateurs de la multi-franchise est la durée du contrat de franchise. Dans l’échantillon observé, la durée du contrat varie entre 1 an (pour un seul réseau) et 20 ans (pour un seul réseau également). La plupart des réseaux (86% de l’échantillon) proposent des contrats d’une durée allant de 5 à 9 ans. La durée moyenne du contrat est de 6 ans.
Pour la clarté des analyses, les deux cas extrêmes notés plus haut ont été écartés. Le réseau ayant un contrat de 1 an et celui ayant un contrat de 20 ans représentent 48 et 20 unités respectivement ; ils n’ont ni l’un ni l’autre de franchisé multi-unités. Parmi les cinq réseaux ayant des contrats de 2 ans (3 réseaux) ou de 12 ans (2 réseaux), des comportements atypiques ont été observés. Les taux FMU1 exceptionnellement élevés (48%, 50% et 67%) pour trois des cinq réseaux pourraient effectivement biaiser les analyses en ce qui concerne la durée du contrat de franchise. Ces cinq réseaux ont donc été écartés de l’analyse également. En supprimant ces deux extrêmes (contrats de 1 an et de 2 ans et contrats de 12 ans et de 20 ans), 98% des réseaux de l’échantillon ont été pris en considération par les analyses qui suivent.
En observant le taux FMU1 qui représente le poids des franchisés multi-unités par rapport à l’ensemble des franchisés, il s’avère que les réseaux proposant les contrats les plus longs sont également ceux qui ont la proportion de franchisés multi-unités la plus importante.
Figure 3.18 - Taux F M U1 par durée du contrat
Les franchisés multi-unités ont un poids important dans les réseaux développant des relations contractuelles de 9 et de 10 ans (25% et 24,69% respectivement). Dans le groupe majoritaire des réseaux proposant des contrats de 5 à 9 ans (soit 86% de l’ensemble des réseaux), seuls les franchiseurs avec un contrat de 7 ans ont, en moyenne, une proportion de franchisés multi- unités inférieur à 20%. La tendance linéaire montre, de plus, une augmentation de la proportion des franchisés multi-unités dans un réseau avec l’allongement de la durée du contrat de franchise.
Le taux FMU2, c’est-à-dire le nombre moyen d’unités par franchisé, est le plus élevé pour les réseaux développant des contrats de 3 ans (1,54 unité), 9 ans (1,60 unité) et 10 ans (1,56 unité).
Figure 3.19 - Taux F M U2 par durée du contrat
Comme pour le taux FMU1 (pourcentage de franchisés multi-unités dans le réseau), les réseaux se développant avec un contrat de 9 ou de 10 ans sont ceux pour lesquels les franchisés possèdent, en moyenne, le plus d’unités. Les taux les moins élevés sont constatés également dans les groupes de franchiseurs proposant des contrats de 4 ans (1,15 unité par franchisé) et de 7 ans (1,23 unité par franchisé). La tendance linéaire exprime aussi une légère augmentation du nombre moyen d’unités par franchisé avec l’augmentation de la durée du contrat de franchise.
Pour la taille moyenne de la mini-chaîne, le groupe des réseaux ayant une durée de contrat de 3 ans semble avoir les mini-chaînes les plus grandes (5,69 unités en moyenne par franchisé multi-unités).
Figure 3.20 - Taille moyenne de la mini-chaîne par durée de contrat
Parmi la quinzaine de réseaux proposant une durée de contrat de 3 ans, la moitié ne possède pas de franchisé multi-unités et, pour un seul des réseaux, la taille moyenne de la mini-chaîne est de plus de 15 unités. Il s’agit donc d’un cas exceptionnel qu’il convient de souligner. L’importance apparente de la catégorie de réseaux ayant des contrats de 3 ans peut être nuancée puisque, sans ce réseau, la taille moyenne de la mini-chaîne serait d’environ 3 unités par franchisé multi-unités. Dans ce cas, la taille moyenne de la mini-chaîne serait la plus petite dans les réseaux proposant des contrats de 6 ou de 7 ans et la plus grande pour les réseaux proposant des contrats soit de 4 ans, soit de 9 ou de 10 ans. En gommant la présence du réseau atypique ayant une taille moyenne de la mini-chaîne de 15,17, la tendance linéaire serait quasiment nulle pour l’analyse de la taille moyenne de la mini-chaîne en fonction de la durée du contrat de franchise.
3.2 Motivations et processus de développement en multi- franchise : l’enquête qualitative
Dans un objectif d’affiner le portrait de la multi-franchise et de décrypter le processus décisionnel au sein des réseaux qui y recourent pour se développer, une série d’entretiens semi-directifs a été réalisée. Ces entretiens permettent d’approfondir notre compréhension de la multi-franchise en apportant des précisions quant à ses conditions de développement et en dévoilant les motivations et les freins qui conduisent les franchiseurs à la choisir (ou pas) pour se développer.
3.2.1 La multi-franchise, décision stratégique et problématiques managériales
Dans le cadre des entretiens qualitatifs, le développement en multi-franchise est abordé assez spontanément par les différents acteurs de la franchise. Leurs propos permettent, d’une part, de mieux comprendre le choix d’accorder le droit d’ouvrir plusieurs unités à un même franchisé et, d’autre part, d’aborder les problématiques relatives à la gestion d’un réseau composé de franchisés multi-unités.
3.2.1.1 Le choix du recours à l’option multi-franchise
Plusieurs franchiseurs ont justifié leur choix de la multi-franchise en expliquant tout simplement que c’est une « formule » qui permet de garantir le développement de leur réseau : « Une enseigne qui se développe, c’est une enseigne qui est vivante, et une enseigne qui ne se développe plus, c’est une enseigne qui meurt ». La multi-franchise est donc un vecteur de croissance du réseau : « Pour nous, c’est formidable. Pourquoi ? Parce que ça permet d’accélérer le développement… C’est beaucoup plus facile d’ouvrir une nouvelle boutique avec un partenaire existant que d’en ouvrir une avec un nouveau ».
Cette capacité de l’option multi-franchise d’assurer une croissance rapide et relativement aisée semble attirer plusieurs franchiseurs. Un franchiseur nous explique qu’ « en développant le profil d’opérateur plus que d’investisseur, on a développé des vocations, et on a des gens
qui, sur les dix derniers partenaires qu’on a recrutés et qu’on a validés l’année dernière, à qui on a attribué un site, il y en a 9 avec qui on travaille sur le développement d’un second…il y a vraiment une volonté de nos partenaires de se développer ».
Pour certains franchiseurs, le développement en multi-franchise fait partie d’une vision stratégique du réseau qui s’avère « évidente » dès l’origine du réseau : « Quand on attribue un site à un partenaire franchisé, on a déjà en tête, derrière, le deuxième, le troisième, le quatrième site qu’on pourrait lui attribuer…on cherche des gens qui auront plusieurs sites » raconte un franchiseur ou encore, « dès le début, on cherche en priorité des partenaires qui veulent en avoir plusieurs ».
Plusieurs franchiseurs expliquent donc le caractère « prévisionnel » de la multi-franchise et soulignent qu’il est important d’envisager la multi-franchise dès le départ du développement en franchise si le réseau souhaite, à terme, ouvrir plusieurs centaines d’unités : « On recherche des opérateurs multi-sites. Pour nous, aujourd’hui, on ne peut pas, à terme, si on a 400, 500 restaurants, avoir 500 franchisés. On ne peut pas gérer un réseau de franchisés avec autant de personnes ».
La multi-franchise est donc un levier de management de son réseau par le franchiseur : « En termes de qualité de gestion, si on a 500 personnes, on ne peut plus connaître tout le monde. Ce n’est plus possible… C’est pour ça qu’avec des franchises avec 500, 600 partenaires franchisés différents, c’est difficilement envisageable ».
Pour d’autres franchiseurs, le choix de la multi-franchise s’est fait au fur et à mesure du développement du réseau et plutôt suite à la demande des franchisés. Pour un des responsables, « il n’y avait pas de réelle volonté stratégique, tout en sachant quand même qu’on a anticipé cette possibilité de donner la possibilité aux candidats franchisés d’avoir plusieurs magasins… c’est vraiment venu du franchisé cette demande ».
Le choix de se développer en multi-franchise pourrait également s’expliquer par la rareté des candidats sérieux à la franchise, d’où le désir d’ « optimiser » les franchisés déjà en place dans le réseau. Un franchiseur explique ainsi qu’un bon franchisé « ne court pas les rues… et il y en a avec qui ça a très bien marché puisqu’on parle d’un franchisé historique qui a désormais 7 points de vente ».
3.2.1.2 Le management de la multi-franchise
Compte tenu de la complexité des réseaux ayant à la fois des franchisés mono-unité, des franchisés multi-unités et des gérants salariés des unités en propre, de nombreuses questions se posent quant au management d’un tel réseau. Ces questions sont relatives :
- à la qualité de la relation franchiseur-franchisé
- aux critères de sélection et d’octroi d’une nouvelle unité,
- à la fidélisation des franchisés
- au nombre « optimal » d’unités par franchisé
- à la dispersion géographique des unités.
En comparant les franchisés mono-unité aux franchisés multi-unités, les franchiseurs
déclarent, en général, qu’il n’y aucune différence dans la relation franchiseur-franchisé ou que
« l’objectif, c’est qu’elle soit identique » quel que soit le statut du franchisé. Un franchiseur explique qu’il n’y a pas d’avantages préférentiels pour le franchisé ayant plusieurs points de vente : « Il n’y a pas de discrimination… qu’on attribue à un partenaire déjà existant ou à un nouveau le prix du deal sera le même » ou encore, en ce qui concerne la relation franchiseur- franchisé, « elle est la même. On a en face de nous un franchisé… Je les considère tous à égalité devant moi ».
Il peut toutefois y avoir dans certains réseaux quelques différences en termes de remise sur les achats ou d’animation du réseau. Un de nos interlocuteurs explique ainsi que les conditions sont « identiques en termes contractuels, en termes de royalties… ». La relation n’est pas différente, constate un franchiseur, mais « l’animation c’est un peu différent puisqu’on ne sait pas si on doit s’adresser au franchisé ou au responsable de point de vente ». A l’inverse, un autre indique appliquer « des droits d’entrée dégressifs puisqu’il y a des choses que l’on fait en moins. Forcément, on a affaire à quelqu’un d’expérimenté, donc l’assistance est quand même moindre… on ne veut pas faire moins mais il y a des choses qui sont déjà acquises ».
Concernant le profil des franchisés, certains franchiseurs pensent que le franchisé multi-unités est plus « entrepreneurial, par définition » qu’un franchisé choisissant de ne développer qu’une seule unité : il est plus entrepreneur « parce qu’il est à la recherche de plus d’analyses,
de rationnel, d’optimisation. Celui qui reste avec un seul magasin, il s’en occupe mais il est
plus sur la notion de plaisir ».
La transparence semble être pratiquée par les franchiseurs en matière de développement de la multi-franchise puisque les critères nécessaires au développement de plusieurs unités sont généralement connus à l’avance par l’ensemble des franchisés : « ils connaissent les critères en avance… ils reposent sur les postulats logiques du développement d’un business… c’est ce qu’on attend d’un entrepreneur en franchise ». La réussite financière et commerciale d’une première unité s’avère donc être une condition nécessaire à toute négociation d’une unité supplémentaire.
La multi-franchise est aussi un moyen de stimuler les franchisés ou de récompenser les meilleurs franchisés du réseau, c’est-à-dire ceux ayant connu la réussite à la tête d’une ou plusieurs unités. Un des franchiseurs explique ainsi son état d’esprit lorsqu’il décide de ne pas « donner » une unité à un franchisé déjà sur la zone : « Aujourd’hui tu ne nous as pas montré ce que tu pouvais faire… on préfère l’ouvrir en succursale aujourd’hui » ou encore
« un franchisé qui ne fonctionne pas bien, on ne lui donnera pas l’opportunité de se développer… » en multi-unités, une façon de « stimuler en quelque sorte le franchisé ». Un autre franchiseur explique que « c’est une récompense, mais c’est aussi eux qui investissent, c’est eux qui prennent les risques… c’est une façon de soutenir leur travail ».
On attend donc des franchisés qu’ils aient déjà « fait leurs preuves » avant de pouvoir envisager d’ouvrir un autre point de vente. Dans ce sens, la plupart des franchiseurs interrogés semblent vouloir éviter les accords de développement de zone en privilégiant l’ouverture des points de vente de façon successive en fonction des résultats des unités précédentes. Un seul déclare préférer les accords de développement de zone et explique « on essaye quand même de le contractualiser dès le départ, pour justement avoir la maîtrise des choses. Qu’est-ce que vous voulez faire, combien de boutiques vous voulez ouvrir, en combien de temps ? »
En ce qui concerne la pluri-franchise, c’est-à-dire la possibilité laissée à un franchisé de développer plusieurs unités dans des réseaux différents, les franchiseurs semblent être plutôt réticents à l’égard de cette stratégie. En demandant s’ils acceptaient cette possibilité, un des franchiseurs répond « non, on demande, nous, une exclusivité d’activité à tous nos partenaires » ou encore un autre : « non… on n’est pas du tout un concept de franchise
d’investissement ». D’autres déclarent ne pas pouvoir vraiment s’y opposer, mais ils estiment que ce n’est « pas vraiment compatible avec les exigences du réseau ».
Dans l’optique de bien gérer l’ensemble du réseau, les franchiseurs interrogés soulignent surtout l’importance de limiter le nombre d’unités appartenant à un seul franchisé. Plusieurs récits permettent d’en expliquer les raisons : « En dépassant un certain niveau d’unités, on retombe dans des travers du franchiseur. Après, à charge pour lui de faire comme nous en tant que succursales, de trouver les bons partenaires pour l’aider » ; « Dans le cadre du contrat, on a effectivement limité à trois magasins possibles. Dès le départ, trois mais pas davantage » ;
« On estime que la vitesse de croisière, on veut éviter aussi les baronnies, comme on a pu le voir dans plusieurs autres enseignes, est autour de cinq. Après, ça peut dépendre des qualités intrinsèques du partenaire, de sa localisation géographique » ; « Je ne suis pas dans la logique de refuser des investisseurs, mais je veux vraiment des personnes qui soient dans l’opérationnel… et quand on a beaucoup de magasins, on ne peut pas être dans cette logique- là. » ; « On va essayer, toujours, de respecter par contrat un ratio maximum, c’est qu’on ne veut pas qu’il y ait un de nos partenaires franchisés qui possède plus de 5% à lui tout seul du réseau… il y a beaucoup de réseaux qui sont morts parce que les deux plus gros ou les trois plus gros partenaires franchisés se sont associés ensemble pour créer une enseigne concurrente ».
Le fait de limiter le nombre d’unités par franchisé est également lié à la dispersion géographique des unités. Un franchiseur limite ainsi la distance entre les points de vente appartenant à un même franchisé en justifiant : « On est pragmatiques, mais on estime qu’il ne doit pas y avoir plus d’une heure de trajet entre les unités appartenant à un même franchisé ». Au-delà de la contrainte liée à la distance, un autre franchiseur explique vouloir éviter d’avoir un seul franchisé sur une même grande ville : « je ne mettrais jamais un même franchisé sur une même ville. Xxxx je sais que ce n’est pas simple… mais je ne veux pas prendre le risque de mettre une grande ville sur une même tête ». La gestion de la dispersion géographique des unités d’une mini-chaîne semble donc être un sujet d’importance pour les franchiseurs.
3.2.2Avantages et limites de la multi-franchise
Pour avoir une bonne vision des motivations liées au recours à la franchise multi-unités, il est essentiel de connaître les avantages et les limites de ce mode de développement.
3.2.2.1 Les avantages
Comme évoqué précédemment, les franchiseurs interrogés citent spontanément comme avantage le fait de pouvoir développer le réseau grâce à la multi-franchise : « Ce qu’on recherche, c’est des partenaires multi-sites, qui vont pouvoir se développer, nous aider à développer la marque dans toute la France, et, fort de ce développement, vont aussi multiplier leurs ressources et leurs dividendes ».
L’avantage au plan stratégique, selon un franchiseur, c’est d’« accélérer le développement » du réseau. La multi-franchise permet donc « d’aller plus vite et de se positionner par rapport à la concurrence éventuelle pour occuper le terrain ». Cette notion de développement rapide apparaît donc comme un avantage important pour les franchiseurs.
Les avis des franchiseurs sont toutefois divergents en ce qui concerne la performance de la multi-franchise par rapport à la mono-franchise. Un franchiseur explique : « Cela peut augmenter la performance… mais le vrai avantage, c’est qu’il va pouvoir additionner les résultats de chaque boutique, mais il ne va pas pouvoir augmenter le résultat de chaque boutique parce qu’il en a ouvert trois de plus. C’est important de le signaler aux franchisés parce qu’ils pensent tous l’inverse ». Un autre précise : « Dans un premier temps, il est moins performant parce qu’il apprend son métier de manager multi-sites et il se perd, il cherche des automatismes. Par contre, dans un deuxième temps, la mutualisation fait que la rentabilité est plus importante. C’est la mutualisation des moyens, du savoir-faire, de la trésorerie, des approvisionnements, qui fait qu’il devient performant ».
Selon certains franchiseurs, il y a également « une question de rentabilité » qui est avantageuse pour le franchiseur comme pour le franchisé. Un responsable explique : « s’il y a cinq boutiques, on ne va pas tout refaire cinq fois. On mutualise les choses. C’est intéressant
pour tout le monde d’avoir plusieurs points de vente, dans un laps de temps raisonnable, ça
permet en effet de rentabiliser les efforts ».
Certains franchiseurs tendent à croire que les points forts de la multi-franchise sont davantage commerciaux que financiers. Interrogé par rapport aux avantages financiers de la multi- franchise, un franchiseur déclare : « Je ne vois pas d’avantage financier… c’est plus un avantage en termes de savoir-faire et de maillage du territoire ».
La transmission du savoir-faire semble, en effet, se faire de façon plus rapide et plus aisée avec chaque unité successive. A une question concernant le transfert du savoir-faire, un franchiseur répond : « Oui, là vraiment c’est formel. Il n’y a plus ce travail dans la sélection ou le recrutement… c’est du juridique, du contractuel… ».
Lors de l’ouverture d’un nouveau point de vente, un autre franchiseur dit : « il y a une meilleure compréhension du marché sans doute de la part du franchisé » qui s’explique par le savoir-faire déjà acquis lors d’une première unité. Ou encore, « c’est avant tout la standardisation du savoir-faire, c’est évident… Il y a un savoir-faire qui peut être mis immédiatement en place parce qu’il le maîtrise ».
Certains franchiseurs soulignent, en outre, des avantages liés à la logistique. Pour un réseau, dans lequel les coûts logistiques sont importants, le franchiseur considère que « plus on fait du volume, plus on optimise et plus on réduit… Donc, en optimisation logistique, c’est intéressant. Donc ça c’est le premier avantage ».
Il semblerait également que les franchisés multi-unités acceptent plus facilement les changements qui sont imposés par le franchiseur. Ils s’opposeraient moins à leur franchiseur que des franchisés mono-unité. Selon un franchiseur, « c’est un gage de sécurité… paradoxalement, ils deviennent de plus en plus intégrés du moment où ils ont plus d’unités… plus ils grossissent, et plus ils rentrent dans le moule ».
Des avantages peuvent aussi exister en matière de formation : « Il y a une économie importante en formation… et quand la personne a ouvert son deuxième magasin, elle était opérationnelle et le magasin a tout de suite eu beaucoup de succès ». De plus, raconte un autre, « le franchisé a déjà fait ses preuves et quand il ouvre il est déjà formé, il sait
exactement comment cela fonctionne, il sait exactement dans quelle enseigne il est, il y a un capital confiance parce que quand il veut ouvrir un deuxième magasin, c’est une récompense pour nous aussi… une reconnaissance pour nous tous ».
Par rapport au développement d’unités en propre, la multi-franchise présente une certaine flexibilité dans le domaine de la gestion des ressources humaines : « il y a de la souplesse, tout de même, en termes d’équipes. Puisqu’on structure mieux les équipes, il y a plus de monde, donc il y a une dynamique et une stimulation ».
Il semblerait également qu’il soit plus facile pour un franchiseur de contrôler un franchisé multi-unités qu’un franchisé mono-unité. Un des franchiseurs interrogés explique : « Pourquoi il est plus facile ? Parce que celui qui a une boutique, il est dedans, donc c’est beaucoup plus difficile de lui dire que le travail est mal fait, on a de mauvais retours sur l’accueil, parce qu’il va nous dire « vous rigolez, l’accueil c’est moi », tandis que celui qui en a plusieurs…il va nous dire « vous faîtes bien de me le dire ! Parce que je vais redresser mes équipes avec les informations que j’ai ».
3.2.2.2 Les limites
Tous les franchiseurs rencontrés s’accordent à souligner une limite importante liée à la taille de la mini-chaîne appartenant à un franchisé. Mais ils n’ont pas forcément le même avis en ce qui concerne le nombre optimal (« idéal » pour reprendre l’expression de l’un d’entre eux) d’unités par franchisé multi-unités.
Les franchiseurs se trouvent face à un vrai problème en ce qui concerne la détermination de ce nombre d’unités. Des questions de baronnies et de concurrence au sein du réseau peuvent effectivement se poser et influencer leur choix. Le témoignage suivant est illustratif du ressenti exprimé par plusieurs de nos interlocuteurs : « On arrive à la limite dont on a parlé, qu’on estime à 4, 5, 6, on va dire, c’est que, il s’est retrouvé dans les mêmes travers que nous… Pourquoi nous, aujourd’hui, on développe l’enseigne en franchise ? Parce qu’on a besoin d’opérateurs, d’opérationnels. Et qu’est-ce qu’on s’est aperçu avec ce premier opérateur qui avait 7 sites, c’est qu’il est tombé dans les travers qui sont les nôtres… il a créé un siège, un mini-siège, avec un directeur des ressources humaines, un directeur des
opérations, un directeur marketing… il n’était plus dans ses points de vente… donc il s’est
éloigné du terrain ».
Ainsi, au-delà d’un certain nombre d’unités, le jeu de la concurrence dans le réseau peut perdre en efficacité : « si on est dans une région où il y a six restaurants… si je confie trois restaurants à un franchisé, et trois autres à un franchisé, chaque franchisé aura trois restaurants. Ou est-ce que je confie ces six restaurants à un même franchisé ?... Ils sont en concurrence… Quelqu’un qui en a six, il peut atteindre un niveau qui sera très confortable et qu’est-ce qui va le pousser à investir dans le marketing local s’il se contente de ce qu’il a aujourd’hui ? Alors que si il n’en a que trois, s’ils en ont trois chacun… ils auront moins d’aisance financière, donc ils vont continuer à se battre pour gagner encore plus d’argent ».
Par ailleurs, un franchiseur avoue « prendre inconsciemment en considération le poids d’un franchisé dans le réseau, surtout dans la façon de négocier et de gérer la relation au quotidien ».
Un autre franchiseur considère qu’un nombre trop important d’unités par franchisé peut aussi conduire le franchiseur vers des limites en termes de gestion car, pour lui, « le vrai problème, c’est le management à distance ».
Compte tenu de ces problèmes liés au nombre d’unités gérées par un même franchisé, les
franchiseurs préfèrent en général limiter la taille des mini-chaînes au sein de leur réseau.
L’analyse des entretiens qualitatifs réalisés auprès des acteurs de la franchise, ainsi que le panorama proposé dans la première section, permettent d’établir un portrait de la multi- franchise et de mieux comprendre pourquoi et comment certains franchiseurs choisissent de recourir à ce mode de développement. Les analyses qui suivent vont s’attacher à valider empiriquement plusieurs des intuitions et avis exprimés par nos interlocuteurs.
3.3 Motivations, satisfaction et intentions
Nous nous sommes attachés à mesurer le poids de chacune des motivations pour la multi- franchise identifiées à travers l’enquête qualitative. Nous avons également interrogé les franchiseurs sur leur niveau de satisfaction quant à la stratégie qu’ils avaient jusqu’ici privilégiée (mono ou multi-franchise) et sur leur intention d’y recourir dans les prochaines années.
3.3.1 Avantages et limites de la multi-franchise : validation empirique
Il a été demandé aux franchiseurs (n = 188) de noter sur une échelle de 1 à 7 une dizaine d’items relatifs aux avantages du développement en multi-franchise (tableau 3.3) puis de nous dire s’ils pensaient qu’un franchisé à la tête de plusieurs unités avait un niveau de performance supérieur à un franchisé mono-unité (tableau 3.4).
Croissance et maillage du territoire de vente sont les deux principaux avantages reconnus à la multi-franchise. Il s’agit également des deux critères pour lesquels l’écart-type est le plus faible, ce qui suggère un certain consensus parmi les répondants.
Viennent ensuite la possibilité de faire des économies en termes de coûts de recrutement et aussi de pouvoir faire appliquer plus rapidement au plan local les décisions prises par la tête de réseau (on retrouve là une des observations faites par Xxxxxxx [1995] dans le cas de la multi- franchise aux Etats-Unis).
La multi-franchise représente ensuite un levier pour attirer des candidats à l’entrée dans le réseau. Lors de plusieurs entretiens, des franchiseurs nous ont signalé que la possibilité offerte de pouvoir ouvrir plusieurs unités dans le réseau était de plus en plus souvent un élément de la négociation avec les candidats à l’entrée dans le réseau. Pour certains franchisés, c’est la condition pour qu’ils puissent retrouver le niveau de vie qu’ils avaient avant de se lancer en franchise.
La multi-franchise permet aussi de récompenser/fidéliser les franchisés en place, dont les résultats sont satisfaisants et qui expriment le désir de se développer.
Tableau 3.3 - Avantages/inconvénients du développement en multi-franchise
Octroyer plusieurs unités à un franchisé… | Moyenne échantillon total (n = 180) | Ecart- Type échantillon total (n= 180) | Moyenne réseaux pratiquant la M F (n= 139) | Moyenne réseaux ne pratiquant pas la M F (n=41) |
- …permet de croître plus vite | 5,45 | 1,177 | 5,55 | 5,12 |
- …permet de récompenser les meilleurs | 4,88 | 1,532 | 4,91 | 4,78 |
franchisés | ||||
- …permet de mailler de façon cohérente le | 5,47 | 1,182 | 5,58 | 5,07 |
territoire | ||||
- …permet de faire des économies en termes | 5,03 | 1,592 | 5,01 | 5,10 |
de coûts de recrutement | ||||
- …permet d’attirer des candidats à l’entrée | 4,80 | 1,479 | 4,77 | 4,90 |
dans le réseau | ||||
- …permet de faire des économies en termes | 4 ,40 | 1,641 | 4,28 | 4,80 |
de coûts de management / contrôle du | ||||
réseau | ||||
- …permet de faire des économies en termes | 4,37 | 1,578 | 4,27 | 4,68 |
de coûts de formation des franchisés | ||||
- …permet de faire appliquer plus | 5,07 | 1,266 | 5,00 | 5,29 |
rapidement au plan local les décisions | ||||
prises par le franchiseur | ||||
- …présente un risque de perte de pouvoir | 4,33 | 1,660 | 4,32 | 4,37 |
pour le franchiseur |
Tableau 3.4 - Multi-franchise et performance
Par rapport à un franchisé à la tête d’une seule unité de l’enseigne… | Moyenne échantillon total (n = 180) | Ecart- Type échantillon total (n= 180) | Moyenne réseaux pratiquant la M F (n= 139) | Moyenne réseaux ne pratiquant pas la M F (n=41) |
- …un franchisé à la tête de plusieurs unités est souvent plus performant en termes de CA par point de vente | 4,24 | 1,277 | 4,20 | 4,35 |
- …un franchisé à la tête de plusieurs unités est souvent plus performant en termes de rentabilité par point de vente | 4,58 | 1,342 | 4,58 | 4,55 |
Les scores les plus faibles concernent la possibilité pour le franchiseur de réaliser à travers la multi-franchise des économies en termes de coûts de management/contrôle du réseau ainsi qu’en termes de coûts de formation des franchisés, un résultat qui peut sembler contre-intuitif. En fait, la moyenne obtenue sur ces deux critères est malgré tout largement supérieure à 3,5 sur 7. De plus, on observe un niveau élevé de dispersion entre répondants (écart-type ≤ 1,57).
La capacité à favoriser la performance des unités à la fois en termes de chiffre d’affaires et de revenu net moyen par unité est un des avantages que les franchiseurs reconnaissent à la multi- franchise. Ce résultat corrobore les propos tenus par les réseaux lors de la phase qualitative de cette recherche. La multi-unité permet en effet au franchisé de réaliser des économies d’échelle via la mutualisation des ressources, ce qui se traduit par un étalement des coûts sur plusieurs unités. En revanche, la variable « chiffre d’affaires » semble quant à elle tributaire de nombreux facteurs autres que le seul nombre d’unités.
Enfin, le risque de voir la multi-franchise se traduire par une perte de pouvoir du franchiseur au profit du franchisé ne semble pas être un facteur alarmant. Le score obtenu sur cette variable est relativement faible. Néanmoins, c’est sur cette même variable qu’on observe l’écart-type le plus élevé. Les avis divergent donc, pouvant s’expliquer par des différences de perception dues au degré de multi-franchise du réseau mais aussi à la qualité des relations en cours avec les franchisés en place.
L’analyse par sous-échantillon présente quelques résultats intéressants. Les réseaux ne recourant pas encore à la multi-franchise croient moins en cette option pour se développer rapidement et couvrir le territoire national. En revanche, ils croient plus en la multi-franchise pour faire des économies en termes de coûts de recrutement et de formation. L’expérience relativise ces avantages de la multi-franchise. Les réseaux y recourant déjà pour se développer sont ainsi moins enclins que les non-utilisateurs à lui accorder un effet bénéfique en termes d’économies.
Une analyse en composante principale a ensuite été réalisée sur les 11 items qui précèdent afin de faire ressortir les principaux axes explicatifs du recours à l’option multi-franchise pour se développer.
La matrice des composantes après rotation est présentée ci-dessous (tableau 3.5).
Tableau 3.5 - Matrice des composantes après rotation
Composante | |||
1 | 2 | 3 | |
- croître plus vite | ,803 | ||
- récompenser les meilleurs franchisés | ,745 | ||
- mailler de façon cohérente le territoire | ,811 | ||
- faire des économies en termes de coûts de management / contrôle du réseau | ,839 | ||
- faire des économies en termes de coûts de formation des franchisés | ,903 | ||
- plus performant en termes de CA par point de vente | ,929 | ||
- plus performant en termes de rentabilité par point de vente | ,912 |
Méthode d'extraction : Analyse en composantes principales. Méthode de rotation : Varimax avec normalisation de Kaiser. La rotation a convergé en 6 itérations.
Trois composantes se détachent qui peuvent être interprétées comme les trois grands avantages recherchés par les franchiseurs à travers le développement en multi-franchise :
- la croissance stratégique : croître en maillant le territoire en s’appuyant sur les
meilleurs ;
- les économies d’échelle : dépenser moins (ou pas davantage) à la fois en amont (formation) et en aval (management/contrôle) ;
- la performance : permettre de dégager des résultats plus élevés grâce aux économies
d’échelle et à la mutualisation des ressources.
3.3.2 Satisfaction vis-à-vis de la stratégie choisie et intentions
Malgré ces avantages, tous les réseaux n’ont pas choisi de se développer en multi-franchise. Nous avons demandé aux franchiseurs de nous dire :
- s’ils étaient satisfaits de leur choix de stratégie de développement (tableau 3.6)
- quelles étaient leurs intentions dans ce domaine pour les deux prochaines années (tableau 3.7).
Tableau 3.6 - Niveau de satisfaction avec la décision prise
n12 | Moyenne | Ecart- type | |
Si vous recourez déjà à la multi-franchise pour vous développer, êtes-vous satisfait d’avoir pris cette décision ? | 138 | 5,34 | 1,270 |
Si vous ne recourez pas encore à la multi-franchise pour vous développer, êtes-vous satisfait d’avoir pris cette décision ? | 32 | 4,44 | 1,243 |
Tableau 3.7 - Intentions de se développer en multi-franchise dans les deux années13
Intention | Réseau ne recourant pas encore à la multi-franchise | % | Réseau recourant déjà à la multi-franchise | % |
NON | 10 | 23,2 | 19 | 13,6 |
OUI via stratégie séquentielle | 16 | 37,2 | 88 | 63,3 |
OUI via stratégie d’accords de zone | 9 | 20,9 | 20 | 14,4 |
NE SAIT PAS | 8 | 18,7 | 12 | 8,6 |
Total | 43 | 100,0 | 139 | 100,0 |
L’observation principale est que les réseaux qui ont déjà recouru à la multi-franchise pour se développer sont plus satisfaits d’avoir fait ce choix que ceux qui s’y sont jusqu’ici refusé. Cette observation est en ligne avec les analyses qui précèdent qui suggèrent que les franchiseurs perçoivent la multi-franchise comme une stratégie de développement qui présente plus d’avantages que d’inconvénients. D’ailleurs, ils sont plus nombreux à vouloir poursuivre dans cette direction : 77% d’entre eux ont l’intention de poursuivre une stratégie
12 24 questionnaires n’ont pas été retenus pour l’analyse des réponses à cette question, soit parce que les réseaux ont répondu aux deux questions, soit parce qu’ils n’ont répondu à aucune.
13 Les réseaux ayant signalé privilégier les deux stratégies simultanément ont été comptabilisés dans chacune des deux catégories.
de multi-franchise contre 57% des réseaux mono-franchise qui envisagent de se lancer en multi-franchise dans les deux prochaines années.
Il est intéressant de noter que ce sont les réseaux qui ne recourent pas encore à la multi- franchise qui pensent plutôt privilégier une stratégie d’accords de zone à l’avenir. S’agit-il pour eux de rattraper leur retard ?
Pour nous en assurer, nous avons mesuré le taux de croissance moyen en franchise des réseaux sur les trois dernières années (2008-2011) selon la stratégie de développement qu’ils pensent privilégier au cours des deux prochaines années (sans distinguer entre les réseaux selon qu’ils soient déjà ou non en multi-franchise). On obtient les résultats suivants (tableau 3.8) :
Tableau 3.8 – C roissance du réseau et intentions de se développer en multi-franchise
Stratégie privilégiée | Taux de croissance moyen en franchise % | Nombre de répondants | % |
NON | - 2,13 | 27 | 15,7 |
OUI via stratégie séquentielle | 5,26 | 100 | 58,1 |
OUI via stratégie d’accords de zone | 3,99 | 28 | 16,3 |
NE SAIT PAS Total | 2,83 | 17 172 | 9,9 100,0 |
S’il n’est pas possible de proposer un niveau d’analyse plus fin qui consisterait par exemple à comparer le type de réponse selon la stratégie privilégiée sur la période 2008-2011, on peut noter que ce sont les réseaux les moins enclins à privilégier la multi-franchise au cours des deux prochaines années ou qui restent interrogatifs sur l’opportunité d’y recourir (réponses NON ou NE SAIT PAS) qui ont connu les taux de croissance les plus faibles sur la période récente.
A contrario, les réseaux qui pensent privilégier l’option multi-franchise dans les deux prochaines années sont ceux qui ont connu les taux de croissance en franchise les plus élevés. Ces observations suggèrent, ce que nous confirmerons ultérieurement, l’existence d’un cercle vertueux entre multi-franchise et croissance du réseau.
Chapitre 4
AVANTAGES COMPETITIFS ET PERFORMANCE EN MULTI-FRANCHISE
Le cadre théorique de notre recherche fait l’hypothèse que le recours par un réseau à la multi- franchise pour se développer permet :
- une croissance plus rapide qu’un développement en mono-franchise (H3a)
- une couverture territoriale plus élevée (H3b)
- une adaptation plus facile aux évolutions de son environnement (H3c)
- un degré d’uniformité du réseau plus élevé (H3d)
En revanche, elle se traduirait par une moindre réactivité aux évolutions locales (H3d)
Au plan de la performance, le réseau peut espérer d’une stratégie de développement en multi- franchise :
- obtenir un niveau de performance économique supérieur (H4)
- augmenter la valeur de son image de marque (H5)
- réaliser des économies en termes de coûts de contrôle (H6)
La section 1 présente l’échantillon de la recherche (ventilation sectorielle et caractéristiques
des répondants).
La section 2 présente les résultats du test du modèle de recherche franchiseurs (volet
« conséquences » de la multi-franchise).
La section 3 présente les résultats d’une analyse multi-groupes permettant d’identifier le taux de multi-franchise pour lequel les avantages compétitifs et la performance économique sont les plus élevés.
La section 4 porte sur les résultats de l’analyse du test du modèle franchisés, résultats visant à éclairer ceux obtenus à travers l’enquête franchiseurs.
4.1 Caractéristiques de l’échantillon
Tableau 4.1 - Répartition sectorielle des répondants
Secteur | Nombre | % |
Equipement de la personne | 19 | 10,1 |
Equipement de la maison | 19 | 10,1 |
Alimentaire | 19 | 10,1 |
Commerce divers | 19 | 10,1 |
Services Auto | 10 | 5,3 |
Bâtiment et énergie | 16 | 8,5 |
Coiffure et esthétique | 20 | 10,6 |
Autres services à la personne | 20 | 10,6 |
Services aux entreprises | 12 | 6,4 |
Hôtels | 5 | 2,7 |
Restauration rapide | 9 | 4,8 |
Restauration a thème | 12 | 6,4 |
Immobilier | 7 | 3,7 |
Voyages | 1 | 0,6 |
Total | 188 | 100,0 |
Tableau 4.2 - Caractéristiques des répondants
Variable | Nombre | % | moyenne | mini | maxi |
Age moyen des réseaux | - | - | 17,74 | 2 | 91 |
Nombre moyens d’unités succursalistes par réseau | - | - | 32,16 | 0 | 420 |
Nombre moyen d’unités en franchise par réseau | - | - | 65,11 | 1 | 900 |
Proportion de franchisés dans le réseau | - | - | 76% | 0% | 100% |
Appartenance à un réseau - mono-enseigne - multi-enseignes | 154 34 | 81,9% 18,1% | - | - | - |
Type de franchise 1 - franchise de produit - franchise de service | 78 110 | 41,5% 58,5% | - | - | - |
Type de franchise 2 - achat répété - achat non répété | 95 93 | 50,5% 49,5% | - | - | - |
4.2 Les avantages compétitifs de la multi-franchise
Le tableau 4.3 présente les résultats du test du modèle franchiseur.
Tableau 4.3 - Résultats du test du modèle franchiseur
Var. dépendante : Taux multi-franchise | Coefficient | Sig. |
Capacités financières du franchiseur | 0.005 | 0.31 |
Nombre et qualité des candidatures reçues | 0.021 | 0.02 |
Importance de la connaissance du marché local | -0.029 | 0.00 |
Investissements spécifiques du franchiseur | -0.011 | 0.26 |
Niveau d’incertitude environnementale | -0.003 | 0.41 |
Niveau d’incertitude comportementale | 0.040 | 0.00 |
VARIABLES DE CONTROLE F ranchise de produit vs de services | 0.036 | 0.06 |
Achat répété vs non répété | 0.009 | 0.36 |
Appartenance à un groupe multi-enseignes | 0.107 | 0.00 |
Age du réseau | -0.001 | 0.22 |
Proportion d’unités franchisées dans réseau | -0.141 | 0.01 |
Taille du réseau (succursales + franchise) | 0.001 | 0.00 |
Var. indépendante : Taux multi-franchise | Coefficient | Sig. |
Taux de croissance du réseau | 13.587 | 0.09 |
Couverture ter ritoriale du réseau | 25.437 | 0.04 |
Adaptation générale du réseau à son environnement | -0.839 | 0.19 |
Uniformité du réseau | 0.334 | 0.28 |
Réactivité du réseau aux évolutions locales | 0.097 | 0.39 |
Performance économique du réseau | 0.154 | 0.04 |
Valeur de l’image de marque du réseau | 0.499 | 0.16 |
Coûts de contrôle du réseau | -0.114 | 0.02 |
Lecture du tableau :
Les coefficients reportés sont non standardisés. Ils peuvent se lire ainsi : une évolution de
« 1 » de la variable indépendante (ici le taux de multi-franchise si on s’intéresse aux conséquences de la multi-franchise) conduit à une modification de x de la variable dépendante. Par exemple, pour le lien entre taux de multi-franchise et couverture territoriale, il faut comprendre que lorsque la variable taux de multi-franchise progresse de 1 (c'est-à-dire de 100%), le nombre de départements dans lequel le réseau est présent augmente de 25. Autrement dit, toute progression de 4% du nombre de franchisés multi-unités dans un réseau se traduit par la présence dans 2,5 départements de plus. Il s’agit bien entendu d’une estimation qui repose sur l’hypothèse d’une relation linéaire.
4.2.1 Multi-franchise et croissance du réseau (H3a)
Comme nous en avions fait l’hypothèse, il existe un lien positif et significatif entre le taux de multi-franchise d’un réseau et son taux de croissance mesuré par le pourcentage d’accroissement du nombre d’unités en franchise sur les trois dernières années (13,58 ; 0.09). On reproduit donc les résultats observés dans des travaux précédents (Xxxxxxxx et Xxx, 1994 ; Xxxxxxxx et Dant, 1996), confirmant au passage l’intuition exprimée par les franchiseurs lors de la phase qualitative de cette recherche.
4.2.2 Multi-franchise et couverture du territoire (H3b)
Comme le soulignent les résultats obtenus (25,43 ; 0.04), le choix de la multi-franchise comme option de développement favorise une meilleure couverture du territoire national. Il s’agit donc d’une stratégie qui favorise la dispersion géographique du réseau et donc sa capacité à occuper le territoire, vecteur d’image.
4.2.3 Multi-franchise et adaptation générale du réseau aux évolutions de son environnement (H3c)
Bradach (1995) suggère que la multi-franchise favorise la capacité d’un réseau à s’adapter aux
évolutions de son environnement. L’argument est qu’il est plus aisé pour le franchiseur de
« vendre » des changements et des innovations à un franchisé multi-unités dont les unités sont
concentrées qu’à des franchisés mono-unité dispersés sur le territoire. Nos résultats (-0,839 ; 0,89) ne vérifient toutefois pas cette hypothèse et suggèrent que le taux de multi-franchise d’un réseau n’est pas lié à une capacité d’adaptation plus élevée.
Peut-être faut-il voir dans ce résultat le fait que les franchisés à la tête de plusieurs unités ne sont finalement pas plus faciles à convaincre. Ils ont en général une meilleure connaissance des affaires et leur taille les rend moins sensibles aux menaces que peut faire peser sur eux leur franchiseur s’ils n’acceptent pas d’introduire les modifications demandées (Xxxxxxx, 1995).
4.2.4 Multi-franchise et uniformité du réseau (H3d)
On observe également une absence de différence significative (0,334 ; 0,28) entre mono et multi-franchise en termes d’uniformité du réseau (degré d’uniformité mesuré à travers le niveau de respect des consignes du franchiseur par le franchisé).
Ce résultat ne valide pas l’hypothèse que nous avions faite mais elle rejoint la proposition de Xxxxxxx (1998) dans le cas américain. L’auteur reconnait lui-même le coté contre-intuitif de cette proposition puisqu’on peut au contraire penser qu’un franchisé multi-unités aura tendance à dupliquer dans la mini-chaîne le fonctionnement de son franchiseur (ce que suggèrent d’ailleurs les entretiens réalisés lors de la phase qualitative de la recherche), contribuant à l’homogénéité des pratiques.
4.2.5 Multi-franchise et réactivité du réseau aux évolutions locales (H3e)
Un réseau composé majoritairement de franchisés mono-unité devrait « réagir » plus rapidement au plan local qu’un réseau composé de franchisés multi-unités dont le fonctionnement est plus institutionnalisé. En outre, le franchisé multi-unités étant plus éloigné de ses unités, donc de son marché local, il est moins attentif à ce qui s’y passe au plan concurrentiel.
Les résultats obtenus au test de l’hypothèse H3e (0,097 ; 0,39) ne permettent toutefois pas de la valider.
4.2.6 Multi-franchise et performance économique du réseau (H4)
La multi-franchise se traduit par un niveau de performance économique du réseau plus élevé (0,154 ; 0,04).
On peut penser que les franchiseurs – qui recourent pour la majorité d’entre eux à une stratégie séquentielle – ne laissent que les meilleurs de leurs franchisés multiplier les unités, ce qui contribue certainement au renforcement de la performance du système dans son ensemble.
4.2.7 Multi-franchise et valeur de l’image de marque du réseau (H5)
Un résultat qui peut paraître surprenant est l’absence de lien entre multi-franchise et valeur de l’image de marque du réseau (0,499 ; 0,16). Le développement en multi-franchise impactant la couverture territoriale du réseau et celle-ci étant liée positivement et significativement à la valeur de l’image de marque du réseau, on peut penser qu’il existe un lien mais que celui-ci est indirect, médiatisé par la présence visible du réseau sur une grande partie du territoire national.
4.2.8 Multi-franchise et coûts de contrôle du réseau (H6)
Nous avons fait l’hypothèse que le développement en multi-franchise devait se traduire par une réduction des coûts de contrôle supportés par le franchiseur. C’est bien ce que nous observons (-0,114 ; 0,02). Il s’agit là du troisième avantage compétitif fort de la multi- franchise avec la vitesse de croissance et la couverture territoriale.
L’ensemble des résultats observés conduit donc à conclure à la pertinence du développement en multi-franchise, en premier lieu car il s’agit d’une option de développement au service d’une croissance et d’une couverture territoriale plus fortes ; en second lieu parce qu’elle est la source d’une meilleure performance économique du réseau et se traduit par des économies en termes de coûts de contrôle.
La question se pose néanmoins du taux optimal de multi-franchise au sein d’un réseau. C’est ce qu’explore la section suivante.
4.3 Analyse multi-groupes : à la recherche d’un taux
optimal de multi-franchise
Nous avons cherché à identifier s’il existait un taux de multi-franchise optimal, c'est-à-dire offrant pour chacune des variables observées précédemment un meilleur « rendement » pour reprendre l’expression d’un franchiseur.
Nous avons divisé notre échantillon (178 répondants14) en cinq groupes de taille homogène :
- Groupe 0 : réseaux ne comptant aucun franchisé multi-unités (44 réseaux)
- Groupe 1 : réseaux comptant jusque 7,65% de franchisés multi-unités (33 réseaux)
- Groupe 2 : réseaux comptant entre 7,65% et 16,25% de franchisés multi-unités (34 réseaux)
- Groupe 3 : réseaux comptant entre 16,25% et 28,8% de franchisés multi-unités (34 réseaux)
- Groupe 4 : réseaux comptant plus de 28,8% de franchisés multi-unités (33 réseaux)
Un test de moyenne a ensuite été réalisé pour vérifier si ces groupes présentaient des différences significatives pour chacune des variables étudiées (tableau 4.4).
14 Sont retenus les réseaux pour lesquels on dispose de données complètes pour chacune des variables cibles
Tableau 4.4 – Tests de différence de moyennes entre taux de multi-franchise
Variable dépendante | G roupe | Moyenne | Sig. |
0 | 14.364 | 0,00 | |
1 | 39.053 | ||
Couverture ter ritoriale du réseau | 2 | 36.087 | |
3 | 29.560 | ||
4 | 39.160 | ||
0 | 4.964 | 0,04 | |
1 | 5.242 | ||
Uniformité du réseau | 2 | 5.539 | |
3 | 5.672 | ||
4 | 5.232 | ||
0 | .269 | 0,16 | |
1 | 2.674 | ||
Taux de croissance du réseau | 2 | 2.871 | |
3 | .802 | ||
4 | 11.488 | ||
0 | 4.197 | 0,55 | |
1 | 3.930 | ||
Réactivité du réseau aux évolutions locales | 2 | 3.783 | |
3 | 3.827 | ||
4 | 3.907 | ||
0 | 5.159 | 0,73 | |
Adaptation générale du réseau à son environnement | 1 2 3 | 5.000 5.120 5.430 | |
4 | 4.990 | ||
0 | 4.152 | 0,05 | |
1 | 4.474 | ||
Performance économique du réseau | 2 | 5.159 | |
3 | 4.973 | ||
4 | 4.680 | ||
0 | 4.943 | 0,59 | |
1 | 5.013 | ||
Valeur de l’image de marque du réseau | 2 | 5.337 | |
3 | 5.220 | ||
4 | 5.230 | ||
0 | .245 | 0,07 | |
1 | .105 | ||
Coûts de contrôle du réseau | 2 | .167 | |
3 | .133 | ||
4 | .233 |
On observe une différence significative au seuil 0,10 (sachant que nous pouvons diviser la valeur par deux dès lors que nous testons les effets de la multi-franchise, soit une seule partie du modèle).
Cela signifie que les effets de la multi-franchise varient selon le taux de multi-franchise du réseau. L’analyse multi-groupes fait ainsi apparaître un lien entre taux de multi-franchise et niveau d’uniformité du réseau, lien qui n’apparaissait pas lorsqu’on ne distinguait pas les réseaux selon leur pourcentage de franchisés multi-unités.
Les cinq cadres présentés ci-après présentent sous forme schématique les trajectoires prises par chacune des variables pour lesquelles il existe des différences significatives selon le taux de multi-franchise du réseau.
4.3.1 Multi-franchise et croissance du réseau
Sur la période récente (2008-2011), ce sont les réseaux les plus développés en multi-franchise qui ont connu les croissances les plus élevées en nombre d’unités en franchise.
Cela signifie que si la croissance en franchise est la priorité pour le franchiseur, il a intérêt à recourir à la multi-franchise pour se développer. Le taux « supérieur à 28,8% » est donc un taux plancher davantage qu’un taux optimal.
4.3.2 Multi-franchise et couverture territoriale
On observe que tous les groupes sont caractérisés par un niveau relativement élevé de couverture territoriale après un premier bond lorsque le réseau décide de se lancer en multi- franchise. Le nombre de départements couverts par l’enseigne triple alors, passant de 14 à 39 départements couverts). On constate ensuite une relative stabilisation (autour de 35 à 40 départements métropolitains couverts en moyenne) quel que soit le taux de multi-franchise de l’enseigne.
Comme pour le taux de croissance du réseau, avec lequel elle est d’ailleurs corrélée, la couverture territoriale connaît une légère inflexion pour les réseaux dont le taux de multi- franchise est compris entre 16,25 et 28,8 %.
Face à ces observations, on peut poser qu’il n’existe pas réellement de taux optimal de multi- franchise mais plutôt un taux minimum.
4.3.3 Multi-franchise et uniformité du réseau
Ce n’est qu’à partir d’un seuil élevé de multi-franchise (au-delà de 16,25% - 28,8%) que le réseau semble moins capable de s’assurer du respect par ses franchisés des directives qui leur sont données. On observe en effet une chute brutale du niveau moyen d’uniformité pour les réseaux dont le taux de multi-franchise dépasse 28,8 %.
Cela signifie qu’un réseau valorisant l’uniformité veillera à ne pas dépasser le quart de ses
franchisés en multi-unités.
4.3.4 Multi-franchise et coûts de contrôle
C’est d’ailleurs au-delà de ce seuil qu’on observe que les coûts de contrôle augmentent après
avoir baissé à mesure que le taux de multi-franchise progressait.
Ce qui suggère que le franchiseur doit alors revenir à des dépenses de management plus élevées. Il peut moins compter, au-delà d’un certain taux de multi-franchise, sur les franchisés multi-unités pour réguler seuls leurs mini-chaînes (rappelons que le taux de multi-franchise ainsi que la taille des mini-chaînes augmentent avec la taille des réseaux).
4.3.5 Multi-franchise et performance économique du réseau
L’ensemble des observations précédentes se retrouvent quelque part condensées dans le niveau de performance économique déclaré par le réseau.
Celui-ci est plus élevé pour les réseaux comptant un taux de multi-franchise compris entre 7,65% et 16,25%. Il décline ensuite lentement (tout en restant toutefois plus élevé que dans le cas de la mono-franchise). Cela signifie que la performance ne découle pas de la seule croissance du réseau en ombre d’unités mais également de sa qualité (uniformité) et de son management (coûts de contrôle).
La lecture de ces résultats suggère l’existence non pas d’un taux optimal de multi-franchise mais de différents taux planchers ou plafonds qui varient.
Si le franchiseur privilégie la croissance du réseau et la couverture territoriale, l’option multi- franchise pour se développer semble appropriée. Celle-ci, en lui permettant un gain de temps en matière d’opérationnalisation des nouvelles unités, permettra d’aller plus vite pour se développer. Le taux de multi-franchise le plus élevé possible est dès lors encouragé.
Si la multi-franchise est un levier pour réduire les coûts de contrôle, notre recherche estime que c’est dans une fourchette comprise entre 20 à 25% du nombre total de franchisés en multi-unités que les coûts de contrôle sont les plus faibles. Au-delà, le réseau perdrait l’avantage que la multi-franchise lui offrait en déléguant aux franchisés multi-unités le contrôle de plusieurs unités. Il devrait à nouveau supporter des coûts élevés de contrôle. Il apparaît en effet qu’au-delà de ce seuil, les franchisés respectent moins les directives de leur franchiseur.
L’analyse multi-groupes montre ainsi l’existence d’une antinomie entre recherche de croissance et de couverture territoriale d’un côté et uniformité du réseau et coûts de contrôle de l’autre.
4.4 Les avantages compétitifs de la multi-unité
Les résultats qui viennent d’être présentés reposent sur le questionnement des franchiseurs. Nous avons noté que plusieurs de nos hypothèses (relatives, entre-autres, à la capacité de la multi-franchise de favoriser l’adaptation du réseau à l’évolution de son environnement ou encore à renforcer la valeur de son image de marque) n’étaient pas vérifiées. Il est opportun d’interroger les franchisés afin de s’assurer si leur comportement ou attitude confirment ces résultats.
Nous avons ainsi cherché à vérifier si les franchisés multi-unités :
- présentent un degré d’uniformité plus élevé que les franchisés mono-unité (h3a)
- réagissent moins rapidement aux évolutions du marché local (h3b)
- favorisent l’adaptation générale du système (h3c)
- obtiennent un niveau de performance plus élevé en termes de chiffre d’affaires moyen
par unité (h4a) et en termes de résultat net moyen par unité (h4b)
- accordent une importance plus élevée à la valeur de l’image de marque du réseau (h5)
- expriment moins d’opportunisme que les franchisés mono-unité (h6)
Le test de ces différentes hypothèses a été réalisé en comparant les réponses des franchisés mono unité (mono mono mono) à celles des franchisés multi-unités puis en distinguant chez ces derniers trois profils :
- les franchisés à la tête de plusieurs unités du même réseau (multi mono mono) ;
- les franchisés à la tête de plusieurs unités appartenant à des enseignes différentes relevant du même franchiseur (multi multi mono) ;
- les franchisés à la tête de plusieurs unités appartenant à des enseignes différentes relevant de franchiseurs différents (multi multi multi).
Nous démarrons par une description détaillée des caractéristiques de l’échantillon des
répondants.
Nous présentons ensuite les résultats du test des hypothèses h3a à h6.
Nous cherchons enfin à identifier s’il existe un taux optimal de multi-unités coté franchisé, c'est-à-dire un nombre d’unités pour lequel les variables observées « surperforment ».
4.4.1 Présentation de l’échantillon de recherche franchisés
Tableau 4.5 - Répartition sectorielle des répondants
Secteur | Nombre | % |
Equipement de la personne | 30 | 6,0 |
Equipement de la maison | 36 | 7,3 |
Alimentaire | 41 | 8,3 |
Commerce divers | 54 | 10,9 |
Services Auto | 16 | 3,2 |
Bâtiment et énergie | 42 | 8,4 |
Coiffure et esthétique | 43 | 8,7 |
Autres services à la personne | 76 | 15,3 |
Services aux entreprises | 17 | 3,4 |
Hôtels | 29 | 5,8 |
Restauration rapide | 11 | 2,2 |
Restauration a thème | 20 | 4,0 |
Immobilier | 53 | 10,7 |
Voyages | 3 | 0,6 |
Non indiqué | 26 | 5,2 |
Total | 497 | 100,0 |
Tableau 4.6 - Ventilation sectorielle des répondants par type
Secteur | F ranchisés mono-unités | F ranchisés multi-unités |
Equipement de la personne | 63,3 % | 36,7 % |
Equipement de la maison | 77,8 % | 22,2 % |
Alimentaire | 78,0 % | 22,0 % |
Commerce divers | 75,9 % | 24,1 % |
Services Auto | 43,8 % | 56,3 % |
Bâtiment et énergie | 86,1% | 13,9 % |
Coiffure et esthétique | 76,7 % | 23,3 % |
Autres services à la personne | 76,3 % | 23,7 % |
Services aux entreprises | 88,2 % | 11,8 % |
Hôtels | 41,4 % | 58,6 % |
Restauration rapide | 36,4 % | 63,6 % |
Restauration a thème | 75,0 % | 25,0 % |
Immobilier | 78,3 % | 21,7 % |
Voyages | 33,3 % | 66,7 % |
Total | 73,2 % | 26,8 % |
Tableau 4.7 - Caractéristiques des répondants
Variable | mono mono mono | % | multi mono mono | % | multi multi mono | % | multi multi multi | % |
Nombre de franchisés | 365 | 73,4 | 88 | 17,7 | 18 | 3,6 | 26 | 5,2 |
Age moyen des franchisés (années) | 44,4 | - | 45,7 | - | 43,3 | - | 45,8 | - |
Sexe masculin Sexe féminin | 224 127 | 63,8 36,2 | 65 21 | 75,6 24,4 | 13 5 | 72,0 28,0 | 16 8 | 66,6 33,4 |
Ancienneté moyenne dans le réseau principal (années) | 5,5 | - | 7,1 | - | 9,4 | - | 8 | - |
Niveau d’éducation Autodidacte CAP, XX Xxx, Xxxxxx xx xxxxxxxxxx Xxx x 0 Xxx + 3 Bac + 4 Bac + 5 | 12 36 44 103 45 40 73 | 3,4 10,2 12,5 29,2 12,7 11,3 20,7 | 9 9 6 20 8 13 21 | 10,4 10,4 7,6 23,1 9,2 15,0 24,3 | - 3 2 3 1 5 4 | - 16,7 11,1 16,7 5,5 27,7 22,3 | 1 2 3 4 5 5 4 | 4,1 8,3 12,6 16,7 20,8 20,8 16,7 |
Pré-expérience en tant qu’entrepreneur NON OUI | 247 108 | 69,6 31,4 | 49 37 | 56,9 43,1 | 12 6 | 66,6 33,4 | 11 13 | 45,8 54,2 |
Mode de développement SEQUENTIEL ACCORD DE ZONE MIX | - - - | - - - | 69 18 1 | 78,4 20,4 1,2 | 17 1 0 | 94,4 5,6 - | 23 2 1 | 88,4 7,7 3,9 |
Type de management DIRECT DELEGUE MIX | - - - | - - - | 53 16 19 | 60,2 18,2 21,6 | 6 7 5 | 33,3 38,8 27,9 | 7 11 8 | 26,9 42,3 30,8 |
Etape du cycle de vie Lune de miel Routine Plateau Rupture Pour la vie | 59 47 85 44 118 | 16,7% 13,3% 24,1% 12,5% 33,4% | 9 15 165 9 38 | 10,3% 17,2% 18,4% 10,3% 43,7% | 2 3 6 3 4 | 11,1% 16,7% 33,3% 16,7% 22,2% | 3 2 7 3 9 | 12,5% 8,3% 29,2% 12,5% 37,5% |
Intention d’ouvrir dans les 2 ans une nouvelle unité NON OUI dans le même système OUI dans un autre système OUI dans même + autre système | 221 108 26 10 | 60,5 29,6 7,1 2.7 | 40 33 10 5 | 45,5 37,5 11,4 5,7 | 7 4 4 3 | 38,9 22,2 22,2 16,7 | 8 8 7 3 | 30,8 30,8 26,9 11,5 |
Temps de trajet (minutes) | 20,3 | - | 46,6 | - | 46,2 | - | 86,7 | - |